Photo : Riad De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani Ce sont des manifestations à répétition qui sont enregistrées chaque semaine dans la wilaya de Annaba, manifestations qui éclatent la plupart du temps suite à une mauvaise gestion par l'administration locale des milliers de demandes d'emploi. Les personnels chargés de l'accueil, de l'orientation ou de l'enregistrement des dossiers ne sont pas - il faut le signaler - formés pour gérer ce flux important de jeunes chômeurs stimulés par les décisions du gouvernement quant à la prise en charge de leur situation. En effet, l'intervention maladroite, le comportement irrespectueux et parfois hostile de certains employés, l'incompréhension et l'absence de communication ont fait que les protestations se multiplient pour se transformer, suite à une banale altercation, en manifestations de rue qui tournent très vite à l'émeute. Des émeutes qui fort heureusement ne font pas de victimes, l'expérience des forces de l'ordre dans la maîtrise de ce type de situation étant le rempart contre une révolte généralisée dans les milieux jeunes. Ainsi, après les manifestations qui ont secoué la commune d'El Bouni, saccagée par les protestataires lundi dernier, le retour en force de ces mêmes manifestants, mardi dernier, a encore donné lieu à des affrontements entre forces de l'ordre et protestataires ayant réinvesti le siège de l'APC qui avait déjà subi le courroux de la foule, la veille. Ils étaient des centaines venues des localités voisines de Bouhamra, Sidi Salem, Bouzaaroura, Bidari, Sarouel et Oued Ennil, chacun voulant son contrat de travail. Bousculade, altercation, bagarre et autres comportements pour le moins répréhensibles se sont transformés en affrontements entre demandeurs d'emploi, puis la colère s'est déplacée pour désigner les employés et les responsables de la commune comme étant ceux à l'origine de cette situation. Les bousculades qui s'en sont suivies ont fait des blessés parmi les protestataires qui voulaient s'en prendre une deuxième fois aux équipements et au mobilier qui avait été remplacé suite à sa destruction par ces mêmes manifestants. Les agents de sécurité s'étaient interposés pour fermer les accès aux jeunes et les empêcher de rééditer le même mouvement que la veille. Appelée à la rescousse, la police antiémeute est encore une fois intervenue à coups de bombes lacrymogènes pour disperser, après des heures de tension et d'affrontements, les centaines de jeunes qui ne voulaient pas quitter les lieux. Cependant, le retour au calme attendu après cette intervention musclée des forces de l'ordre n'a pas eu lieu puisque les jeunes de la localité de Oued Ennil distante d'à peine 4 kilomètres du chef-lieu de la commune d'El Bouni se sont rassemblés pour bloquer la RN 44 reliant le chef-lieu de wilaya de Annaba à la daïra de Berrahal, une voie stratégique pour aller à Constantine, Skikda ou Alger. Des pneus brûlés, des troncs d'arbre, des barres de fer et autres objets cosmopolites avaient été dressés sur la route, empêchant toute circulation dans les deux sens. Les automobilistes de passage ont dû rebrousser chemin, d'autres se sont fait agresser pour être dépouillés de leurs biens. Certains ont emprunté des routes secondaires pour éviter les barrages mais ils sont tombés sur d'autres et là, isolés et loin de tout, ils ont subi le diktat de bandits qui les ont rackettés. Pendant des heures, la situation est restée telle quelle avant que les forces de l'ordre n'interviennent pour dégager la voie. A Bargouga, une petite agglomération de 5 000 âmes, située à quelques centaines de mètres du complexe sidérurgique d'El Hadjar, la population a investi la rue et bloqué la circulation ; la foule composée essentiellement de jeunes comptait ainsi protester contre le chômage qui touche plus de 60% de la population active.Les locaux abritant l'APC d'El Bouni étaient hier en quelque sorte en état de siège, la police antiémeute a pris position et déployé un peu partout un dispositif impressionnant pour dissuader toute tentative de renouer avec les protestations. Hier, les jeunes, qui avaient été informés la veille que les contrats de travail seraient remis au niveau du stade, s'étaient présentés sur les lieux mais il n'y avait personne. Tous sont retournés devant le siège de l'APC et une foule nombreuse s'est formée, attendant que les autorités prennent une décision les concernant. D'un côté, des policiers prêts à défendre le siège de l'APC, de l'autre, des centaines de jeunes en colère et la tension monte, monte… Les ingrédients d'une explosion sont là toujours présents et on craint le pire par la faute d'une administration défaillante qui use de pratiques que les milliers de jeunes ont combattues et combattent par émeutes interposées. «Tout ce que nous demandons, c'est un peu de respect, nous ne sommes pas venus tendre la main pour demander la charité, nous avons notre dignité, nous voulons travailler, c'est tout, et on se comporte avec nous comme si nous étions des rebuts de la société alors que nous en sommes les forces vives, nous en avons marre de ce type de comportements», nous déclare un jeune visiblement hors de lui. Il faudrait un coup de pied dans la fourmilière pour balayer tout ça et en finir une fois pour toutes avec ces comportements qui nuisent à l'Etat et aux gouvernants de ce pays.