La compétition entrant dan le cadre de l'édition 2010 du Festival national du théâtre professionnel (FNTP) s'est poursuivie, au Théâtre nationale algérien (TNA), mercredi dernier, avec l'entrée en lice de Balaoui Soudouf (les fatalités du hasard) du Théâtre régional d'Annaba et jeudi dernier avec la représentation Fragments du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès.Un intense moment d'émotion a marqué le début de la représentation de Annaba, avec l'hommage rendu par le commissaire du festival M'hamed Ben Guettaf au regretté Tewfik Mimiche, subitement décédé récemment sur les planches du TRA en pleine représentation. Dans un geste symbolique, après la minute de silence en l'honneur du défunt, une médaille d'honneur à titre posthume pour Mimiche a été remise à Ali Braoui, directeur du TRA. En véritable professionnel, puisque le spectacle doit continuer malgré tout, la troupe du TRA a tenu à lui rendre hommage sur les planches en poursuivant la représentation Balaoui Soudouf adaptée et mise en scène par Abdel Hamid Gouri du roman la solitude dans les champs de coton, de Bernard-Marie Koltès. C'est l'histoire d'une femme, interprétée par Samya Tabouche, qui surgit d'un ascenseur, fuyant son appartement car elle étouffe sous le poids de ses sentiments et désirs refoulés. Après avoir erré sans but, elle se retrouve, par hasard dans une rue sordide sans âme qui vive. Dans sa détresse morale, elle fait la rencontre de deux hommes, interprétés par Abdelhak Benmarouf et Hamid Gouri. Cette femme deviendra un objet de marchandage immoral. A travers ce microcosme, la pièce tente de dénoncer les tabous et l'hypocrisie sociale, source de frustration aux effets dévastateurs. Les comédiens ont su incarner leur personnage avec réalisme, jouant sur plusieurs registres émotifs tout en maîtrisant l'espace scénique. A l'exemple de Samya Tabouche qui est aisément passée du rôle de la femme peureuse et introvertie à celui d'une véritable tigresse au caractère bien trempé. Par contre, la scénographie, malgré les efforts de Djamel Boukhari, a parfois desservi la pièce, à l'instar de l'ascenseur qui devait être un élément scénique clé de la pièce mais qui n'a pas rempli son rôle.Jeudi soir, c'était au tour du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès d'entrer en compétition avec la pièce Fragments mise en scène par Hacen Assous, directeur de ce théâtre régional. La pièce, inspirée de Nedjma de Kateb Yacine, est présentée en arabe classique. Fragments revient sur des moments clés du roman de Kateb, à travers des extraits de cette œuvre phare. Ainsi sur les planches du TNA a résonné le destin de la tribu des Keblouti et, par-delà, celui du peuple algérien qui a subi les affres du colonialisme français, dont l'horrible massacre du 8 mai 1945.Malheureusement, l'adaptation du texte n'était pas à la hauteur du défi relevé. Le texte était obscur et inaccessible même pour ceux qui ont lu Nedjma. De plus, Hacen Assous est allé à l'encontre de la conception de la tragédie théâtrale katébienne, en optant pour une démarche scénique proche du théâtre classique dont Kateb avait horreur. En tant que dramaturge, Kateb Yacine a toujours milité pour un théâtre accessible à la masse, instrumentalisant la langue populaire pour l'éveil des consciences et la lutte contre toute forme d'oppression. Ce qu'on ne perçoit pas dans Fragments.Toutefois, d'un point de vue purement esthétique, le jeu des comédiens est à saluer, à l'instar de Nawel Benaïssa dans le rôle de Marianne, de Khadidja Abdelmoula dans celui de Nedjma, de Dalila Nouar endossant celui de la maman, de Abdelkader Djeriou dans celui du Keblout. Notons aussi la talentueuse scénographie d'Abdelhalim Zaaboubi, qui a su refléter l'atmosphère katébienne avec peu d'éléments, transportables dans n'importe quel douar. Zaaboubi a su donner une âme à la pièce, ce qui la sauvera certainement de l'échec. Par ailleurs, dans le cadre du programme hors compétition du festival, La salle Hadj Omar a accueilli, jeudi dernier, la première édition de la rencontre poétique «La poésie invitée du théâtre», animée par Aloua Hadji. Cette rencontre a constitué un hommage à Djamel Amrani en présence des poètes Samira Negrouche Ramzi Nayli et Abdellah Alhamel. La poétesse Samira Negrouche a lu à l'assistance plusieurs extraits de poèmes, dont celui la Nuit de dedans du poète disparu et A la mémoire du père, texte qu'elle avait écrit en 2006 suite à la funeste disparition de celui qu'on surnomme le soleil de la poésie algérienne. S. A.