L'Iran est de nouveau sous le feu des critiques et des menaces en tout genre des Occidentaux. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a affirmé à Doha que les Etats-Unis préparaient avec leurs alliés occidentaux de nouvelles sanctions contre l'Iran. Pousser la République islamique à revenir sur ses «décisions provocatrices» dans le domaine nucléaire est le but officieux de la rencontre. S'exprimant devant le Forum mondial Islam - Etats-Unis réuni à Doha, Mme Clinton annonce avec fierté que la Russie avait exprimé son soutien à l'adoption de sanctions. Mieux, selon Mme Clinton, la Chine, le plus indomptable des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, commencerait à changer de position. «Le moment est venu pour la communauté internationale de prendre des décisions», a dit la secrétaire d'Etat américaine. Cette dernière a entamé à Doha une tournée dans le Golfe visant à solliciter (exiger ?) des pays de la région leur appui à un renforcement des sanctions contre l'Iran. Il faut dire que certaines capitales arabes de la région ne cachent plus, depuis peu, leur animosité envers Téhéran. L'Arabie saoudite, pour l'exemple, voit d'un mauvais œil le rôle de plus en plus important que prend l'Iran. L'éventualité d'un Iran nucléaire constitue quasiment une hantise pour les pays du Golfe. L'option militaire avec toute sa gravité et ses périls est de nouveau mise sur la table. La secrétaire d'Etat estime que l'Iran «ne laisse à la communauté internationale que le choix d'imposer un prix plus lourd pour ses mesures provocatrices». L'annonce par le président iranien du début par son pays de la production d'uranium enrichi à 20% n'a pas été appréciée par certaines capitales occidentales. Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, soupçonnent l'Iran de développer, sous le couvert d'un programme civil, des armes nucléaires. Téhéran a beau réfuter cette thèse, les soupçons perdurent. Une véritable volonté de mener une agression militaire contre l'Iran est perceptible depuis quelque temps. Les déclarations des officiels occidentaux et israéliens sont empreintes de menaces à peine perceptibles sur l'éventualité de la guerre. Fait nouveau, Moscou se dit favorable à des sanctions visant l'Iran. La nouvelle position constitue une véritable volte-face, les Russes ayant été un allié coutumier de l'Iran. Clinton a affirmé que la Russie «a exprimé en public et en privé son appui à des sanctions». Reste le cas de la Chine qui importe la plupart de son pétrole d'Iran. Elle «commence à réaliser qu'elle ne veut pas être isolée ou contribuer sans le vouloir à une instabilité qui porterait préjudice à ses intérêts économiques», a dit la responsable de la diplomatie américaine aux représentants arabes qui l'écoutaient. Face à la Chine, Washington compte utiliser la politique de la carotte et du bâton. Le bâton dans le dossier des armes de Taïwan et la carotte en «ordonnant» aux pays du Golfe de vendre du pétrole dévalué aux Chinois pour combler le manque iranien. Mais Pékin dans une position économique plutôt confortable pourrait fausser les calculs des Occidentaux. Les intérêts de la Chine en Iran ne sont pas seulement économiques, ils sont aussi stratégiques et géopolitiques. Le secrétaire d'Etat adjoint pour le Proche-Orient Jeffrey Feltman indique que les Américains comptaient demander l'aide des Saoudiens pour amener la Chine à accepter de nouvelles sanctions contre l'Iran. Washington veut donner un rôle à Riyad : fournir des garanties d'approvisionnement en hydrocarbures à la Chine dans le but de l'amener à changer de position dans le controversé dossier du nucléaire iranien. Une dernière chance à la négociation ? L'administration Obama serait ouverte à une proposition du Qatar sur des pourparlers directs américano-iraniens pour sortir de l'impasse actuelle et éviter le pire. Les dirigeants qataris auraient également demandé à Mme Clinton de faire pression sur l'Etat d'Israël pour permettre l'entrée dans la bande de Ghaza du matériel de construction afin de réparer les dégâts causés par les bombardements criminels des Israéliens de décembre 2008 à janvier 2009. Le Premier ministre qatari, cheikh Hamad ben Jassem Al Thani, a plaidé pour une poursuite du dialogue entre les Etats-Unis et l'Iran. «Cette région connaît déjà beaucoup de turbulences, et un problème avec l'Iran serait trop lourd à supporter.» Mais les Américains semblent pressés de passer à l'action dans le cas iranien. A Washington, le conseiller à la sécurité nationale du président Barack Obama, le général James Jones, a annoncé que les Etats-Unis travaillaient à présenter des sanctions contre l'Iran «ce mois-ci» à l'ONU. Clinton avait rencontré à Doha le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Depuis l'agression de la bande de Ghaza, Ankara s'est distingué par une attitude résolument anti-israélienne. Le rôle de médiateur de la Turquie entre Damas et Israël est en panne. Pour faire plaisir aux monarques arabes, la secrétaire d'Etat américaine a réitéré l'engagement de son pays à parvenir à une solution au conflit israélo-palestinien. Cependant, avertira-t-elle, il n'est pas possible d'imposer aux protagonistes un règlement. La déclaration est loin de surprendre. L'heure semble être aux préparatifs pour le nouveau désastre au Moyen-Orient. L'amiral Mike Mullen, chef d'état-major interarmes américain, se rend en Israël pour discuter de l'Iran. Le Premier ministre Netanyahou s'envole, quant à lui, pour Moscou où il doit rencontrer le président Medvedev. La situation dans la région mouvementée du Golfe ressemble étrangement à celle qui a précédé la guerre visant l'Irak en mars 2003. Là s'arrête la comparaison. En plus du désastre annoncé, une agression contre l'Iran aurait incontestablement une autre tournure. M. B.