De notre bureau à Tizi Ouzou Malik Boumati Dans moins d'un mois, les Algériens renoueront avec le mois sacré de Ramadhan avec beaucoup plus ses soucis que ces moments religieux ou sociaux qui faisaient de ce mois une période de ressourcement religieux et d'agréables visites familiales. Donc, les citoyens appréhendent toujours ce mois synonyme, depuis plusieurs années, de flambée des prix des produits alimentaires et d'actes terroristes. Du côté culturel, la population aura encore une fois droit à des galas, souvent de qualité médiocre, à quelques exceptions près, ainsi qu'à toutes sortes d'activités sans queue ni tête. Cette année encore, les Assemblées populaires communales vont poursuivre leur bricolage, quand elles le peuvent, dans l'animation culturelle ramadhanesque, leurs moyens étant toujours dérisoires, pour des missions beaucoup plus importantes que des séances de transe dansantes. Sur les 67 communes que compte la wilaya de Tizi Ouzou, plus de la moitié ne dispose même pas de budgets communaux capables d'assurer les salaires de leurs employés. C'est dire la pauvreté de nombreuses communes de la wilaya, tant l'activité économique est quasi inexistante et l'activité commerciale maltraitée. Alors attendre des APC un programme particulier d'activités culturelles durant le mois de ramadhan devient un vœu irréaliste pour beaucoup d'observateurs. Irréaliste aussi pour les premiers concernés, les élus locaux, qui peinent déjà suffisamment dans leurs missions au profit de leurs concitoyens pour des raisons évidentes de manque flagrant de moyens financiers et de prérogatives en termes d'action. Donc, ce sont d'autres priorités plus urgentes et plus vitales qui attirent l'attention des élus locaux et ce ne sont pas les dernières mesures fiscales en faveur des communes qui vont changer quelque chose pour leur majorité. Des mesures, certes, qui vont permettre aux différentes APC de Tizi Ouzou et des autres wilayas du pays de respirer un tant soit peu mais ce ne sera certainement pas au profit du secteur de la culture, considéré comme «un luxe» à sacrifier sans état d'âme en faveur de questions plus urgentes comme le social ou le désenclavement des villages. La manne financière induite par le relèvement du taux de la TVA attribué aux communes n'aura aucune conséquence directe, ni indirecte d'ailleurs, sur les activités que programmeraient les APC durant les soirées du mois de ramadhan de cette année. «Quand on voit la situation désastreuse de nos routes et chemins et la pauvreté qui règne en maîtresse parmi la population de notre commune, ce n'est pas de l'activité culturelle, malgré son importance, que les élus locaux vont s'occuper», dit sous le couvert de l'anonymat un élu de la commune d'At Oumalou, dans la daïra de Tizi Rached qui ne manquera pas de dire que sa commune est l'une des plus pauvres de la wilaya de Tizi Ouzou. Il rappellera également que, quand bien même les élus voudraient initier un programme d'activités, la commune ne dispose même pas d'infrastructures susceptibles d'abriter des activités culturelles. Il est vrai que la wilaya de Tizi Ouzou, qui dispose de plus de 5 000 kilomètres de routes dont une bonne partie en chemins communaux, a plutôt besoin d'un énorme budget pour la réhabilitation de sa voirie. Alors, les quelques dizaines (peut-être centaines) de millions de centimes que beaucoup d'APC auront grâce aux nouvelles mesures fiscales ne suffiront même pas à faire un kilomètre de bitume sur des routes devenues de véritables coupe-gorge, à cause des accidents tragiques dus, dans des cas, au mauvais état de certaines routes. En résumé, de nombreuses communes de la wilaya de Tizi Ouzou n'auront aucun programme culturel à l'occasion du mois de carême de cette année. Ce sont les communes les plus pauvres de la wilaya et les plus enclavées. Comme tous les ans d'ailleurs. Pour les communes moins pauvres, celles qui initient habituellement des programmes d'activités culturelles, il ne sera pas question de «détourner» le fruit des dernières mesures fiscales prises par le gouvernement au profit des APC vers «l'amusement». En somme, c'est la politique gouvernementale des années quatre-vingt-dix qui est reproduite au niveau local, quand les questions économiques et sécuritaires dominaient en budget tous les autres secteurs. Et le retard que les communes accusent dans tous les domaines ne laisse aucun choix aux élus locaux en matière d'affectation des budgets.