Photo : Riad Par Abdelkrim Ghezali Le verrouillage politique et médiatique ayant caractérisé les années quatre-vingt-dix et deux mille semble avoir eu un effet anesthésiant sur la classe politique dont le ronronnement est chronique. A l'exception du FFS qui tente d'animer des soirées de débats pendant ce Ramadhan et du PT qui occupe la scène médiatique à travers ses activités organiques, le reste des partis semble hiberner en plein période caniculaire. Pourtant, la période estivale s'apprête bien à une offensive politique pour occuper le terrain, aller à la rencontre des citoyens, engager des débats de fond sur la conjoncture nationale et internationale, aborder les problèmes sociaux, économiques et culturels qui préoccupent les citoyens, dans un contexte mondial de mutation lente mais certaine provoquée par les révoltes arabes et ce vent de liberté et d'émancipation sociale qui souffle sur les pays de la région arabe.En Algérie, des partis ont tenté d'initier des dynamiques de changement à travers des appels à manifester dans les rues, en vain. Une question fondamentale se pose et s'impose à l'ensemble de la classe politique : pourquoi les Algériens n'ont pas bougé à l'instar de ce qui s'est passé en Tunisie et en Egypte en particulier ? Les Algériens sont-ils réfractaires au changement ? Sont-ils satisfaits du régime actuel ? Autant d'interrogations qui devraient susciter des débats au sein de la société à travers des partis qui semblent être timorés et déconnectés de la réalité sociale. Beaucoup d'observateurs ont disserté sur l'attitude des Algériens face à ce qui se passe ailleurs. L'ensemble des avis et hypothèses convergent sur l'idée-clé de la lassitude des Algériens de la violence.Pourtant, les Algériens veulent un changement profond qui devra mettre le pays sur le cap de la démocratie, du développement et du progrès. Mais ce qui a été négligé dans les différentes analyses, c'est l'attitude des Algériens vis-à-vis de l'élite politique, de l'intelligentsia et des leaders de la société civile. Manifestement, la société algérienne ne dispose pas d'une avant-garde politique, intellectuelle et sociale qui servirait de catalyseur, de sherpa et de locomotive à une société qui aspire à une mutation pacifique, stable et viable. La preuve de ce décalage entre la société, notamment ses secteurs vifs et actifs, et l'élite putative est à vérifier dans toutes ces manifestations sociales qui se sont exprimées sans encadrement politique. Cette tendance de rupture entre la société et son élite supposée s'est confirmée lors des dernières législatives qui ont enregistré un taux d'abstention record puisque seulement 35% des électeurs ont voté.Pourtant, cette rupture n'est pas définitive si la classe politique se remet en cause et essaye de mieux comprendre la société et formule une alternative conforme aux aspirations sociales et s'adopter un comportement et une praxis politiques conformes aux discours qu'elle développe. Jusque-là, les déchirements qu'ont connus les partis ne sont pas motivés par des divergences politiques et programmatiques, ce qui aurait été à leur honneur et bénéfique pour le débat politique, mais ils sont dus essentiellement à des luttes d'appareils, d'individus pour le leadership et les privilèges que cette position octroie. Ces antagonismes abortifs et non productifs ont discrédité la majorité des partis, notamment ceux qui avaient une base sociale conséquente devant leur permettre de peser sur la scène politique et institutionnelle. Quant à l'argument qui consiste à présenter le pouvoir comme seul responsable de la situation des partis notamment de l'opposition, il est aussi naïf qu'incongru dans la mesure où c'est dans la nature de tout pouvoir de vouloir contrôler l'opposition et la canaliser dans le sens qui ne remette pas en cause son assise sociale, institutionnelle et politique.