Photo : A. Lemili De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi La palette artistique et culturelle s'est largement étendue à Constantine ces dernières années. L'ouverture à l'universalité à la faveur des hautes technologies aura contribué à ce boom. Ainsi, la population s'est mise à y puiser pour nourrir ou apaiser l'esprit selon que la demande est didactique ou de détente. Sur papier tant de grilles de programmes sont concoctées, notamment par les acteurs du secteur. Néanmoins, la donne principale fait souvent défaut en diverses disciplines. Les jeunes boudent la majorité des programmes officiels pour aller fouiner ailleurs en quête de ce qu'ils veulent écouter, voir, lire… Bref, consommer selon leur goût.En matière de production cinématographique, les jeunes ne se privent pas de nouveautés en dépit de l'absence de salles de projection opérationnelles (problème maintes fois évoqué par la Tribune). Fort heureusement pour ces derniers, des supports DVD sont disponibles dans les commerces et à des prix défiant toute concurrence. Une nouveauté à 150 DA, qui dit mieux ? C'est pratiquement la bouffée d'oxygène pour la jeunesse constantinoise qui ne dispose pas d'assez d'espaces pour s'exprimer en art et culture, malgré l'existence d'édifices tels que les maisons de la culture Malek Haddad et Mohamed Laïd El Khalifa. «Je veux rêver ! On n'a pas d'autres envies lorsque l'on est crispé au quotidien par les aléas de la vie… C'est pourquoi l'échappatoire pour moi demeure des films d'aventures et de fiction. Jusque-là, je ne me plains pas. Les supports sont disponibles à bon marché dans les magasins ou auprès des revendeurs à même le sol. De jeunes chômeurs ont appris à télécharger des films qu'ils gravent sur DVD et vendent à bon prix», dira un jeune Constantinois. Musique et films constituent le premier loisir de la jeunesse locale. Par contre, certains nostalgiques du grand écran estiment que voir un film dans un ciné a un charme inégalable, même si des films DVD inondent le marché. S'agissant des activités théâtrales, les férus des planches se ruent comme à l'accoutumée vers le Théâtre régional de Constantine (TRC), la seule institution dédiée au 4ème art, qui tente d'instaurer une tradition ponctuée par des journées et notamment le Printemps théâtral destiné aux écoliers lors des vacances. Le TRC essaye aussi d'enrichir son activité avec l'institutionnalisation du théâtre maghrébin qui est la seule manifestation relevant des arts manquant aux programmes officiels à Constantine. En parallèle, le Centre culturel français apporte sa contribution en mettant à la disposition des jeunes talents la salle d'exposition pour y présenter leurs œuvres. L'idée serait incessamment reprise par la Direction de la culture qui entend dégager le hall de la maison de la culture Mohamed Laïd El Khalifa après l'avoir débarrassée des expositions de livres anarchiques pour la consacrer à la peinture et aux arts plastiques. En ce qui concerne la demande livresque, les lecteurs sont pour la majorité des étudiants qui ne lisent principalement que les manuels intéressant leur cursus. Ils investissent la bibliothèque centrale même si, souvent, on n'y trouve pas tous les ouvrages dont on a besoin. «Je pense qu'il y a un fossé entre la demande et la commande», nous dira un professeur de lettres du département de français. La lecture publique intéresse peu la jeunesse. Pourtant, des actions ont été menées pour susciter l'envie de lire. A Constantine, certains arrondissements urbains sont pourvus de salles de lecture outre la bibliothèque communale. Mais la tendance est beaucoup plus à la lecture de circonstance. Les visiteurs de ces lieux s'y rendent en groupes pour réviser leurs cours. Les plus mordus de lecture continuent, eux, de fouiner dans les rares librairies pour dénicher l'œuvre littéraire, le classique ou l'essai désirés. A Constantine, le champ culturel est, en fait, plus riche sur le papier que dans les faits. L'impact des arts demeure faible. Il y a un vrai problème de diffusion des arts, qu'il faudrait solutionner à travers une communication intelligible pour intéresser les jeunes, sans quoi le plateau artistique demeurera, pour sa grande partie, inexploité, et la culture reculerait davantage.