Photo : S. Zoheir Par Melissa Roumadi La décongestion des ports et l'accélération des procédures de traitement des marchandises sont actuellement au registre des priorités de l'administration douanière. Malgré le train de mesures adoptées et l'instauration du contrôle quotidien (7 jours sur 7), les délais de traitement restent trop lents. La seule alternative qui semble susceptible de réduire la pression sur les ports commerciaux est la réalisation de nouveaux ports secs. C'est dans ce sens justement que la Direction générale des Douanes algériennes (DGD) vient de rendre publique une décision relative aux ports secs. Daté du 27 mars dernier, le texte en question a pour objet de fixer les modalités de gestion des ports secs et les charges de l'exploitant en matière de fourniture, d'entretien et de réparation des installations nécessaires à l'exécution du service, et les conditions dans lesquelles s'exerce le contrôle douanier. L'administration des douanes définit le port sec comme étant «un dépôt temporaire extra-portuaire, considéré comme un prolongement naturel des ports maritimes, lequel ne peut être rattaché qu'à un seul port». Et c'est après accord préalable du directeur général des douanes que le port sec peut être créé par l'autorité portuaire ou les consignataires de cargaisons. Cependant, la DGD insiste sur le fait que «le port sec n'est ouvert qu'aux marchandises conteneurisées importées, destinées à être exportées ou réexportées, dans les conditions que l'exploitant négocie dans un cadre conventionnel». Ce qui peut laisser conclure que les nouvelles infrastructures pourraient favoriser le recours aux régimes douaniers sous-exploités actuellement. Il s'agit notamment du régime de l'entrepôt grâce auquel les marchandises importées sont stockées sous contrôle de la douane, ainsi que celui de l'admission temporaire pour transformation. Ce dernier permet d'importer des intrants pour les transformer, les réparer, les monter ou les incorporer à d'autres fabrications, permettant ainsi aux entreprises nationales d'être compétitives sur les marchés étrangers. Fermer la porte aux tentatives de fraude Il n'en demeure pas moins que le texte de la DGD met en place un certain nombre de préalables à la mise en place d'un port sec auxquels les structures existantes devront se conformer dans un délai de six mois. Des conditions qui devraient permettre un suivi des marchandises importées par l'administration douanière et fermer la porte aux tentatives de fraude. D'où la soumission auprès du chef d'inspection divisionnaire des douanes territorialement compétent d'un dossier devant assurer la traçabilité de l'exploitant et garantir la conformité des espaces d'entreposage à toutes les normes phytosanitaires et de sécurité nécessaires au stockage de ce type de marchandises. Le port sec devra également disposer d'un certain nombre de moyens susceptibles de faciliter les opérations commerciales et le contrôle douanier tels que le scanner, l'équipement de pesage et le système de télésurveillance. Il devra également être doté en équipements informatique et de transmission et d'une connexion au Système d'information et de gestion automatisée des douanes (Sigad). L'agrément d'un port sec est aussi soumis à la souscription d'une soumission générale cautionnée ou garantie, fixée à 5 millions de dinars pour la première année de mise en exploitation du port sec. «Pour les années consécutives d'exploitation, le montant en question doit être calculé sur la base de 2% des droits et taxes perçus durant l'année précédente», précise le texte. Toutefois, si le contrat de location n'est pas renouvelé dans un délai de trois mois, la fermeture du port sera prononcée. Il en est de même en cas d'absence d'activité durant une année ou en cas de manquement de l'exploitant à ses obligations vis-à-vis de l'administration des douanes. Autre contrainte imposée pour les exploitants, «l'acheminement des marchandises s'effectue directement et sous palan et ne peut, en aucun cas, excéder le délai de 24 heures à compter du débarquement effectif des marchandises.» Un port sec pour chaque port commercial Il est utile de rappeler que la société de gestion des participations des ports (SGP-Sogeports) envisage la réalisation, au cours de cette année, de plusieurs ports secs relevant de l'ensemble des ports commerciaux. Il s'agit, en fait, de remédier à la congestion des ports commerciaux, de faire face à l'accroissement du flux commercial et surtout de réduire le séjour en rade au niveau des ports et le paiement des surestaries. A titre d'exemple, le coût d'un séjour en rade d'un navire de moins de 150 conteneurs est de 7 000 dollars par jour, ce qui est pénalisant pour l'opérateur et pour l'économie. Ainsi, les nouvelles infrastructures seront destinées aux ports d'Alger, d'Annaba, d'Arzew (Oran), de Béjaïa, de Djendjen (Jijel), de Ghazaouet (Tlemcen), de Mostaganem, d'Oran, de Skikda et de Ténès (Chlef). Les experts préconisent de déplacer vers l'intérieur du pays ces espaces d'entreposage. Un responsable de la filiale du groupe public de transport maritime Cnan suggère la création de magasins de stockage pour désengorger les ports algériens dans «les régions des Hauts-Plateaux». Or, ce genre de schéma nécessite le renforcement des liaisons routières et ferroviaires et la création de plates-formes logistiques multimodales. La région des Hauts-Plateaux pourrait recevoir ces structures en cas de désenclavement réel permettant d'attirer des entreprises et des PME dans un pôle d'activité intégré. Le cas du port de Djendjen et de la zone industrielle de Bellara, longtemps laissés en jachère, est plus qu'édifiant pour l'illustrer. C'est pourquoi certains opérateurs plaident plutôt pour la création de ports en eaux profondes avec zones industrielles intégrées afin d'enrayer le phénomène de l'engorgement et favoriser des pôles de performance industriels.