C'était dans l'air, l'Etat a décidé de toiletter légèrement les mécanismes régissant l'investissement étranger en Algérie. L'idée est de s'attribuer la majorité dans les projets à réaliser en partenariat. Est-ce un retour à l'orthodoxie ? La mesure en question ne veut pas dire une «remise en cause» du code des investissements actuel, ou encore de l'option libérale, soulignent des spécialistes au fait de la chose économique. L'Etat y apporte ainsi des correctifs et n'accorde d'avantages qu'à ceux qui le méritent. Par le passé, une série de largesses était attribuée à des chefs d'entreprise qui se disaient investisseurs, à des participants assidus à la Foire internationale d'Alger (FIA). Quid de la réalité ? Le gros des opérateurs étrangers préfère le commercial à l'investissement. Et, la FIA constitue une belle occasion, une vitrine pour se faire de la publicité, se mettre en réseau, trouver des distributeurs, des représentants exclusifs. L'investissement, lui, peut attendre, à leurs yeux. C'est cette manière de faire qui semble avoir motivé la décision susévoquée. Il n'est pas normal que l'Algérie serve de comptoir commercial pendant que les autres pays, africains et maghrébins, pour ne citer que ces régions-là, captent les IDE. Le pays ne peut attendre éternellement d'hypothétiques investissements. Assis sur des recettes pétrolières jamais égalées, il peut s'en passer, aux dires de beaucoup. Cette réorganisation de la stratégie des investissements découle en fait du discours du président de la République devant les élus locaux. C'était vers la fin juillet dernier. Au cours de son allocution, le chef de l'Etat a déclaré : «On s'est trompé.» Le mot est lâché, sans équivoque. Les investissements étrangers dans l'économie nationale n'agréent pas au Président. Les séminaires en série sur le climat des affaires en Algérie ajoutés aux efforts que le pays a déployés en matière d'accès au foncier, aux titres de propriété, etc. ne semblent pas avoir payé. Ce qui a changé, et ce n'est pas à l'avantage du pays, c'est que le volume des capitaux transférés par des sociétés étrangères, opérant en Algérie en association avec des entreprises nationales, a exponentiellement augmenté. C'est l'un des éléments ayant concouru également à l'élaboration de la mesure susmentionnée. Maintenant que la décision a été prise, le processus des investissements va-t-il changer et évoluer dans le sens voulu par l'Etat ? Qu'adviendrait-il des entreprises à privatiser, du secteur public ? Sur le terrain, les politiques publiques continuent. L'investissement public reste important, dans les infrastructures comme dans des projets de moindre envergure. L'autoroute Est-Ouest ainsi que le métro et le tramway d'Alger en sont la preuve. L'on s'en souvient, l'Etat comptait sur des bailleurs de fonds pour financer le projet autoroutier. Il n'a rien vu venir. Aussi, il a décidé de le prendre en charge sur fonds publics. Il continue également à supporter la restructuration du secteur public, à réanimer des entreprises complètement disloquées. Non sans difficultés. La privatisation comme option pour impulser une dynamique au secteur public n'avance pas au rythme souhaité. Quelques entreprises, promises à la privatisation, ont été vendues. D'autres sont à l'arrêt. Et, une poignée végète. Flash-back sur un processus ponctué d'arrêts. Les opérations de privatisation ont débuté en 1994. C'était dans une période difficile, l'Algérie faisant face à une conjoncture sécuritaire chaotique et ne comptant dans son escarcelle que quatre milliards de dollars de recettes pétrolières. Dix ans après, le gouvernement fait ses comptes. Il réalise qu'il est loin du compte. Aussi, il relance le processus, en 2004, mettant sur le marché mille deux cent sociétés. Peu de pays en transition économique ont fait pareil choix et lancé pareil défi. Seulement, le gouvernement va vite déchanter, les prétendants repreneurs ne se bousculant pas au portillon. Des entreprises vouées à la privatisation et qui ne trouvent pas preneurs, c'est un paradoxe que les chargés des réformes du secteur public n'arrivent pas à contourner. Dans de telles conditions, l'Etat s'impose une alternative, celle de continuer à soutenir les entreprises publiques existantes et à investir dans de nouvelles, les PME en l'occurrence. C'est dans cette vision qu'a été entrepris le gel du découvert bancaire d'un ensemble de sociétés et qu'un programme de redressement financier est en cours de confection. Ce sera un plan salvateur ? Possible. Aujourd'hui, les rapports ente les entreprises et les banques sont tels que ces dernières refusent parfois de débloquer les salaires des employés de certaines entreprises en mal de trésorerie. Pour ce qui se rapporte à l'investissement dans les petites et moyennes entreprises, il est question de mettre en place un tissu industriel dense fait de petites entreprises comme on en trouve dans beaucoup de pays développés. La stratégie est certes optimale. Manquent les capitaux. Faut-il solliciter encore une fois l'Etat pourvoyeur d'argent ? Une réflexion a été mise en mouvement et il semble qu'elle ait été fructueuse. Elle a donné naissance à une nouvelle formule : le Fonds de soutien à l'investissement pour l'emploi (FSIE). C'est un fonds indépendant auquel a été confiée une mission de taille : mobiliser la «petite épargne». Il peut intéresser les petits porteurs, les salariés et les retraités. Ces catégories professionnelles auront la possibilité d'acheter des actions et de les faire fructifier sur le moyen terme (dix ans). Les souscriptions commenceront en octobre prochain. L'action est fixée à deux cents dinars, avec un taux de bonification de 10%, 50% de l'épargne collectée est placée dans le Trésor sous forme d'obligations et de bons de caisse rémunérés mais en dessous de 10%, les 50% restants seront investis dans la petite et moyenne entreprises. Ce nouvel instrument s'ajoute à d'autres mécanismes dont le Fonds de garantie des crédits des PMe/PMI (FGAR). Ses formes d'intervention sont jugées satisfaisantes, même s'il reste beaucoup à faire. Il doit faire connaître davantage son rôle et ses attributions. Y. S.