Les pharmaciens d'officine menacent de recourir à une grève générale, au cas où le gouvernement ne répondait pas favorablement à leurs revendications, principalement celle relative à la mouture sur les marges bénéficiaires. Dans une conférence de presse tenue, hier, au centre commercial d'El Quods, à Chéraga, animée par les représentants du Syndicat national algérien des pharmaciens d'officine (SNAPO), M. Fayçal Abed, président du syndicat, a affirmé que son mouvement syndical prévoit d'ores et déjà une action de protestation, à l'échelle nationale, si la tutelle continuait à négliger les difficultés de cette corporation. Des difficultés détaillées dans un rapport de 39 pages, remis au chef du gouvernement actuel et au président de la République, ainsi qu'aux ministères du Commerce et du Travail. Ce rapport retrace, selon M. Abed, la situation précaire de l'exercice de leur profession, depuis 1998, dans les 5 000 officines que compte notre pays. «Une situation pas très reluisante», si on se fiait aux déclarations de M. Abed qui a profité de la rencontre d'hier pour lancer un appel à tous les pharmaciens algériens afin de s'inscrire à leur démarche. Le SNAPO demande, également, aux pouvoirs publics d'ouvrir les portes des négociations, dénonçant, dans le même volet, l'élaboration du dernier décret sans les consulter. Un décret, jugé comme «un non-sens» puisque la marge bénéficiaire moyenne a été plafonnée à 17%, alors que l'imposition des officines est calculée sur la base de 20%, tout en précisant, dans ce contexte, que la marge bénéficiaire varie entre 30 et 33% dans la plupart des pays du monde. La grogne des pharmaciens ne provient pas uniquement de la réduction de la marge bénéficiaire qui risque de mener les officines à la faillite, mais elle est due également aux dépassements enregistrés dans le secteur, principalement à l'ère de l'ancien ministre, M. Amar Tou. Il s'agit, notamment, des inspections effectuées par des médecins et des chirurgiens dentistes, alors que cela est contraire à la loi, stipulant que les inspections sont du ressort des pharmaciens inspecteurs. L'intervenant évoque aussi l'ouverture de nouvelles officines qui se font au détriment des normes, c'est-à-dire un pharmacien pour 5 000 habitants d'une grande agglomération et un pharmacien pour 4 500 habitants lorsqu'il s'agit d'une ville moyenne. S'exprimant sur ce point, M. Naït Djoudi, membre du bureau national, a estimé que le ministre sortant encourageait les barons des médicaments au détriment des pharmaciens. Et d'ajouter : «Le ministre cherchait à nous déséquilibrer économiquement au profit de la libéralisation du secteur.» Amar Tou aurait voulu, selon les intervenants, installer le système appliqué dans les pays anglo-saxons, où un seul opérateur détient une chaîne de distribution de médicaments. Un système qui provoque la ruine des pharmaciens. Evoquant la politique du générique, Belamri Messaoud, membre du syndicat et chargé de la communication, a estimé qu'elle est vouée à l'échec, car elle est établie d'une manière à encourager la vente des molécules mères au détriment du générique. Chose qui pénalise sérieusement les malades. A ce sujet, M. Abed a estimé nécessaire d'élaborer des mesures d'accompagnement pour écouler les produits du générique. En réponse à la question relative à la pénurie de certains médicaments sur le marché national, les intervenants à la conférence ont été unanimes à affirmer que la rupture du stock était voulue. Cela a été confirmé, suite à la décision du gouvernement de signer les programmes d'importation, bloqués depuis des mois. M. Abed a affirmé que les 150 produits en rupture ont vite fait leur apparition sur le marché. Il s'agit de médicaments pour les maladies cardio-vasculaires, le diabète, l'hypertension, le cancer. Cette réalité a dévoilé les manœuvres malsaines, selon lui, de certains «monopolisateurs» du marché du médicament, de sorte à faire écouler le stock de certains produits non demandés sur le sujet. La pénurie a également révélé les défaillances du système de distribution. La question se pose : où est passé le stock de réserve ? Les intervenants ont, par ailleurs, énuméré moult problèmes dans l'exercice de leur profession. Pour clore la conférence, le syndicat a appelé à la révision du décret exécutif déterminant les marges maximales, introduit en mai dernier, à la réhabilitation des officines et à l'élaboration d'une liste officielle actualisée des psychotropes. S. A. Des milliers de tonnes de produits périmés stockés Les pharmaciens d'officine s'inquiètent, en outre, sur le devenir des quantités importantes de médicaments périmés. Ces produits sont stockés dans les officines depuis 2002, date de l'application de la loi portant sur l'interdiction de leur incinération, dans les décharges publiques, pour des raisons liées à la protection de l'environnement. L'opération doit se faire, pour rappel, dans des incinérateurs. Par ailleurs, M. Abed déplore l'absence d'incinérateurs agréés au niveau des hôpitaux. Le ministère de l'Environnement a été saisi pour trouver les solutions adéquates. S. A.