Photo : S. Zoheir Par Smaïl Boughazi Peut-on, en Algérie, un jour arriver ou, plutôt, assurer une situation de plein emploi ? Répondre à cette question est assurément un exercice ardu pour les responsables comme pour les spécialistes. C'est sans nul doute un défi pour tous les pays du globe. Aujourd'hui, il ne faut pas perdre de vue l'instabilité de plus en plus présente et persistante dans l'économie mondiale. L'année 2009 a été un exemple frappant pour la situation de l'emploi dans le monde. On a vu des géants dans différents secteurs licencier des milliers d'employés. Pour les économistes, il s'agit là d'un signal d'alarme. Le plein emploi est ainsi un slogan qui n'existe plus même dans l'esprit des économistes. Si, dans le monde, la situation est peu reluisante, quid de notre pays qui a mis en place plusieurs mécanismes pour réduire le taux du chômage à des proportions «acceptables» ? Les responsables parlent en fait d'un exploit car, comme on l'aura vu, entre 1999 et 2009, le taux de chômage a diminué. De plus de 30%, il a été ramené à environ 11 % à fin 2009, (selon les prévisions). Le travail est colossal, commentent certains observateurs. Pour un tel exploit, deux programmes quinquennaux ont été mis en œuvre. Une pléiade de mécanismes a aussi vu le jour depuis le début des années 2000. Sous différentes formes, ces mécanismes ont pu, certes, offrir à une bonne partie de jeunes Algériens l'occasion de réaliser leurs rêves et d'avoir une occupation. Cependant, même si le plein emploi dans toute économie peut paraître une utopie, toute la jeunesse algérienne aspire à avoir une occupation qui pourrait la mettre à l'écart de la débauche, de la harga et d'autres phénomènes qui enveniment la société. C'est légitime, assure-t-on, et même vital pour notre pays mais la lutte contre le chômage, il faut le reconnaître, n'est pas uniquement le devoir des pouvoirs publics. Il semblerait que l'Etat employeur soit revenu de loin, notamment avec la réalisation de diverses infrastructures à travers le territoire national, mais est-ce suffisant pour dire que la lutte contre le chômage est sur la bonne voie ? Le gouvernement va consacrer, encore pour l'année qui commence, 100 milliards de dinars à cet effet. Outre cette bagatelle conséquente, de nouveaux mécanismes ont été mis en place dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009. Certes, toute cette politique traduit une forte volonté émanant des autorités. Ces résultats, selon les chiffres disponibles, sont appréciables. On arrive à créer un peu plus de 600 000 emplois annuellement. Ce qui n'est pas rien pour les spécialistes. Pour rester dans le langage des chiffres, il y a lieu aussi de noter que la population occupée est passée de 6,2 millions en 2001 à 9,1 millions en 2008, soit une augmentation de l'ordre de 47% en moyenne par an. En revanche, si l'on se concentre sur les couches les plus touchées par le chômage, les jeunes viennent, malheureusement, en première position. Les chiffres de l'ONS indiquent que près de trois chômeurs sur quatre (75,0%) sont âgés de moins de 30 ans, et 87,8% ne dépassent pas 35 ans. Par ailleurs, 70% des demandeurs d'emploi sont aujourd'hui des primo-demandeurs et on enregistre chaque année une demande additionnelle estimée à 300 000 nouvelles demandes d'emploi. Il s'agit là d'un élément très sensible pour les pouvoirs publics en plus de l'absence d'un secteur privé solide qui pourrait absorber une bonne partie des chômeurs et la dérégulation perçue dans le marché de l'emploi. A présent, la tâche qui incombe aux autorités serait un peu plus compliquée. Il s'agira d'inciter le privé à créer des emplois et, par ricochet, augmenter la productivité et en même temps améliorer la qualité du travail car les emplois créés dans les différents secteurs par l'Etat sont «temporaires» de l'avis même des organismes étatiques. Enfin, à signaler que durant le premier semestre 2009, pas moins de 750 000 emplois ont été créés, soit en moyenne plus de 4 000 emplois par jour, selon les chiffres du gouvernement. Sur ce nombre de postes, 48 917 ont été créés par des entreprises publiques alors que la fonction publique a recruté 25 662 agents. Le secteur agricole a embauché 32 736 personnes. Les investissements financés par les banques hors agriculture et ANSEJ ont permis la création de 25 829 emplois. Les autres emplois créés sont précaires, avec notamment 132 713 recrutements dans le cadre du dispositif d'aide à l'insertion professionnelle, 14 075 emplois dans le cadre du dispositif «contrat pré-emploi», 83 778 dans le cadre du microcrédit et 17 150 emplois dans le cadre de la PME et de l'artisanat. Enfin, les chantiers à haut intensité de main-d'œuvre (HIMO) ont permis la création de 377 431 équivalents emplois permanents. Il reste à dire que même si le défi pour l'année en cours est colossal, le gouvernement veut miser gros sur ce dossier en annonçant la création de 3 millions d'emplois d'ici à 2014.