La Casbah se meurt dans l'indifférence. Le cri de détresse a été (re)lancé hier par les membres de la Fondation Casbah. L'occasion était la célébration de la Journée de la Casbah placée cette année sous le signe : «la lutte contre l'oubli». La question a ainsi fait l'objet d'un débat au forum d'El Moudjahid. Le président d'honneur de la fondation, Ali Mebtouche, n'y est pas allé par quatre chemins pour exprimer sa colère sur ce qu'est devenue cette cité classée patrimoine mondial par l'Unesco. «On ne fait pas la fête quand il y a ruine. Il y a des priorités. On ne peut pas programmer un Festival panafricain quand la Casbah se meurt. Cette cité est dans une situation catastrophique», a-t-il souligné. Par dérision, M. Mebtouche dira que «les responsables ont eu, cette année, la décence de ne pas festoyer. On commence à comprendre». Très critique à l'égard des autorités et pessimiste sur l'avenir de la cité, M. Mebtouche estime que «malgré les efforts consentis, nous n'avons pas pu sauver la Casbah». Et de préciser qu'«il n'y a pas que la restauration matérielle. La restauration est d'abord morale». Le conférencier regrette le retard cumulé dans la réhabilitation du lieu. «Cela fait 20 années qu'on parle d'un plan de sauvegarde. Dans le concret, rien n'a été fait dans ce sens», fera-t-il remarquer. De telles critiques s'imposent, dira le conférencier, dans la mesure où l'assise juridique existe. Ce qui fait néanmoins défaut, c'est l'application des textes.Le président d'honneur de la Fondation Casbah est convaincu que la «responsabilité de la situation de cette cité incombe aux autorités». Une manière de dire que la fondation, créée en 1990, n'a aucun reproche à se faire. Le président de la fondation, Belkacem Babaci, a préféré, quant à lui, faire l'état des lieux de la cité et de ce qui a trait aux travaux de réhabilitation. «La Casbah a souffert d'une gestion amphigourique durant une vingtaine d'années, de 1978 à 1998, bien qu'un important organisme ait été créé en 1985, à savoir l'Office de gestion et de régulation des opérations de la Casbah d'Alger (OFIRAC). Il est appuyé par une entreprise algérienne de restauration (l'ERC)». M. Babaci n'a pas manqué l'occasion d'évoquer «les abus de nouveaux squatteurs, qui ont réoccupé un certain nombre de bâtisses de l'îlot Sidi Ramdane où une véritable maffia du “relogement” s'est installée. Des groupes démolissent les accès des bâtisses murées, installent une porte ou une serrure et vendent les clés en fonction du nombre de chambres à raison de 600 000 ou de 100 000 DA». Le même orateur dira que «d'anciens occupants ayant bénéficié de relogement dans le cadre de l'évacuation de Sidi Ramdane sont revenus réoccuper les lieux». M. Babaci s'est par ailleurs attaqué au ministère de la Culture qui «est en train de faire du business». Et de conclure : «Le ministère de la Culture doit prendre ses responsabilité puisque les textes d'application existent.» A. Y.