Photo : S. Zoheir Par Billal Larbi Bien avant le match capital que doit disputer l'équipe nationale algérienne face à son homologue égyptienne, une ferveur, que seul le football peut susciter, s'est emparée de la rue. Aucun événement national n'avait réussi à susciter à ce point l'engouement des Algériens pour l'emblème national. Celui qui déambule à travers nos quartiers devine aisément l'imminence d'un grand événement. Dans un pays où le football est considéré comme une seconde religion, tout l'environnement s'est métamorphosé. Rares sont ceux qui n'arborent pas les couleurs nationales. Les balcons, les devantures des magasins, les kiosques à tabac, les voitures, les cafés, tous sont aux couleurs de l'équipe nationale. Les exploits des Verts semblent booster la vente du drapeau national et autres articles. Tout le monde veut avoir son drapeau. Peu importe si le prix de ce dernier a atteint 1 500 dinars. Dans cette ambiance haute en couleur et sensations, ne pas avoir son propre drapeau est impensable. D'aucuns peuvent même l'assimiler à un acte blasphématoire. «L'essentiel est de montrer que nous sommes tous derrière cette équipe nationale. C'est le moins qu'on puisse faire en guise de soutien aux Verts, faute de pouvoir être sur place [au Cairo Stadium, ndlr] pour les soutenir», nous dira M'hamed, un jeune étudiant (à Ben Aknoun) venu de Ksar El Boukhari. Notre interlocuteur nous avouera qu'il n'a jamais été un grand amateur de football, pour ne pas dire un profane, «mais le fait que nous soyons en permanence assaillis par ces discussions portant sur le football a fini par nous influencer», ajoutera-t-il. Défiler dans les rues avec le drapeau national, à l'approche et après chaque match disputé par l'équipe nationale, avec autant de délire, constitue l'incontournable signe de soutien aux Verts. Tout en courant, et tout en scandant la fameuse «one, two, three, viva l'Algérie», des jeunes agitent le drapeau national perçu comme une fierté. D'autres jeunes, au volant de leur véhicule recouvert de drapeaux nationaux, zigzaguaient dans tous les sens en donnant des coups de klaxon. Dans ces conditions, et comme il fallait bien s'y attendre, le drapeau algérien fait le bonheur des commerçants. Bon nombre d'entre eux, notamment parmi les plus jeunes, ont épuisé leur stock et se sont vite empressés d'en faire des commandes auprès des ateliers de confection. Au niveau de ces derniers, c'est la course contre la montre pour confectionner le plus grand nombre d'emblèmes nationaux. Mais ce ne sont pas uniquement ces derniers qui constituent le point de mire des fans des Verts. Les pulls, les chapeaux, les parapluies et même les chaussettes aux couleurs de l'équipe nationale sont fortement demandés. Le fait que l'équipe nationale a le vent en poupe fait que les affaires marchent bien. Les supporters n'hésitent jamais à dépenser beaucoup d'argent pour acheter les drapeaux ou autres produits en relation avec les couleurs nationales. Les tricots frappés aux noms des joueurs sont cédés à pas moins de 700 DA au moment où les prix des survêtements pour enfants et des casquettes (aux couleurs de l'équipe nationale) valent respectivement 750 et 350 DA. «Pour être franc avec vous, ce filon lié à l'équipe nationale s'avère porteur. En l'espace de quelques jours, j'ai réalisé des bénéfices que je ne réalise, en temps normal, qu'en l'espace de 3 mois minimum», nous dira Mounir, un jeune affairiste qui nous avoue s'adonner également à la vente des affaires scolaires à la veille de la rentrée. Dans cette ambiance particulière, même les couturières se sont mises de la partie. Elles passent des journées entières à coudre des mètres et des mètres de tissu pour confectionner l'emblème national. En tout cas, et nonobstant cet aspect commercial, on se félicite du fait que l'équipe nationale ait pu rassembler autour d'elle tous les Algériens. Ces derniers, l'espace d'un match, et tout en mettant de côté leurs divergences politiques et partisanes, oublient leur dur quotidien fait de privations et de frustrations.