Photo : Riad De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad L'attente de la fin du bras de fer entre le ministère de l'Education nationale et les syndicaux autonomes risque de se prolonger au-delà de l'irrécupérable au plan de l'achèvement des programmes et de l'irréparable quant aux préjudices sur les rapports à venir entre les deux protagonistes alors que les élèves et leurs parents se retrouvent coincés à un peu plus d'un mois des examens décisifs de fin d'année. La colère et l'indignation sont les sentiments les plus partagés par les enseignants qui découvrent, surpris, des «pontions abusives» sur leurs salaires et autres anomalies au lendemain de la reprise des cours après des semaines de grèves perlées, et les élèves et leurs parents qui sont sérieusement perturbés par le cycle répétitif de cette grève. «C'est de la pure provocation de la part du ministre de l'Education nationale, on dirait qu'il y a des responsables qui ne veulent pas de la fin de notre mouvement de grève, de continuer à perturber la scolarité de nos élèves au niveau de la région de Kabylie», affirme un professeur d'enseignement secondaire, partisan du Conseil national autonome des personnels de l'enseignement secondaire et technique (CNAPEST) de la wilaya de Tizi Ouzou. Il trouve «provocateur» de faire subir aux enseignants, «déjà paupérisés», des ponctions «démesurées» au moment où ils s'attendaient au règlement des arriérés de salaires comme convenu avec la tutelle dans les déclarations ayant précédé la reprise des cours. «Les prélèvement sur nos salaires sont très importants, ceux-ci auraient dû être repartis sur plusieurs mois au lieu d'une ponction brusque de la totalité de nos créances, limitée à un mois ; j'ai rencontré devant le guichet de la poste un enseignant dont le salaire a été réduit à 6 000 dinars ! Alors imaginez sa réaction», soutient-il, rappelant la déclaration du CNAPEST de la wilaya de Tizi Ouzou qui a dénoncé le «refus de régularisation des arriérés financiers, les ponctions abusives sur les salaires et la fermeture du bureau du syndicat à la direction de l'éducation», dans un communiqué rendu public à l'issue du sit-in imposant de mercredi dernier devant le siège de la direction de l'éducation. Le même document appelle les enseignants à bouder les conférences pédagogiques et à boycotter les tâches administratives. Jusqu'à dimanche dernier, aucune réaction officielle n'est parvenue du côté des structures de parents d'élèves à l'échelle régionale, laissant les deux parties s'expliquer durement à l'approche des examens. Sur un ton qu'on pourrait qualifier d'administratif ou technique, le ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid, a démenti la baisse de la moyenne du passage à la fac au-dessous de10/20 ainsi que l'alternative d'une deuxième session du baccalauréat. Une façon d'insister sur la consistance du volume des unités pédagogiques dispensées dans les normes et la rigueur du calendrier des examens. Avec surtout une exagération : Benbouzid a estimé, récemment, à dix jours le retard dans l'avancée des cours, se basant sur l'avis de la commission de suivi des programmes pédagogiques au ministère de l'Education nationale, durée qui paraît en décalage avec le nombre de jours sans cours enregistrés depuis la rentrée scolaire à ce jour. Mais les choses évoluent autrement sur le terrain d'autant que le temps de la protestation est toujours d'actualité au niveau des établissements du secondaire. «Avant de trouver des solutions pour rattraper le retard cumulé depuis des mois, Benbouzid récidive et nous provoque par ces ponctions injustes qui arrivent en pleine réflexion sur un programme de rattrapage, c'est franchement la meilleure manière de nous briser et de briser notre élan de travail, on sent que Benbouzid ne veut pas régler les problèmes du secteur de l'éducation», analyse un syndicaliste. Mercredi dernier, lors d'un sit-in devant la direction de l'éducation, les enseignants, en réponse à l'appel du CNAPEST, avaient dénoncé «les ponctions importantes sur leurs salaires, le non règlement des arriérés de salaires comme promis par le ministère, la fermeture du bureau du syndicat au niveau de la DE de Tizi Ouzou, le refus de l'administration d'autoriser les syndicalistes à se réunir au lycée Stambouli de Tizi Ouzou ainsi que dans les établissements du secondaire pour les sections locales du CNAPEST». Les enseignants s'estiment «trahis» par leur tutelle : «Nous avons repris les cours pour ne pas gâcher totalement l'année scolaire aux élèves et après les promesses d'assainissement de la situation des enseignants faites par la tutelle à la veille de notre reprise mais comme vous le constatez, c'est tout le contraire qui s'est passé depuis», dénoncent-ils. Comme pour ne pas rester en marge de cette tension, deux autres syndicats, le SETE/UGTA et l'UNPEF, ont joint leur voix à celle des protestataires. Dans une déclaration, le syndicat SETE/UGTA décrit ce qu'il qualifie de «viles et basses manœuvres de la bureaucratie qui ne rate aucune occasion de singulariser la wilaya de Tizi Ouzou où, malgré les promesses et les engagements pris par la tutelle, les travailleurs n'ont pas perçu leurs rappels de salaires et ceux de la prime de rendement des mois de janvier et février». Celle de l'UNPEF est aussi directe : «Les responsables qui se sont succédé à la tête de la direction de l'éducation n'ont créé qu'amalgame, désordre et instabilité dans les carrières des travailleurs qui font constamment l'objet d'un risque de cessation et de conseil de discipline arbitraires, d'affectation hors mouvement», lit-on dans sa déclaration, qui souligne l'absence de volonté de régler les situations financières pendantes depuis le nouveau système de centralisation des traitements des travailleurs. La décentralisation de l'opération paiement des salaires, une meilleure gestion des ressources humaines et des finances, la mise à la disposition de la direction de l'éducation d'un fonctionnaire du Trésor public, l'allocation de crédits nécessaires à l'assainissement des situations financières pendantes et donner le pouvoir aux commissions paritaires de siéger pour la régularisation des situations administratives sont, entre autres, les revendications soulevées par le syndicat.