Les militaires guinéens ont célébré hier le premier anniversaire de la création du Conseil national pour le développement et la démocratie (CNDD), né du putsch qu'ils avaient fomenté au lendemain de la disparition de l'ancien président dictateur Lansana Conté, à l'âge de 74 ans, après 24 ans de règne. Le chef de la junte et président autoproclamé de Guinée, le capitaine Moussa Dadis Camara, n'a pas pu assister à la cérémonie. Il est toujours hospitalisé à Rabat, au Maroc, après la tentative avortée de son assassinat par son aide de camp, le lieutenant Aboubabakar Sidiki Diakité, dit Toumba, en fuite. La célébration de la première année de la prise du pouvoir intervient deux jours seulement après la publication du rapport d'enquête de l'ONU accusant Dadis Camara et plusieurs membres de la junte de crimes contre l'humanité en Guinée. Les enquêteurs de l'ONU leur imputent en fait la responsabilité des massacres commis à Conakry, le 28 septembre dernier, durant lesquels 157 personnes ont été tuées et 109 femmes violées et mutilées. La publication de ce rapport accablant a été suivie de l'adoption par l'Union européenne de nouvelles sanctions contre la junte. La liste des personnes liées au régime et déjà interdites de visa sur le territoire de l'Union européenne a été allongée, en plus du gel de leurs avoirs et de l'interdiction d'exportation de matériel pouvant servir à la répression en Guinée. D'ailleurs, on craint fort que des émeutes éclatent d'un moment à l'autre en raison du marasme social et économique que vit ce petit pays de l'Afrique de l'Ouest depuis l'arrivée au pouvoir des militaires. Ces derniers avaient justifié leur coup d'Etat par une pseudo volonté de lutter contre «la corruption généralisée, l'impunité érigée en méthode de gouvernement, l'anarchie dans l'appareil de l'Etat», après les 24 ans de règne de Conté et de son clan. Mais une année plus tard, la situation s'est dégradée à tel point que la population est sortie de ses gonds pour demander le départ de la junte, ce qui lui a coûté une tuerie dont ont été victimes des militants pacifistes. Des femmes ont été violées et mutilées chez elles et dans la rue. Alors que l'état de santé du capitaine Camara demeure un secret de Polichinelle, les militaires qui assurent l'intérim sont dans une position inconfortable et voient leur avenir incertain. La communauté internationale et la population guinéenne redoutent de nouvelles violences de la part des militaires qui cherchent désespérément une solution politique pour calmer la colère de l'opposition. L. M.