Photo : Sahel Par Karima Mokrani Les habitants d'Alger assistent, impuissants, à la dégradation de la place des Martyrs. Le site n'est plus le même depuis que les autorités du gouvernorat du Grand-Alger (GGA) ont lancé des travaux d'aménagement qui, au lieu de participer à son embellissement, lui ont enlevé ses atouts. Comme si la main destructrice des délinquants et autres personnes négligentes et ignorantes de l'histoire et de la culture ne suffisait pas pour le diminuer. La place perd de sa grandeur tous les jours, fragilisée par l'absence de protection. Elle, le témoin d'une grande partie de l'histoire de la ville, de la succession de plusieurs civilisations qui ont toutes laissé des quantités de richesses comme un legs à transmettre absolument aux générations futures. Le legs se consume, ne suscitant plus l'intérêt et l'admiration de ceux qui devaient le recevoir en héritage. La place des Martyrs est sale. Enlaidie par des aménagements inappropriés. Des voûtes et une sorte de bassin que d'aucuns considèrent comme encombrants, ne servent à rien si ce n'est à défigurer davantage un visage tourmenté. La dalle de sol suscite davantage d'indignation et de révolte chez les passants : «Ce n'est pas un endroit où installer ce type de carrelage. C'est du gaspillage !» Des ordures jonchent la plac et, avec elle, les escaliers qui mènent aux magasins souterrains restés fermés pour des raisons non déclarées officiellement. Les travaux entamés dans le cadre du «grand projet urbain» sont à l'arrêt et rien n'indique leur reprise prochaine par une quelconque partie. Tout le site semble être à l'abandon. Les Algérois ne s'y retrouvent pas. Ne le reconnaissent pas. Et ils n'apprécient guère ce qu'il est devenu. Beaucoup expriment des regrets devant une situation qui ne fait qu'empirer. En face, les autorités locales se murent dans le silence, ne trouvant que dire pour y remédier. Une chose est sûre, de nombreuses personnes parmi celles qui adoraient la place autrefois, détournent, aujourd'hui, leurs regards quand elles passent dans les environs. «Il n'y a plus rien à voir. C'est désolant !» lance une ancienne habitante. Autre source de colère, la clôture de tout un espace pour, dit-on, des recherches archéologiques. Des employés d'une entreprise installée sur les lieux parlent de la découverte de traces de l'ancienne ville. D'autres citent une basilique, de la mosaïque, des sarcophages d'un enfant et d'un bébé… et des ossements qui laissent penser à la présence d'un cimetière. Ces recherches devront permettre d'en apprendre plus sur l'histoire d'Alger et de toute l'Algérie. Des archéologues algériens et français s'emploient à mettre au jour ces secrets, encouragés par les gouvernements des deux pays. Combien de temps dureront ces recherches ? L'avenir nous le dira. En attendant, tous les chantiers sont à l'arrêt et la petite ou la grande place tombe en désuétude. L'anarchie des transports urbains et les désagréments causés par les marchands informels qui se disputent le peu d'espace qui reste ajoutent à son marasme.