Photo : Riad Par Salah Benreguia Née dans les années 60, la finance islamique représente aujourd'hui, à travers le monde, plus de 1 000 milliards de dollars d'actifs gérés. 37 institutions financières opèrent en Afrique pour une population musulmane de 412 millions d'habitants. Selon une étude de Moody's, le marché en Afrique est estimé à 235 milliards de dollars. De l'avis des spécialistes en la matière, ce nouveau type de la finance fait son petit chemin. Comment fonctionne-t-il ? Quelles sont les différences qui existent entre la finance islamique et la finance traditionnelle ? Dans les pays dits musulmans, à l'instar de l'Algérie, ce type de financement peut-il booster et contribuer au développement du secteur bancaire ? C'est, en somme, à ces questions que les experts et les spécialistes en la matière ont tenté de répondre lors d'une journée parlementaire sur les perspectives de la finance islamique en Algérie, organisée récemment à l'APN. Ces derniers, au cours de leurs interventions, ont fait savoir que ce nouveau mode de financement répond strictement aux cinq critères, à savoir l'interdiction de l'intérêt, pas d'incertitude, pas de financement de certains secteurs jugés illicites, le principe qui stipule que toute transaction doit être sous-tendue par un actif tangible et, enfin, celui du partage des profits et des pertes entre les participants à une transaction financière. «Donc, la finance islamique permet de répondre à ces deux besoins, sauf qu'elle est spécifique dans le sens où elle doit respecter les règles de la charia. En plus des principes classiques de financement (risques, profitabilité), dans la finance islamique on doit faire attention à ne pas faire du riba - ou l'intérêt - interdit en islam. Il n'y a pas d'activités illicites dans le financement et pas de spéculation et d'incertitude», nous a expliqué Younès Soualhi, un Algérien qui enseigne à l'Institut islamique de l'université de la Malaisie. Quels sont ces produits ? Dans le cas de notre pays, il existe le sukuk, la murabaha (achat-vente), les ijara (équivalent du leasing) et les musharaka (équivalent du capital risque). L'Algérie peut-elle devenir le hub de la finance islamique ? Cette question revient sur toutes les lèvres de spécialistes algériens, compte tenu de l'enjeu et des attentes et surtout du rush des Algériens dans le milieu bancaire national. Dans certains pays occidentaux, si les législateurs cherchent actuellement à créer les conditions réglementaires afin de permettre à leurs banques de capter les capitaux «halal», la législation algérienne a déjà autorisé ce genre d'opération depuis 1991, lors de l'agrément de la première banque privée spécialisée dans ce financement, à savoir El Baraka Bank. Mais pour les spécialistes en la matière, ce marché, qui s'est développé dans le pays depuis dix-huit ans, demeure, cependant, en phase de démarrage. Il ne représente que 1% du système financier national et près de 15% des banques privées. Le motif ? La loi sur la monnaie et le crédit autorise, certes, les opérations d'investissement et de commerce conformes aux préceptes de la loi islamique, mais ne les a pas clairement définies en tant que catégorie spécifique de financement. Ce manque de précisions serait à l'origine du timide développement de ce segment de la finance après deux décennies d'activité marquées par la présence de quatre opérateurs financiers seulement, dont trois n'ont qu'une année d'existence, qui offrent des produits financiers islamiques. Certains experts ont vivement suggéré d'introduire certaines règles pouvant faciliter l'application, ainsi que la réussite de ce type de financement en Algérie.