Le vent de la révolte continue de balayer si fort les régimes autocratiques et obscurantistes qui étouffent depuis toujours les peuples arabes. Après la Tunisie et l'Egypte, l'ouragan - qui gagne en puissance - souffle présentement sur la Libye, le Yémen, Bahreïn, le Soudan, le Maroc et tant d'autres pays. La démocratie, la transparence, la citoyenneté pleine et entière, l'égalité des chances et le respect des droits de l'homme figurent en tête des revendications rudement exprimées par une jeunesse décidée à en découdre avec les féodalismes et les obscurantismes qui maintiennent la région dans l'ignorance et le sous-développement depuis des siècles. La chute spectaculaire des régimes dictatoriaux de Ben Ali et Moubarak incite d'autres peuples à s'affranchir des autocraties et des théocraties qui les asservissent de longue date. Sentant la montée en puissance de la tempête, le royaume wahhabite d'Arabie saoudite, l'un des régimes les plus rétrogrades au monde, s'affole et se dit prêt à débourser des milliards de dollars pour «racheter» la survie des tyrannies ciblées. Quelques jours avant le triomphe de «Maïdan Et-Tahrir», les Al Saoud ont proposé 5 milliards de dollars d'aide annuelle à l'Egypte contre le maintien du système sanguinaire de Moubarak. Mais, c'est méconnaître toutes les souffrances et toutes les humiliations infligées au peuple égyptien durant les trente années de règne sans partage de Moubarak. Dans son ultime élan pour sauver «le soldat Hosni», l'Arabie saoudite avait qualifié le soulèvement juvénile d'«actes chaotiques» menés par des «ennemis de l'islam», visant à «diviser» le monde musulman. Ça nous rappelle, à nous Algériens, une époque, pas très lointaine, où les sbires d'Abassi Madani et d'Ali Benhadj, dopés aux pétrodollars saoudiens, décrétaient que la démocratie était kofr» [apostasie]. Oui, il y a une vingtaine d'années exactement, nos «frères saoudiens» avaient payé très cher pour saborder la démocratie naissante en Algérie. Ils avaient transféré beaucoup de «mallettes diplomatiques bourrées de billets verts» pour que des Algériens fanatisés égorgent d'autres Algériens dans le but clairement affiché d'y instaurer une théocratie moyenâgeuse. Aujourd'hui, il n'est plus possible de faire de même, car le feu de la colère est partout. Il est aux portes du royaume wahhabite, corrompu et totalement inféodé aux Américains et aux sionistes. L'heure du changement a sonné et aucun subterfuge religieux ne saurait retarder la marche de l'histoire. Les peuples arabes, longtemps assujettis, se mobilisent partout pour passer à la modernité. Ils réclament, ici et maintenant, la liberté d'expression et d'organisation, l'accès équitable à l'instruction et au savoir, le respect des libertés individuelles et collectives, l'égalité des chances, l'alternance au pouvoir, la transparence dans la gestion des deniers publics et une économie diversifiée au service de tous les citoyens. En gros, ils exigent la dignité. Aucune exégèse religieuse ne peut contester la légitimité et la pertinence de tous ces vœux, exprimés à l'unisson du golfe Persique à l'Atlantique. Ces voix contestataires symbolisent l'espoir et la vie. Le sinistre refrain des muftis saoudiens est inaudible dans cet océan de colère. Et, c'est beaucoup mieux ainsi. K. A.