La filière pain est en pleine crise. Cela fait des années que les professionnels du secteur attirent l'attention des pouvoirs publics pour essayer de trouver des solutions à leurs problèmes qui risquent de mettre en péril l'avenir de toute la profession avec toutes les répercussions négatives sur le consommateur. Ce dernier, qui peine déjà à s'approvisionner tout l'été en ce produit nécessaire, risque de ne pas trouver disponible la baguette de pain pendant le mois de Ramadhan qui pointe.Depuis des années déjà, les boulangers essayent de sensibiliser les autorités concernées aux difficultés qu'ils vivent au quotidien et qui se répercutent sur le simple consommateur. En effet, l'une des résultantes des problèmes vécus dans ce secteur d'activité est la fermeture en cascade des boulangeries, et ce, à travers l'ensemble du territoire national. Selon les chiffres avancés par le président de l'Association nationale des commerçants et artisans boulangers, pas moins de 2 000 boulangers ont mis la clé sous le paillasson, ce qui représente 30% du nombre global en activité dans le pays. Beaucoup d'autres ont manifesté leur intention de baisser rideau, toujours selon cette association. Une multitude de difficultés au quotidien L'une des raisons d'une telle crise et de la cessation de cette activité est la cherté des intrants utilisés dans la fabrication du pain. La cherté du prix de l'électricité et la hausse des charges salariales des ouvriers employés dans les boulangeries sont une autre raison qui pousse les boulangers à arrêter leur activité. Des démarches ont été entreprises auprès des pouvoirs publics pour trouver des solutions car les coupures à répétition de courant électrique font subir des pertes énormes aux boulangers, une moyenne de 7 500 à 20 000 DA quotidiennement lorsque la panne dépasse une heure. Aucune réponse n'a été reçue par l'Association à la demande d'audience introduite auprès du ministère de l'Energie. Les boulangers souhaitent aussi être exonérés d'impôts qu'ils jugent excessifs, les empêchant d'évoluer dans leur profession. Un appel aux pouvoirs publics a été lancé pour revoir le système fiscal considéré comme un obstacle à la profession et à l'activité commerciale d'une manière générale. Les boulangers ne manquent pas de demander à l'Etat de subventionner les aliments entrant dans la production du pain, une façon de les aider à avancer au lieu de fermer boutique. Ils demandent aussi de diligenter une commission technique pour évaluer les coûts de revient du pain afin de proposer un nouveau prix de ce produit de large consommation qui tiendrait compte des charges onéreuses auxquelles font face les professionnels. Et d'appeler à l'application «d'un prix juste du pain, soit un prix qui subirait une hausse de près de 12% de la marge bénéficiaire des boulangers». Le président de l'Union nationale des boulangers affirme avoir proposé au ministère du Commerce la mise en place d'une commission d'expertise pour assister, sur place, les boulangers dans le processus de fabrication du pain, du début jusqu'à la fin, et dégager une marge bénéficiaire. Car l'arrêt de l'activité pour beaucoup essentiellement est dû à l'insuffisance de cette marge bénéficiaire. Et ce sont surtout les boulangers artisans qui ont le plus souffert, d'abord de la décennie noire, puis de la hausse des coûts des matières premières et de la répression des services de contrôle. De plus, au niveau d'Alger, la baguette est vendue à 10 DA dans de nombreuses boulangeries sans que cela dérange pour autant les services de contrôle, alors qu'à l'intérieur du pays, des sanctions sont infligées aux boulangers qui ne respectent pas le prix de 7,50 DA. Ces interminables sanctions qu'infligent les contrôleurs des Directions du commerce aux artisans boulangers sont jugées démesurées par ces derniers, d'autant que leur seule activité est la fabrication du pain, alors que les autres fabriquent aussi des gâteaux de tous genres, ce qui augmente leurs revenus. L'Algérie, qui comptait quelque 17 000 boulangeries en 2000, a vu ce chiffre baisser en décembre 2009 pour atteindre seulement 13 600 boulangeries. Professionnaliser le métier de boulanger Ceci étant, au-delà des problèmes signalés dans cette profession qui asphyxient ceux qui l'exercent, il n'en demeure pas moins que les activités de boulangerie ont besoin d'être professionnalisées.De l'avis même des gens du métier, l'anarchie qui règne dans cette activité se répercute sur la qualité du pain qui laisse souvent à désirer. Le manque de professionnalisme des boulangers est à l'origine de cette situation, puisque seuls 5% d'entre eux ont reçu une formation adaptée. Le reste a appris à exercer ce métier sur le terrain. La priorité doit être donnée à la formation si l'on veut se hisser aux standards internationaux en matière de confection du pain. Il est vrai qu'un concours national du pain est organisé régulièrement pour évaluer les capacités des boulangers et leur maîtrise du métier, il n'en demeure pas moins qu'il est nécessaire de mettre en place des écoles de formation pour les futures générations, de même que les précédentes qu'il convient de recycler. Beaucoup reste à faire dans ce domaine, de l'aveu même des responsables au niveau du ministère de la Formation professionnelle. Il existe, en effet, au niveau local des formations par apprentissage, un mode de formation qui ne peut être performant.Les pouvoirs publics se doivent de se pencher sérieusement sur cette problématique pour essayer de trouver des solutions définitives et éviter de sanctionner à chaque fois le simple citoyen, notamment avec le désir des boulangers d'augmenter le prix du pain. B. A.