Le Ghana est passé à deux doigts de l'Histoire lors de cette première Coupe du monde africaine. Ce n'est pas une surprise tant les Black Stars s'appuient sur des structures solides et stables. Ce n'est pas pour rien que le Ghana est devenu le troisième pays africain de l'histoire à atteindre les quarts de finale de la Coupe du monde. Explications. A quelques centimètres près, le Ghana aurait pu devenir la meilleure équipe africaine de toute l'histoire des Coupes du monde. Mieux que le Cameroun en 1990 et le Sénégal en 2002, quarts de finalistes malheureux, mieux que la Tunisie 1978 et l'Algérie 1982, perdants magnifiques. Mais la barre transversale de Fernando Muslera, le gardien uruguayen, en a décidé autrement : le Ghana ne verra pas les demi-finales. Tant pis pour l'Afrique et ces Black Stars qui ont affiché une sérénité et un esprit d'équipe rares. De quoi en faire la meilleure équipe africaine de cette Coupe du monde. Et de loin. Pourtant, sur le papier, le Cameroun de Samuel Eto'o et la Côte d'Ivoire de Didier Drogba possédaient des qualités intrinsèques suffisantes pour aller loin. Certes, les Ayew, Inkoom, Annan, Boateng, Gyan… ont du talent à revendre mais ils pèchent par leur manque d'expérience du très haut niveau, Surtout avec l'absence de Michael Essien. Ce qui n'a pas empêché les hommes de Milovan Rajevac d'atteindre les quarts de finale de la Coupe du monde, six mois après avoir échoué en finale de la Coupe d'Afrique des nations. Mieux organisé que l'Afrique du Sud, plus créatif que le Nigeria, plus puissant que l'Algérie, plus solidaire que le Cameroun, plus audacieux que la Côte d'Ivoire… Ce Ghana-là est en train de s'imposer comme la meilleure équipe africaine du moment, et cela pourrait durer tant qu'il possède des bases solides. Ainsi, la Fédération ghanéenne ne vire pas de bord au premier coup de vent, comme beaucoup de ses homologues africaines. Si le Nigeria a licencié Shaibu Amodu, qui avait pourtant qualifié les Super Eagles pour la Coupe du monde et terminé troisième de la CAN, pour aller chercher un Européen au pedigree plus prestigieux, la GFA et son président Kwesi Nyantakyi ont défendu contre les critiques le choix d'un illustre inconnu, le Serbe Milovan Rajevac, ancien adjoint de Bora Milutinovic, pour succéder à Claude Le Roy en 2008. Et elle l'a laissé travailler. Mieux, elle l'a soutenu quand il a exclu pour raisons disciplinaires la star Sulley Muntari de la CAN 2010. Le message est passé : c'est l'équipe qui prime et Muntari s'est assis sur le banc, prêt à remplacer André Ayew, suspendu contre l'Uruguay. Chose rare en Afrique : le Ghana mène une politique de formation cohérente qui porte ses fruits. Régulièrement titré chez les jeunes (champion du monde des moins de 17 ans en 1991 et 1995 et des moins de 20 ans en 2009), le Ghana a eu l'intelligence de préparer les meilleurs éléments des champions du monde des moins de 20 ans en 2009 en les intégrant à l'équipe de la CAN à l'image d'Adjei, Inkoom, Mensah, Ayew et Adiyiah, qui ont participé à l'aventure sud-africaine. Les clubs eux-mêmes sont au diapason, à l'instar du club des Liberty Professionnels créé par la légende Abedi Pelé et d'où sont issus, un tiers des Black Stars 2010 (Muntari, Derek Boateng, Asamoah Gyan…), auxquels il faut ajouter Essien, forfait. Ils sont en plein développement, comme en Algérie, la professionnalisation du championnat est en cours, grâce notamment à des sponsors privés et devrait permettre de maintenir le football ghanéen à un bon niveau, tout en conservant plus longtemps les meilleurs jeunes, plutôt que de les voir partir tenter leur chance en Europe à l'âge de 14 ans. Cette solution est d'ailleurs défendue par la FIFA comme la meilleure façon d'empêcher le pillage des adolescents doués pour le football. Les meilleurs finiront par partir, mais vers l'âge de 18 ou 20 ans, pas avant. Ils reviendront faire profiter les Black Stars de leurs progrès. Figures de proue du foot local, Ashanti Kotoko (deux Ligues des champions) et Hearts of Oak (une Ligue des champions) coexistent dans une saine émulation qui pousse le football local vers le haut. A priori, cela devrait durer un moment. Le vice-champion d'Afrique est un champion d'Afrique en puissance. N. M-A. * In afrik.foot