Les atteintes à l'économie nationale constituent un phénomène en hausse. Contrebande, transfert illégal de marchandises à travers les frontières, contrefaçon, commerce informel, détournements, infractions au change et aux déclarations douanières sont les quelques infractions d'une délinquance qui engendre des pertes importantes au Trésor public et des préjudices à l'économie nationale et la société. Ses auteurs se recrutent principalement auprès d'agents publics qui se rendent coupables aux yeux de la loi dans la conclusion de marchés publics en violation de la réglementation, l'exonération illégale de taxes et impôts, les détournements et dilapidation des deniers publics. Ces infractions, commises par des tiers, se traduisent par les fausses déclaration de valeur, les escroqueries, le blanchiment d'argent et ce, en dépit de l'arsenal juridique -dont le renforcement de la réglementation pour les infractions à caractère économique-, logistique, opérationnel et répressif réactualisé et des moyens de détection mis en place. La criminalité financière n'est pourtant pas un phénomène nouveau en Algérie. Elle a toujours fait l'objet d'une lutte par les services de sécurité, comme peuvent en témoigner des opérations spectaculaires ayant concerné des directeurs de banques publiques. Aux premières années de l'indépendance, ces opérations s'étaient soldées par l'application de la peine capitale aux mis en cause. Mais cette mission essentielle de protection de l'économie et de préservation des deniers publics s'en est trouvée compliquée avec l'ouverture de l'économie du pays et la multiplication des échanges avec l'extérieur et, de là, des opérateurs économiques. Les mutations économiques ont engendré de nouvelles pratiques exigeant des moyens de lutte adéquats, dont la mise à jour de la réglementation et un personnel qualifié formé aux nouvelles formes de crimes apparues avec les nouvelles technologies auxquelles ont recours les criminels pour échapper au contrôle et au châtiment de la justice. D'où la multitude d'affaires de corruption et de détournement des deniers publics révélées grâce à des enquêtes menées par des services de sécurité, dont les brigades financières et économiques, formées aux nouvelles techniques d'investigation. La lutte contre les crimes économiques et financiers a été confiée à l'ONRB, créé en 1992, qui a eu à démanteler de nombreux réseaux maffieux de trafic de documents, de voitures, de drogue, et à mettre hors d'état de nuire des auteurs de fuites de capitaux, de vols de propriétés publiques, d'abus de biens sociaux et de détournements des deniers publics. Mais cet office n'a pas fait long feu, puisqu'il a été dissous et ses éléments ont été réaffectés dans différentes sections de la PJ à travers plusieurs wilayas. L'éclatement de l'affaire Khalifa, qui a porté atteinte aux biens de l'Etat comme jamais auparavant, a été le tournant et le catalyseur pour le redéploiement sur de nouvelles bases de la lutte contre les crimes financiers. En effet, devant cette affaire, qui serait due «à une absence de contrôle et d'inspection», la police algérienne a entrepris, en 2007, de former des inspecteurs de police aux nouvelles techniques d'investigation contre les crimes financiers et économiques. Une formation devant permettre, comme l'avait déclaré à l'époque le directeur général de la Sûreté nationale (DGSN), Ali Tounsi, «d'élever le niveau des enquêteurs économiques en Algérie et de monter des brigades d'enquêtes économiques et financières qui œuvreront, en appoint avec la justice, afin de trancher plus vite et de prévenir contre toute sorte de décadence de la gestion économique et financière des biens de l'Etat». Par cette formation, avait-il ajouté, la justice aura désormais la possibilité de solliciter ces enquêteurs afin de mener des «investigations financières compliquées et des expertises dans les domaines économique et financier pour mener à bien les procédures judiciaires et contribuer d'une manière efficace à mettre fin à ce genre de crimes». De même qu'il est attendu des enquêteurs de rechercher et de détecter les irrégularités dans la passation des marchés publics ainsi que de lutter contre le blanchiment d'argent et la corruption. Par ailleurs, la Sûreté nationale (DGSN) s'est dotée de sections de lutte contre la contrefaçon, dont les atteintes aux droits d'auteur. Ces sections relèvent des brigades économiques et financières (BEF) des Sûretés de wilaya. Les efforts inlassables dans la lutte contre la criminalité économique et financière sont révélés à travers les activités des éléments des brigades économiques et financières relevant de la Sûreté nationale ou de la Gendarmerie nationale, dans les différentes wilayas du pays. Il s'agit du démantèlement de plusieurs réseaux spécialisés dans la falsification de faux billets, le trafic d'œuvres d'art, la falsification de billets d'argent, l'escroquerie, le vol d'objets d'art archéologiques, le faux et usage de faux et la contrebande de carburant. Des affaires autrement plus importantes au regard des sommes détournées et de la qualité des personnes impliquées ont ainsi été rendues publiques suite aux enquêtes effectuées par les mêmes services, lesquels ont dévoilé de nombreuses affaires de transfert d'argent et de déficits financiers dans les bureaux de poste. Les responsables ont été déférés devant la justice. En voici quelques exemples : détournement de près de 3 200 milliards de centimes à la BNA, en 2008 -l'enquête avait été menée par la brigade économique et financière (BEF) de la Sûreté de la wilaya d'Alger- ; affaire d'escroquerie dont a été victime Algérie Télécom de la part d'un sous-traitant qui avait réussi à détourner près de 20 milliards de centimes ; une autre impliquant des cadres d'Algérie Poste ; affaire BCIA, etc. A. R.