Photo Zoheir De notre envoyé spécial à Tifariti Ali Boukhlef Le Front Polisario veut faire entendre la voix de la raison et de la paix, malgré son statut de pays occupé. Après avoir rappelé, mardi dernier, l'attachement de son organisation à la paix et aux principes des Nations unies, le président de la RASD est passé, hier en fin de matinée dans la localité de Tifariti, à l'acte avec une opération de déminage de pas moins de 2 500 mines antipersonnel posées par le royaume du Maroc pour empêcher les combattants sahraouis de se déplacer librement. Ces engins de la mort, qui ont fait une autre victime l'année dernière, passe, ont été posés sur une distance de 2 400 km lors de l'occupation du Maroc. Cette opération se veut donc, selon les responsables du Sahara occidental, un signe de bonne volonté de leur part pour parvenir à la paix. Cette paix, qui ne vient toujours pas malgré un calme précaire, a été une fois de plus «entonnée» par le président Mohamed Abdelaziz dans un discours prononcé en fin de soirée de mardi dernier à l'occasion de la célébration du trente-cinquième anniversaire du déclenchement de la lutte armée, le 20 mai 1973, d'abord contre l'occupant espagnol, avant que le territoire, très vaste et désertique dans son immense étendue, ne soit envahi par le Maroc, en 1975. Une fois de plus, le chef de la RASD (République arabe sahraouie démocratique), qui tient son siège non loin de la ville algérienne de Tindouf, a appelé la communauté internationale à «protéger» le peuple sahraoui contre les «violences» marocaines. Il lance, en même temps, un défi au royaume alaouite pour prendre en compte «la réalité sahraouie». Malgré cela, Abdelaziz, qui affirme vouloir développer son armée, réitère son engagement à respecter la légalité internationale. Pendant ce temps, le Polisario a reçu directement des dizaines de messages de soutien et de sympathie venus de plusieurs pays du monde et des quatre continents. Les plus en vue sont, en plus, bien entendu, de l'Algérie et de l'Espagne, deux pays représentés par de fortes délégations, l'Afrique du Sud, l'Angola, le Venezuela et le Sénégal. Mais l'intervention la plus marquante a été celle d'un député italien issu de la Ligue du Nord, un parti d'extrême droite membre de la coalition gouvernementale de Silvio Berlusconi. Comme les autres parlementaires présents, le député de la formation de Gianfranco Fini dit vouloir intervenir auprès de ses collègues italiens et du Parlement européen, qui «ne font pas assez», pour plaider la cause sahraouie auprès des puissances occidentales. «Le Parlement européen doit avoir une position ferme et franche contre la politique colonialiste du Maroc», a notamment soutenu le député italien. D'autres intervenants ont abondé dans le même sens, apportant leur soutien à la cause sahraouie afin que vive «la solidarité africaine» pour reprendre l'expression d'un représentant d'un parti de l'opposition sénégalaise. Dans leur résolution finale, les participants, qui dénoncent la «répression marocaine», appellent l'Espagne «à s'acquitter de ses responsabilités morales, historiques et juridiques vis-à-vis de son ex-colonie, le Sahara occidental». Il est à rappeler qu'une place dans le camp de Tifariti porte désormais le nom de l'Emir Abdelkader. Dans la foulée, un accord de jumelage entre la ville de Mascara et la localité de Tifariti a été signé par un député de l'APN, issu de l'ancienne capitale de l'émir, et le maire de Tifariti. A. B. Incertitudes autour des négociations de Manhasset Une incertitude totale plane désormais sur le processus de négociations entamé à Manhasset, aux Etats-Unis, entre le Front Polisario et le Maroc. Les dernières déclarations de Peter Van Walsum selon lesquelles l'indépendance est «irréaliste» ont mis le feu aux poudres. Si les Sahraouis n'écartent pas la possibilité de revenir à la table des négociations, ils mettent cependant la barre très haut. Ils demandent d'abord le départ de l'envoyé spécial des Nations unies au Sahara occidental, Van Walsum, comme prélude à la reprise des pourparlers. M'hamed Khedad, un des négociateurs sahraouis, condamne «la position injuste et illégale» de Peter Van Walsum et affirme que toutes les options sont ouvertes. «Si les Nations unies maintiennent Van Walsum, nous prendrons une position en conséquence», a dit M. Khedad. «L'armée de la RASD, composée essentiellement de jeunes, se prépare à toutes les éventualités en cas de statu quo», ajoute-t-il.