Photo : Riad De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Même si le lien qu'on peut qualifier de filial à ce stade de la complémentarité ou de la complicité entre le commerce informel et l'absence de marchés réguliers est mis en évidence depuis des années par tous les organismes concernés par la lutte contre les fraudes fiscales et la petite communauté des commerçants encore honnêtes qui se conforme encore à la loi, les autorités reportent d'année en année la mise en œuvre des solutions préconisées dans leurs rapports et promises aux mécontents. Résultats de cette incroyable négligence caractérisant l'exécution des projets de tous les secteurs dans la région sous-développée de Kabylie : anarchie qui domine tous les domaines de l'espace public et privé, régression économique et sociale, exode, maux sociaux alors que la violence est là tel un épouvantail qu'on agite pour éloigner tout débat serein sur l'avenir de cette région disloquée mais qui continue malgré tout de résister à sa manière. Dans cette indescriptible anarchie qui rime sur le terrain avec les pratiques commerciales et la légalité, il est difficile pour le commerçant de s'approvisionner en denrées alimentaires de tous les jours dans des conditions de concurrence des prix et d'hygiène adéquates et pour le consommateur de faire la part des choses devant des étals alimentés au gré des échanges presque clandestins qui s'effectuent contre ses intérêts et a priori ceux de l'Etat. La qualité des fruits et légumes et les prix ne tiennent nullement compte des normes d'hygiène et du pouvoir d'achat de la population victime expiatoire des machinations occultes de mandataires et revendeurs véreux. Parfois, on ignore même l'origine des produits et articles commercialisés et ça se passe, tenez-vous bien, au chef-lieu de wilaya de Tizi Ouzou et dans pratiquement tous les espaces improvisés squattés par une espèce de «commerçants» qui ne soucient guère des conséquences de leurs méfaits sur la population et l'économie en général. La wilaya de Tizi Ouzou, où la densité des échanges commerciaux à l'intérieur et en direction des autres régions du pays atteint son paroxysme, surtout en ce qui concerne les fruits et légumes de saison, n'a jamais eu de marchés de gros ou de proximité capables d'accueillir les acteurs concernés par les transactions commerciales dans des conditions dignes de ce nom. Autrefois, le semblant de marché de gros a longtemps été domicilié au village de Tala Atmane, à une dizaine de kilomètres à l'est de Tizi Ouzou au milieu d'une superficie réservée, sur le papier, à accueillir la zone industrielle de la commune et… de multiples discothèques parfois gérées au noir et source de nuisances nocturnes et même d'insécurité pour les automobilistes, dont les commerçants qui s'y approvisionnent. Des années après les répétitives critiques adressées aux collectivités locales sur les incommodités et les faiblesses du site qui ne répondait pas, en plus des problèmes aléatoires d'insécurité, à l'essentiel des critères d'une telle activité d'envergure qui concerne une forte et diverse demande, son «transfert» a été décidé vers… une rue (impasse ?) désaffectée à la sortie ouest du chef-lieu de la commune de Tadmaït où serait prévu le (futur) marché de gros de la wilaya. Les conditions de travail y sont aussi déplorables qu'à Tala Atmane ou même en dessous. Pourquoi a-t-on attendu toutes ces années pour penser à réaliser un marché de gros dans une wilaya qui en a tant besoin depuis des décennies ? Pourquoi le projet n'a pas été lancé après la décision de le construire ? Quelles en sont les raisons ? Les réponses, quels qu'en soient les arguments ou prétextes avancés, ne convaincront personne tant les fuites en avant de l'administration locale sont devenues, légion en Kabylie quand il s'agit de ne rien faire pour la collectivité, laisser les choses en l'état, laisser pourrir la situation. Et puis, énormément de commerçants de fruits et légumes continuent toujours de s'approvisionner au marché de Tala Atmane dans des conditions pires que celles qui prévalaient avant d'évoquer sa possible fermeture définitive et d'y prévoir des projets industriels, selon des mandataires et des commerçants ambulants dont beaucoup n'ont jamais entendu parler de fisc ou d'impôt depuis le début de leur activité qu'ils trouvent «légale et conforme». Aussi, l'autre projet privé de réalisation d'un marché de gros de fruits et légumes par un investisseur le long de la mini-rocade sud n'est pas encore sorti de la première phase de réalisation. La wilaya de Tizi Ouzou attend toujours aussi le début du plan de réhabilitation de 14 marchés de fruits et légumes «dans le cadre d'un programme national», selon la Direction du commerce (DCP) de la wilaya de Tizi Ouzou. L. S. Etat des lieux L'Algérie ne dispose que de 42 marchés de gros opérationnels et 9 sont en projet. Sur ces 42 structures, 3 seulement peuvent être considérées comme des marchés de gros. Il s'agit de celles de Hattatba, de Mostaganem et de Constantine. Selon le département de la régulation auprès du ministère du Commerce, ces marchés demeurent insuffisants. Pour y remédier, le gouvernement a adopté le projet de réalisation de 50 infrastructures en Algérie scindées en trois types. Quatre sont des marchés de gros à vocation nationale. L'un sera installé dans la région d'Annaba, un deuxième dans les Hauts Plateaux, un troisième dans la Mitidja et un quatrième à El Kerma, près d'Oran. Il est prévu également 21 marchés de gros d'intérêt régional pour couvrir trois ou quatre wilayas. Aussi, 25 autres auront une dimension locale pour répondre aux besoins des détaillants et des petits producteurs et faire face à la demande des citoyens. Rappelons enfin que près de 977 marchés de détail sont recensés actuellement à travers les wilayas d'Algérie, alors que la moitié des communes du pays ne sont pas dotées de ce genre de marché. Il a été décidé, de ce fait, l'implantation dans ces communes et les cités à forte densité de populations sans infrastructures commerciales deux types de marché de détail : marchés couvert et de proximité pour résorber toutes les activités qui s'exercent dans le cadre informel.