Tout compte fait, la pratique du putsch semble avoir encore de beaux jours devant elle sur ce continent africain où elle jouit des commodités de configurations socio-économiques et culturelles appétissantes pour les régimes militaires insatiables et incurablement inaptes à tout changement au profit de la démocratie. C'est du moins ce que laisse supposer le coup d'Etat aisément accompli hier en Mauritanie sous la houlette du chef de la garde présidentielle, après qu'il fut démis de ses fonctions en compagnie de hauts officiers militaires. Une Mauritanie dont la jeune et mouvementée histoire depuis son indépendance en 1960 puise justement l'une de ses particularités dans le triste record de coups d'Etat à son actif. Hier, c'était la quatrième opération du genre qui est venue ébranler le pays après les putschs de 1978, 1984 et 2005. Le coup d'Etat de trop qui risque de se convertir en coup de grâce ? Trop tôt sans doute pour en tirer les conclusions, d'autant qu'il intervient dans une conjoncture de tensions politiques internes et de crise qui couvait ces derniers temps en Mauritanie où le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi faisait l'objet de sévères critiques de la part d'un bon groupe de députés et de sénateurs qui lui reprochaient de bloquer le fonctionnement normal des institutions. Ces derniers avaient même annoncé leur démission collective du Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD), la formation présidentielle. Mais pareille accusation ou encore le limogeage du chef de la garde présidentielle ne sauraient à aucun moment justifier une nouvelle entreprise putschiste dans le pays qui, contrairement à ses trois devancières, a cette particularité plus dangereuse que jamais d'intervenir dans une période où le pays semblait avoir trouvé sa voie vers la démocratie. Un tout début de voie plutôt vers un processus démocratique après une période de transition qui avait abouti à la première élection présidentielle dans ce sens, le 11 mars 2007. Une date repère pour la Mauritanie qui, de la réputation de pays à putschs répétés et d'autocratie, passait alors au statut de référence et d'exemple à méditer par de nombreux pays arabes et africains, après avoir poussé les militaires à céder le pouvoir. Mais le processus si cher au peuple mauritanien n'aura finalement tenu que le temps court et réduit d'une année et demie avant d'être rattrapé par les vieux démons de l'acte putschiste. Et, quels que soient les raisons et les véritables motifs qui ont commandé le coup d'Etat d'hier, c'est manifestement la toute naissante démocratie en Mauritanie qui se trouve aujourd'hui être renversée. L. I.