Un mouvement de yo-yo règne sur les marchés pétroliers ces dernières semaines lors desquelles la fluctuation des cours prend de l'ampleur. Qu'on en juge : vendredi dernier, les prix du pétrole ont terminé en baisse à New York, à moins de 73 dollars le baril de référence, le net renforcement du dollar l'emportant sur les chiffres meilleurs qu'attendu de la croissance américaine. Pour être plus précis, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de «light sweet crude» pour livraison en mars a, en valeur, terminé à 72,89 dollars, en recul de 75 cents par rapport à la clôture de jeudi dernier. Une telle diminution n'a pas laissé indifférents les spécialistes des marchés. Après la publication d'une multitude de chiffres sur l'économie des Etats-Unis, les prix se sont érodés avec le «net raffermissement du dollar», a ainsi expliqué Jason Schenker, de Prestige Economics, repris par des agences de presse. Une demi-heure avant l'ouverture du Nymex, les chiffres de la croissance américaine avaient pourtant joué un rôle de déclic, parce que le tableau était flatteur : le PIB des Etats-Unis a augmenté de 5,7% au quatrième trimestre, soit bien plus que prévu, permettant de redresser nettement la barre à la fin d'une année marquée, tout de même, par une chute du PIB de 2,4%, du jamais-vu depuis 1946. Cela demeurerait un élément non négligeable, pour le moment du moins, dans la reprise des cours, un facteur haussier. En un mot, les bons chiffres de l'économie américaine devraient donner un coup de fouet au pétrole, le déloger de ce malaise baissier dans lequel il se trouvait, avait alors souligné Phil Flynn, cité par les médias. Le baril a toutefois entériné la baisse de dix dollars enregistrée depuis le 11 janvier. Le marché pétrolier a en fait souffert du net renforcement du dollar. Face à l'euro par exemple, la monnaie unique se déprécie et vaut désormais moins de 1,39 dollar, au plus bas depuis juillet 2008. Généralement, l'appréciation de la devise de négoce du pétrole tire son prix vers le bas. Les ventes pétrolières sont venues après une hausse brutale (jusqu'à 74,82 dollars) des cours. Les investisseurs ont saisi l'opportunité «d'engranger quelques bénéfices», a souligné Jason Schenker. Pourtant, c'est la reprise de l'économie américaine qui devait encourager le marché pétrolier à se reprendre. Que de pâles perspectives ? Possible. Aux dires de beaucoup, la demande des pays de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) n'est plus l'élément essentiel de la croissance de la demande de pétrole, et le bond du PIB américain en fin d'année pourrait ne pas suffire à faire augmenter les cours du pétrole. Dans une telle conjoncture, la courbe erratique des prix continue et le baril du brut risque de perdre pied. Jusqu'où peut ainsi descendre le brut, s'interroge d'ailleurs Harry Tchilinguirian, analyste matières premières pour BNP Paribas CIB ? En effet, les stocks hebdomadaires de pétrole brut américain annoncés la semaine dernière par l'Energy Information Agency (EIA) ont reculé de 3,9 millions de barils alors qu'ils étaient attendus en hausse de 1,6 million d'unités. Harry Tchilinguirian modère tout optimisme intempestif : selon lui, la baisse est partiellement attribuable à des retards de pétroliers dont 70 sont bloqués par le brouillard. En outre, le tableau est moins reluisant du côté des produits raffinés : les stocks d'essence ont crû de deux millions d'unités, et ceux de distillats (diesel et fuel domestique) de 0,4 million ; dans les deux cas, les prévisions étaient plus optimistes. Parmi, les distillats, les stocks de fuel de chauffage ont crû de0,3 million de barils suite au redoux des températures. BNP Paribas CIB n'est toujours pas emballée par le détail des chiffres, mesurant «l'appétit» des Etats-Unis en produits pétroliers : l'état de la demande américaine demeure très faible et se contracte par rapport à la même période l'an dernier, lors de laquelle leur économie touchait son bas de cycle. Pour la quatrième semaine de suite, les raffineries ont produit moins de neuf millions de barils/jour. Elles tournent à 78,5% de leurs capacités, soit 0,1 point de plus que la semaine précédente, mais un niveau historiquement bas pour une telle période. La demande de distillats a baissé de 8% sur un an. La demande totale américaine de produits pétroliers des quatre dernières semaines (18,8 millions de barils/jour) reste inférieure de 2% à son niveau de l'an dernier à pareille époque. Enfin, les indicateurs de fret ne donnent aucun signe tangible d'amélioration qui suggérerait des déplacements de marchandises et le restockage des entreprises, note BNP Paribas CIB. A court terme, les perspectives du diesel -principalement utilisé dans les transports- leur apparaissent faibles. Contrairement aux chiffres de l'économie américaine qui ne semblent pas avoir encouragé un redressement plus durable des marchés pétroliers, les économies chinoise et indienne devraient, elles, produire un déclic important à même de tirer vers le haut la demande pétrolière mondiale et du coup, faire évoluer les cours de l'or noir dans une fourchette raisonnable et pour les pays consommateurs et pour les pays exportateurs de pétrole appartenant à l'OPEP. Cette dernière s'accommode d'un baril variant entre 75 et 80 dollars. Réunie en décembre dernier à Lunda, en Angola, l'OPEP a jugé inapproprié de modifier ses quotas de production. Ils sont fixés officiellement à 24,84 millions de barils par jour. L'organisation pétrolière tiendra une conférence ministérielle ordinaire en mars prochain, à Vienne. Et il est peu probable qu'elle réaménage ses volumes de production. Y. S. Gazprom Neft en Guinée équatoriale La compagnie pétrolière russe Gazprom Neft et la Guinée équatoriale ont paraphé un accord de partage de production sur deux blocs off-shore de ce pays d'Afrique subsaharienne. C'est ce qu'a indiqué vendredi dernier la filiale du géant Gazprom, qui cherche à accroître sa production à l'étranger. L'accord prévoit que Gazprom Neft effectuera des études de faisabilité sur ces blocs avant de lancer les forages. Il a été paraphé par le groupe russe, des représentants de la compagnie pétrolière équato-guinéenne Gepetrol et le ministère des Mines de Guinée, selon un communiqué de Gazprom Neft, repris par des agences de presse. Il est prévu que le document officiel soit signé en mars-avril, y est-t-il ajouté. Les réserves estimées de ces deux blocs s'élèvent à 110 millions de tonnes de pétrole. La Guinée équatoriale est le troisième pays producteur de pétrole en Afrique subsaharienne (après le Nigeria et l'Angola). Jeudi dernier, la filiale de Gazprom, à la tête d'un consortium, a signé avec l'Irak un contrat d'exploitation sur 20 ans du gisement pétrolier de Badra, dans l'est du pays. R. E.