Qualifiée de «moitié de l'homme», la femme va, à moyen terme, bouleverser les données concernant sa participation dans la vie économique, sociale et politique de l'Algérie. Avec leur force de pénétration, les Algériennes, très probablement et sans aucun coup de pouce politique, arracheront non pas la parité mais une quasi-hégémonie dans plusieurs domaines. Le constat peut d'ores et déjà être fait dans certains secteurs. Selon des statistiques de 2007, elles sont présentes à hauteur de 53,3% dans le secteur de l'enseignement et l'éducation, 53% dans le médical, 37% des magistrats et 35,3% dans la justice. Ces chiffres ont certainement du croître au cours de ces deux dernières années. Le secteur public effectue ainsi sa mue au féminin. Sans complexe. Fini le cloisonnement entre quatre murs. Les formules toutes faites des manuels scolaires du style : «Papa est au marché et maman dans la cuisine», deviennent, de plus en plus, désuets. La femme s'impose en intervenante active dans l'évolution économique et sociale du pays. Elle devient concurrente directe de son frère l'homme. Malgré le retard accumulé, entre autres à cause de certaines considérations culturelles, elle grignote doucement mais sûrement sur les parts de la population active. Sur près de 10 millions de personnes actives occupées, comptabilisées en octobre 2009, soit un taux d'occupation de plus de 26%, 15,3% sont des femmes. Le chiffre reste cependant bas, mais il faut savoir également que le taux de chômage chez la gent féminine est plus de deux fois plus élevé que chez les hommes, à savoir 18,1% contre 8,6%. Dégrippée, la femme algérienne ose investir des secteurs qui étaient réservés jadis à l'autre sexe. Dans les services de sécurité. De moins de mille femmes durant les années 1960, elles étaient quelque 9 000 à avoir intégré les rangs de la police (DGSN) en 2008, dont 459 officiers (terme qui n'existe pas au féminin), 825 inspectrices et 128 enquêteuses. Un tiers des juges sont des femmes (1 100 sur 3 300). Près de 30 députées, 5 au Conseil de la nation, une candidate à la présidence de la République… Loin de faire dans les annonces de foires, comme s'il s'agissait de singes savants ou d'oiseaux parleurs, on ne remet pas en cause ici les compétences des femmes, mais mettons plutôt en relief la lutte vraisemblable qu'elles ont dû mener contre la misogynie ambiante pour atteindre leurs objectifs. Elles ont défraîchi le terrain pour les générations futures. Et la très prochaine «hégémonie» se fera avec celles-ci. Il est de notoriété nationale, que depuis quelques années, les filles sont plus présentes et appliquées dans leur cursus scolaire. Elles sont beaucoup plus studieuses que la majorité des garçons. C'est une autre donnée sociale qui veut que ces derniers, pour des considérations également d'ordre social, écourtent souvent leurs études pour tenter leur chance sur le marché du travail ou… de la délinquance, c'est selon. La fille, généralement n'a ni les mêmes prérogatives ni les mêmes alternatives. Son seul salut, pour pouvoir franchir le seuil du domicile familial vers l'extérieur reste l'excuse des études. Entre le mariage arrangé et la possible émancipation professionnelle, le choix est généralement évident. De fil en aiguille, il n'est pas rare de voir qu'actuellement ce sont les filles qui prennent en charge sous leurs ailes toute la famille. D'ailleurs, l'un des nouveaux critères du choix de l'épouse, chez beaucoup de prétendants est le travail de la promise. Par ailleurs, il faut noter que beaucoup d'employeurs, particulièrement ceux du secteur privé, optent pour le recrutement de femmes. «Elles sont plus sérieuses et moins râleuses», arguent-ils généralement. Mais la réalité est autre. Ces termes peuvent être traduits par «plus dociles» et «moins coûteuses». De toutes les manières, au regard de l'implication crescendo de femmes dans la vie sociale et le secteur économique -création de nouvelles entreprises, dans la culture ou dans la politique- et le raz-de-marée féminin dans le secteur de l'éducation et de l'enseignement supérieur, dans quelques années, le principe de lutte pour garantir la parité n'aura plus aucun sens car elle s'imposera d'elle-même. D'autant que les femmes sont censées vivre plus longtemps que les hommes. L'espérance de vie à la naissance pour une femme est de 76,6 ans contre 74,9 pour l'homme. S. A.