Voilà une initiative qui mettra du baume au cœur des Algérois, ces amoureux désenchantés de la lecture. Un nouveau café littéraire, l'«Ile-lettrée», ouvrira ses portes le 25 décembre prochain avec au menu, un programme d'animation varié, riche et original qui ne manquera pas certainement de séduire les passionnés du livre. «Ce sera, d'abord, un espace de convivialité, de rencontre et d'échange qui nous permettra de résister à cet océan de médiocrité dans lequel se noie chaque jour notre belle Alger. Pour cela, nous n'ambitionnons pas de faire un simple café où les gens pourront venir déguster agréablement un bon thé en parlant de livres. Non, l'objectif est de créer une rencontre avec les jeunes, ces lecteurs qu'il faut conquérir, afin de susciter en eux cette curiosité et ce désir de lire», nous confie, d'emblée, l'initiateur de ce projet unique en son genre à Alger, le libraire et éditeur Sid Ali Sekhri, lequel gère déjà avec brio la librairie et les éditions Mille-Feuilles. Notre interlocuteur, qui a roulé sa bosse durant de longues années de service à la fameuse et célèbre librairie de l'avenue Didouche Mourad, El Ghezali, a concocté pour son café, qu'il appellera l'«Ile-lettrée», brillant jeu de mots pour aiguiser l'imaginaire, des animations et des manifestations lesquelles font saliver, d'ores et déjà, les mélomanes, les assoiffés des doses de «livresse» et les «papillons branchés» en quête de ces espaces de rencontre qui se font de plus en plus rares en ce moment à Alger. Mais qu'ils ne s'inquiètent guère, Sid Ali et sa bande nous réservent d'heureuses surprises. Jugeons-en. D'abord, cinq jours par semaine, l'«Ile-lettrée» programmera des rencontres thématiques. Situé juste à côté de Radio El Bahdja et faisant face au lycée Omar Racim, l'«Ile-lettrée» associera à chaque fois les lycéens à ses animations. En effet, ces derniers sont conviés à participer aux rencontres et à animer des spectacles en y ajoutant leur propre touche. Ainsi, chaque mardi, de 14h à 17h, ils auront l'occasion de rencontrer une personnalité qui leur parlera de son métier. L'opportunité de connaître davantage le onde professionnel par le biais d'une expérience concrète leur est donc offerte dans cet espace qui est d'abord le leur. «Nous voulons que ces jeunes soient bien informés de ce que chaque métier peut leur apporter. Eux, qui sont appelés à faire des choix pour leur carrière, sont souvent mal informés sur les réalités des métiers qu'ils voudront pratiquer à l'avenir. C'est pour cela que, chaque mardi, nous inviterons un architecte, un journaliste, un médecin, etc. qui leur confiera les mystères et les clés du succès. Les lycéens pourront aussi demander des conseils et des orientations à ces professionnels qui leur seront d'une aide précieuse», relève à ce sujet Sid Ali Sekhri. Sur un autre registre, chaque jeudi, l'«Ile-lettrée» donne rendez-vous à l'histoire. En fait, des moudjahidate viendront au café littéraire pour parler aux jeunes lycéens et, bien sûr, à tous ceux et celles qui s'intéressent à l'histoire de la guerre d'indépendance, de leur vécu, de leur parcours et de leur combat pour la liberté de notre pays. «Nos jeunes connaissent mal l'histoire de leur pays et c'est là un drame qui fait violence à notre mémoire. Ces femmes, qui ont tout donné pour la libération de l'Algérie du joug colonial, sauront, j'en suis sûr, éclairer les esprits de nos enfants en leur apportant leur propre expérience», explique encore le bouillonnant Sid Ali Sekhri qui a réservé aussi la journée du mercredi au café philosophique, au cours duquel les participants devront faire de la «philosophie à coup de marteau», pour reprendre l'expression de Nietzsche, loin des discussions éthérées élitistes, en abordant sans complexe divers problèmes de l'existence humaine. Quant aux journées du dimanche et du samedi, l'«Ile-lettrée» sera squattée par toute personne qui désirera lire des textes littéraires ou poétiques. Cela dit, des auteurs auront également droit à la chapelle car des séances de dédicace leur seront réservées. Mais comme Sid Ali Sekhri ne fait guère les choses à moitié, son «Ile-lettrée» abritera chaque quinze jours une exposition photo et une autre de peinture qui seront sponsorisées par des opérateurs économiques connus sur la scène nationale. «L'intérêt est de soutenir l'émergence de nouveaux artistes bourrés de talents. Or, pour les encourager, il est important de leur permettre d'exposer leurs œuvres», souligne, à cet effet, Si Ali. Justement, le soutien des jeunes artistes trouvera sa plus ample expression dans la revue trimestrielle que les éditions Mille-feuilles éditeront prochainement. Par ailleurs, un prix des lecteurs, lequel sera décerné par un jury composé de lycéens et de simples lecteurs, sera mis en place par le café l'«Ile-lettrée» pour septembre de l'année prochaine. Ce prix portera le nom de la défunte Rachida Larbaoui, une excellente lectrice de son vivant qui donna tout son temps au soutien des jeunes auteurs et à l'amour de la lecture. Il est clair, enfin, que les «naufragés du livre» à Alger trouveront ainsi leur île salvatrice. Que de pareilles initiatives se reproduisent, c'est notre vœu le plus cher. A. S.