De nombreux jeunes Algériens ont fait le choix de bouder la télévision malgré la diversité des programmes proposés par les chaînes satellitaires. Des cinéphiles aux passionnés des documentaires sur l'histoire, sur la géographie et tout ce qui a trait à l'évolution de la planète, ils sont en fait nombreux à créer leur propre monde. Il suffit de voir le nombre impressionnant de vendeurs de compilations de films sur support numérique pour s'en rendre compte. La technologie informatique et l'Internet aidant, les jeunes se donnent à cœur joie de télécharger gratuitement et de graver ensuite tous ces films mis en ligne sur les sites de partage (appelés aussi peer to peer). Ils ont trouvé en cela le moyen de se faire de l'argent en commercialisant à la chaîne les films téléchargés à un prix ne dépassant pas les 100 dinars. La cherté des tickets d'accès au peu de salles de cinéma qui subsistent, le cryptage des chaînes thématiques satellitaires, notamment celles émettant dans la langue de Molière, ont donc orienté les jeunes en mal de loisirs et les mordus des films anciens vers ces marchands de DVD et de DVIX qui se sont installés à tous les coins de rue et dans presque chaque quartier des grandes villes algériennes. D'autres ont recours à la location de ces films chez les vidéothèques à 20 dinars les vingt-quatre heures. Les passionnés des séries policières américaines, qui ont envahi le petit écran cette dernière décennie, préfèrent voir la totalité des épisodes d'une saison en une seule nuit au lieu d'attendre leur diffusion sur les chaînes françaises non cryptées. Certains jeunes s'organisent entre eux, créant des mini-cinémas chez eux avec du matériel data show. D'autres le font en plein air en projetant des films téléchargés sur les murs blancs des façades de bâtiments. Le même constat est fait chez les amoureux du sport, des documentaires et des vieux films muets qui ne sont plus diffusés par la télévision. Une catégorie de jeunes préfère passer son temps libre à lire ou à se balader au lieu de rester enfermé, tous les sens mobilisés, devant la télévision qui diffuse de plus en plus des programmes abrutissant l'esprit. Si la télévision nous permet de rester constamment informés de ce qui se passe ici et ailleurs, certains la considèrent comme la pire invention de l'humanité. Car le petit écran est, en partie, à l'origine de la dislocation des liens sociaux et familiaux. L. M.