Après un gel de huit ans, la Syrie et Israël ont annoncé hier avoir engagé des négociations indirectes de paix sous les auspices de la Turquie. L'annonce a été faite par Israël, suivie de peu par celle de la Syrie. A Ankara, le ministère des Affaires étrangères a confirmé cette médiation, affirmant que les deux pays avaient décidé de poursuivre les pourparlers «avec détermination et continuité pour parvenir à une paix globale». A Damas, un responsable du ministère des Affaires étrangères a confirmé ces pourparlers indirects sous le parrainage de la Turquie. Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, en visite à Manama, a affirmé de son côté que son pays avait «obtenu des engagements [d'Israël] pour un retrait du Golan jusqu'à la ligne du 4 juin 1967», lors des négociations indirectes. Les négociations de paix entre les deux pays, parrainées par Washington, avaient été interrompues en 2000 après avoir achoppé sur la question du plateau du Golan, annexé en 1967 par Israël et dont la Syrie réclame la restitution totale jusqu'aux rives du lac de Tibériade. L'annonce officielle sur ces négociations indirectes est survenue près de neuf mois après un raid aérien d'Israël, début septembre 2007, contre un site en Syrie qui abriterait des installations nucléaires, selon les Américains. Elle survient également après une visite en Israël du président américain Bush qui aurait donné son feu vert à ces discussions. L'existence d'une médiation de la Turquie entre Israël et la Syrie, dévoilée hier par les protagonistes, illustre la volonté d'Ankara de jouer un rôle accru dans le règlement des conflits au Proche-Orient. La Turquie a confirmé s'être posée en intermédiaire. L'intérêt de la Turquie pour la région n'est pas nouveau. Ankara propose depuis longtemps d'organiser une conférence régionale afin d'aplanir les divergences entre Israéliens et Palestiniens. L'arrivée au pouvoir en 2002 du Parti de la justice et du développement (AKP) a relancé cet intérêt pour la région. Le conseiller en chef du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, Ahmed Davutoglu, qui a rang d'ambassadeur, s'est à plusieurs reprises rendu dans les capitales syrienne, israélienne, palestinienne et arabes pour tâter le terrain et voir si les conditions d'une négociation étaient réunies. Cet académicien, qualifié de «néo-ottoman», reflète la volonté du gouvernement turc de s'engager plus activement au Proche-Orient, territoire appartenant autrefois à l'Empire ottoman. Ces dernières années, sans renoncer à ses relations privilégiées avec Israël, la Turquie a manifesté beaucoup plus d'intérêt pour la région. Au risque de déplaire à Washington, elle a tissé des liens nouveaux avec la Syrie, après l'expulsion de Damas du chef rebelle kurde Abdullah Öcalan, et l'Iran. Le président syrien Bachar El Assad a été reçu avec tous les honneurs à Ankara tandis que les Premiers ministres turc et iranien échangeaient des visites officielles. Un intérêt commun unit ces pays : faire échec aux visées autonomistes kurdes. Mais la Turquie entend également jouer pleinement le rôle que lui confèrent au Moyen-Orient son poids économique, la puissance de ses forces armées et son passé historique. Agences