La généralisation de la corruption en Algérie est apparemment une entreprise florissante. Ce phénomène dévastateur n'a épargné aucun secteur de la vie. Il n'y a pas un jour où on ne signale pas l'arrestation d'un policier ripoux, d'un fonctionnaire qui perçoit la tchippa contre un service fait, d'un élu qui perçoit des «mesures d'accompagnement» d'un entrepreneur contre l'octroi d'un marché ou d'un agent d'une banque pris en flagrant délit de corruption. Les dessous de table, les pots-de-vin, les commissions occultes et le bakchich ont gangrené aussi le domaine sportif, notamment le football. Aujourd'hui, le trafic et les magouilles ont pris la place de la morale dans ce sport le plus populaire, allant jusqu'à le pourrir. Il ne se passe pas une saison où on n'entend pas parler de l'achat d'un match par un club ou de la combinaison d'un autre match contre un autre club. Cela, bien sûr, ne se fait pas à titre gracieux et ne relève pas d'un acte de bienfaisance. Des sommes faramineuses sont dépensées pour corrompre un arbitre, un joueur, un président de club, un membre de la fédération, un président d'une ligue… Il ne peut y avoir de corruption sans une coordination entre les différents acteurs. Ainsi, le monde du football verse dans l'informel. Les matches se vendent et s'achètent dans les restaurants huppés autour d'un repas succulent. Au même moment, des jeunes font l'aumône afin de se déplacer au stade pour voir jouer leur équipe. Des déplacements, faut-il le souligner, qui se font parfois au péril de leur vie. Actuellement, la banalisation de la corruption a rendu difficile la lutte contre ce phénomène. A cela s'ajoute l'attitude des responsables du secteur qui n'ont pas affiché une réelle volonté d'endiguer ce fléau. Au lieu de mettre en place des mécanismes et des instruments pour combattre la corruption et mettre de l'ordre dans notre football, les responsables de la FAF, les présidents de Ligue et les acteurs du sport favori de millions d'Algériens se contentent de condamner par des mots ce qui doit être éradiqué par des actes. L'ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, ne ratait aucune occasion pour dénoncer les magouilles qui pourrissent le secteur de la jeunesse et des sports. Il a même osé citer des noms de dirigeants qui usent de la corruption comme moyen de maintien ou d'accession de leur club. M. Guidoum s'est attaqué nommément au président de l'USM Annaba, Aïssa Menadi, en s'interrogeant sur l'origine de l'argent qu'il dépense pour «acheter» des joueurs. Par ailleurs, des cadres honnêtes, dans le secteur du sport ne cessent de tirer la sonnette d'alarme sur ce danger qui guette le football national. Des transactions se réalisent dans une discrétion telle qu'il est impossible d'avoir des preuves tangibles sur l'achat ou la vente d'un match, encore moins le prix payé. Au moment où tout le monde attendait des décisions rigoureuses pour sanctionner les corrompus et les corrupteurs du football, le ministre de la Jeunesse et des Sports, M. Hachemi Djiar, s'est contenté de déclarer que la corruption est une réalité du football algérien, «mais elle n'est pas propre à l'Algérie» ! La lutte contre la corruption dans le monde du football est aussi une réalité mondiale dont l'Algérie ne se sent pas concernée. Il est urgent, voire vital que les autorités protestent officiellement contre les agissements de certains dirigeants de club qui ont sombré dans les marécages de la corruption. Des mesures sévères doivent être prises contre les épiciers du foot pour rendre justice aux millions de jeunes supporters. C. B.