Photo Riad Par A. Lemili Le président de la République, en visite à Constantine il y a quatre années, ne s'est certainement pas fait forcer la main par les responsables locaux en ordonnant à partir de la scène de la maison de jeunes Ahmed Saadi implantée dans l'une des méga cités populaires, que des logements soient accordés à trois champions du monde, dont la particularité était leur… handicap physique. Les bénéficiaires se trouvaient sur les lieux, au même titre que l'ensemble des jeunes qui, au vu de leur parcours exceptionnel dans la vie, sont parvenus à lui imprimer une trajectoire sur laquelle ils ont exercé leur influence et non pas inversement. Vraisemblablement, le geste du Président n'entrait pas dans le simple acte protocolaire de nature à brasser large au sein d'un potentiel électorat mais celui du responsable témoignant sa reconnaissance au nom de l'ensemble des Algériens à des citoyens qui en ne désarmant pas face à un coup du sort, ont apporté la preuve que tout est possible pour un être humain, pour peu qu'il soit volontaire et fasse preuve d'abnégation. Toutefois aurait-il fallu que ce soit le président de la République qui se souvienne qu'il existe une partie de la population nécessitant un autre regard que celui de la compassion, voire de la pitié pour que la société comprenne que la catégorie sociale évoquée est quand même, en sport, l'une des rares à n'avoir apporté que des satisfactions au pays, qu'elle le fait bon an mal an et qu'elle continue de le faire jusqu'à ce jour. Les champions du handisport, dont on ne se souvient d'ailleurs qu'occasionnellement, ne font qu'accomplir un devoir comme n'importe quel autre sportif. Sauf, tout de même, qu'ils mériteraient d'être placés sur un pied d'égalité. Or, les médias n'en parlent qu'occasionnellement aussi, les pouvoirs publics locaux ne les connaissent même pas, exception faite d'une situation particulière comme celle de la visite de Bouteflika à Constantine, la ligue spécialisée affiche un réel mépris envers eux sinon une totale ignorance de leurs besoins... sportifs s'entend. Paradoxalement, un autre sport, le football pour ne pas le nommer, fait fantasmer tout un pays, anime des colonnes de quotidiens nationaux d'informations générales et revues spécialisées, mobilise tous les ministères, les institutions législatives, des joueurs inconnus il y a quelques mois passent au statut d'idole, les populations oublient leurs soucis jusqu'à tomber littéralement dans l'amnésie, les chiffres les plus fous sont débités en public, en privé, pour dire qu'en cas de victoire ce ne sera plus une équipe nationale de football qu'aura le pays mais un aréopage de patrons dignes du CAC40. Les pères rêvent d'avoir un fils qui emprunterait la même voie, les mères d'avoir pour gendre un exemple des footballeurs de la sélection nationale. Pendant ce temps-là, les hommes du handisport continuent leur petit bonhomme de chemin, galèrent pour rejoindre le lieu d'entraînement, qui n'est même pas d'ailleurs aménagé pour la prise en charge des handicapés, montent dans des bus difficilement, retournent chez eux dans des conditions aléatoires mais glanent sans état d'âme des médailles, rapportent les plus grandes satisfactions à l'Algérie. C'est d'ailleurs l'essentiel pour eux d'abord qui tiennent à se lancer des défis personnels.