Censé être une priorité nationale, comme décidé par le président de la République lors de l'audition d'Ould Abbès, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, la lutte contre le cancer risque d'être compromise en raison des différents dysfonctionnements que connaissent les différents services de radiothérapie à travers le territoire national. Hormis ceux de Blida et Ouargla, la capacité de prise en charge des patients des autres régions du pays relève quasiment de l'impossible. «C'est une triste réalité. Je connais des médecins en radiothérapie qui pleurent tous les jours lorsqu'ils reçoivent des appels sur le téléphone portable annonçant le décès de l'un de leurs patients, lesquels attendaient un traitement qui n'arrivait pas», a déclaré hier le Pr Kamel Bouzid sur les ondes de la Chaîne III comme pour illustrer la situation, selon lui, calamiteuse dans laquelle vivent les services de radiothérapie en raison de l'arrêt des simulateurs. Un arrêt justifié, selon l'hôte de la radio, qui cite les responsables administratifs, par la maintenance. «Je peux vous dire que le service de radiothérapie est dans une situation calamiteuse. Et cela ne date pas d'hier, mais de plusieurs mois pour ne pas dire plusieurs années», a affirmé encore le chef de service d'oncologie au centre Pierre et Marie curie de l'hôpital Mustapha. Le Pr Bouzid a dénoncé l'arrêt des centrages pour les nouveaux malades et les longs délais pour les rendez-vous de radiothérapie. «Les rendez-vous sont fixés au mois de juin 2012. On se demande dans ce cas si un traitement donné six mois après l'opération de chirurgie est indiqué. Cela est inacceptable d'un point de vue cancérologique et médical.» «C'est une situation que nous avons dénoncée en tant que spécialistes. Elle est due au défaut des équipements, des femmes et des hommes pour les faire fonctionner et les entretenir. Le problème soulevé aux autorités, il a été pris en compte puisque aussi bien le ministre de la Santé que le chef de l'Etat ont engagé un plan d'acquisition d'équipements (55 accélérateurs et la construction de nouveaux centres). Sauf que ce ne sera opérationnel qu'en 2014. Il ne sera comblé qu'en 2014, l'annonce faite de 55 accélérateurs et la construction de centres. Mais entretemps des milliers de patients n'auront pas leur traitement de radiothérapie dans les délais raisonnables.» Et le Pr Kamel Bouzid d'ajouter : «La radiothérapie est l'une des armes thérapeutiques du cancer qui n'est malheureusement pas accessibles aux Algériens. Cela, contrairement aux directives du président de la République qui a fait de la lutte contre le cancer une priorité nationale. Sur 44 000 nouveaux cas de cancer enregistrés chaque année en Algérie, 28 000 nécessitent un traitement par radiothérapie. Sur ces 28 000, seuls 8 000 malades sont traités par radiothérapie, faute de moyens. 20 000 malades ne sont pas traités.» Les capacités nationales en radiothérapie permettent le traitement de 8 000 cancéreux par an seulement. Comment parer à ces problèmes ? Le chef de service d'oncologie n'a pas épargné dans sa réponse le ministère du Travail dont il dit que la responsabilité est entière dans la prise en charge des malades chroniques. «Le ministère du Travail se défend en disant que cela ne le concernait pas. Nous avons demandé depuis 10 ans, lorsque le problème est intervenu, à ce que les cancéreux soient transférés à l'étranger, pas forcément en France. Nous avons essuyé un rejet. Or, il faut le faire, ne serait-ce que pour une période transitoire, le temps que le plan anticancer soit mis en place». Même Ould Abbès n'a pas échappé aux critiques de cet éminent professeur. Abordant la pénurie de médicaments pour les cancéreux, notamment les réactifs pour la chimiothérapie, le Pr Bouzid a indiqué qu'il s'agissait de pénuries cycliques et elles ne datent pas d'aujourd'hui. Pour l'invité de la radio, le diagnostic a été établi, le ministère de la Santé a été alerté à plusieurs reprises. «L'Etat a mis les moyens qu'il faut en termes d'argent.» Les prévisions des souscripteurs ne sont pas respectées, dira encore le chef de service d'oncologie. F. A.