Le vieux débat sur la résorption de l'habitat précaire (RHP) renvient brutalement sur le devant de l'actualité. Les violentes émeutes, qui ont éclaté ces derniers jours dans plusieurs bidonvilles d'Alger, mettent à l'index les ratés et le laxisme de la politique publique en la matière. Depuis le début des années 2000, l'Etat avait effectivement engagé d'importants programmes de recasement dans le but avoué d'éradiquer définitivement les baraquements qui ceinturent pratiquement toutes les villes du pays. Toutes les circonscriptions administratives ont eu, de ce fait, des quotas de logements sociaux locatifs conséquents. En moyenne, chaque wilaya a bénéficié durant cette période de plus de 7 000 unités. Au lieu d'atténuer un tant soit peu le problème, cette approche a, au contraire, exacerbé le phénomène des constructions illicites. De nombreux citoyens ont ainsi délibérément choisi l'illégalité en érigeant des cabanes de fortune sur des terrains publics afin de faire valoir leur droit à un logement décent. Cette manière de faire s'est généralisée partout, au grand dam des citoyens qui prennent leur mal en patience en attendant que leur demande soit normalement prise en charge. Les chefs de daïra, qui procèdent aux attributions de logements sociaux, accordent en effet la priorité à ceux qui «subsistent» dans des gourbis. Dès lors, tout le monde s'est mis à bivouaquer à l'entrée des villes pour profiter de cette aubaine du RHP. On l'aura remarqué, à chaque fois qu'on démolit un bidonville, d'autres poussent dans les parages. Les spécialistes parlent d'un fléau en perpétuelle régénérescence. Aujourd'hui, les statistiques officielles estiment à plus de 557 000 le nombre de ces habitations problématiques en Algérie. Ce chiffre peut aisément se démultiplier si l'on vient à annoncer un quelconque programme de relogement en urgence. Un citoyen qui squatte ainsi une assiette de terrain devrait en principe s'expliquer d'abord sur son comportement. Une enquête minutieuse doit être déclenchée pour déterminer sa situation réelle et les motivations profondes de son attitude. Une sanction doit être prononcée à son encontre pour que de tels agissements ne fassent pas des émules. Faire autrement revient à encourager les gens à braver la loi et à prendre ce qui revient de droit à d'autres citoyens qui, eux, respectent les règles du jeu. Intervenant récemment sur ce sujet, le président de l'ordre des architectes a vivement regretté que des personnes, qui ont été relogées dans des logements neufs, soient retournées vivre dans leurs anciennes bicoques afin de bénéficier, une fois de plus, de cette mauvaise générosité des pouvoirs publics. M. Boudaoud a laissé entendre clairement que de faux nécessiteux abusent volontairement de ce procédé pour revendre ou louer les habitations qui leur sont gracieusement attribuées avec l'argent du contribuable. A-t-on pensé à enquêter sur le nombre de logements sociaux sous-loué à travers le pays ? Il est quand même paradoxal de voir de simples citoyens postuler sans succès à un logement social participatif (LSP), alors que d'autres, en faisant fi des lois, se permettent le luxe de revendre chèrement les leurs pour étaler à nouveau leur «fausse misère» afin d'abuser encore et encore la collectivité nationale. Chacun de nous connaît dans son entourage immédiat des fonctionnaires, des enseignants et de simples salariés qui s'endettent et bradent tous leurs biens pour en bénéficier avec la bonne intention de payer une bonne partie de leur appartement. Ce sont ces gens-là qu'il faudra encourager. Il est inconcevable d'abandonner ces braves citoyens, de les condamner à l'attente, en servant en premier les parasites, les profiteurs et les SDF professionnels. La vérité, c'est celle-là. Céder au chantage et à l'émeute revient à désespérer davantage les honnêtes gens qui épargnent depuis des années pour pouvoir un jour disposer d'un chez-soi. Tout le reste n'est que populisme. K. A.