Photo : Sahel Par Faouzia Ababsa Absent de l'activité parlementaire pendant deux législatures, le FFS se trouve, aujourd'hui, confronté à un dilemme qu'il compte lever avec la participation de l'ensemble de ses militants. C'est dire que le parti dirigé par Hocine Aït Ahmed juge que la situation politique actuelle diffère de celle des dix dernières années. Il estime qu'aujourd'hui, il ne s'agit plus «de s'opposer au régime pour faire du bien à la société et au pays ! Il ne suffit plus de dire non pour être sur le chemin de la fidélité à nos idéaux démocratiques et patriotiques», lit-on en préambule du document soumis à débat à la base militante. Il faut le faire «en toute connaissance des tenants et aboutissants de chacune de nos positions, de chacun de nos gestes». Le Front des forces socialistes se trouve donc devant deux hypothèses : soit prendre part aux prochaines législatives et en expliquer les raisons, soit poursuivre dans la logique du boycott en avançant les arguments politiques qui auront présidé à cette prise de décision. En leur soumettant un document dans lequel les deux hypothèses s'affrontent. «(…) Nous allons devoir défendre un point de vue et son contraire dans une démarche constructive. Il s'agit d'évaluer chacune des hypothèses à partir de la situation actuelle, du bilan des participations passées et des boycotts antérieurs (…)», lit-on encore dans le préambule du document soumis à débat. Décortiquant le contexte dans lequel vont intervenir les prochaines législatives, le FFS donne pour exemple la révolution tunisienne qui a abouti à la chute de Ben Ali. Un exemple que les autorités algériennes, selon le plus vieux parti de l'opposition, sont contraintes de prendre en considération. Pour les rédacteurs du document, même s'il n'avait avait pas cette révolution, les dirigeants algériens auraient quand même organisé les législatives mais en continuant dans la fraude massive. «(…)Ces élections n'auraient constitué qu'une formalité banale pour le pouvoir algérien. Une opération technique ordinaire, un rituel exécuté les yeux fermés (…).» D'ailleurs, le FFS ne manque pas de s'interroger si les révoltes qui ont touché certains pays arabes n'amèneront pas «les décideurs algériens à faire preuve de clairvoyance, de sagesse et d'esprit de responsabilité (…)». Rien n'est moins sûr, estime encore le parti de Da l'Ho. «Et rien ne le laisse présager.» Et la direction de ce parti, qui a boycotté les deux dernières législatives, de s'attarder sur la situation sociale, politique et économique du pays, accusant le pouvoir «d'ignorer la réalité algérienne et continuer à gagner du temps». Le document revient également sur la dernière batterie de lois, dites de réformes politiques, prises, selon les rédacteurs, sous la pression des partenaires de l'Algérie. Des réformes qui n'ont pas suscité, toujours selon le document, la curiosité des Algériens et qu'il qualifie de «énième fuite en avant». Abordant, enfin, la participation ou non aux prochaines joutes électorales, ce parti déclare ne pas se prononcer avant de traiter «en pronfondeur» certaines questions. «L'Algérie est-elle définitivement épargnée par le vent des révolutions qui balayent la région ? La population fait-elle complètement siennes les réformes présentées par le pouvoir ? Le parti dispose-t-il d'assez de ressources et de moyens pour glaner un nombre élevé de sièges au Parlement en vue de pouvoir peser dans l'échiquier et de na pas subir les critiques et sarcasmes de la population comme servant de décor, d'alibi et de caution ? La participation aux législatives ne va-t-elle pas freiner ou tout au moins compliquer la mise en œuvre du projet de rassemblement des énergies militantes ? Quels sont les changements apparus depuis les élections de 2007 qui pourraient justifier la participation aux élections de 2012 ? Somme-nous capables de convaincre la population de voter ?» Toutes ces questions, dans l'hypothèse d'une participation, devront trouver réponses chez les militants, à l'occasion de la tenue de la Convention nationale, prévue le 11 février prochain. Néanmoins, le document esquisse quelques réponses. A savoir que la participation resserrera les rangs du parti, élargira sa base sociale. Elle permettra également aux éventuels futurs députés du FFS de briser «la façade démocratique pour mieux exprimer le vécu et les aspirations de la population», à travers les différentes rencontres avec les délégations étrangères. De plus, le FFS pourrait apporter, entre autres, «la contradiction aux choix économiques du pouvoir». Le côté financier n'a pas été omis dans l'éventualité de la participation aux législatives, en ce sens que les futurs députés percevront un salaire conséquent à même d'aider au renflouement des caisses du parti. Cependant, il pose quand même un préalable : «Conditionner notre participation, par exemple, par l'abrogation des lois qui visent à verrouiller davantage les champs politique et médiatique.» En revanche, et dans le volet des inconvénients à sa participation aux élections, le FFS cite, entre autres, «la caution à la démarche visant à consolider une dictature. Le parti risque alors de perdre sa crédibilité, en aidant le système à se régénérer del'intérieur». En sus du «risque de défection de l'électorat qui ne croit pas aux élections car elles n'ont rien changé à son quotidien».La deuxième hypothèse consistant à boycott ces élections est également traitée sous l'angle avantages et inconvénients. Côté avantages, l'on cite la «cohérence de nos positions après le rejet du dialogue initié par le pouvoir dans le cadre des réformes politiques ; ne pas se rendre complice des événements créés par le pouvoir, sachant qu'aucune élection n'est ni honnête ni propre depuis l'Indépendance ; continuer à dénoncer la démarche du pouvoir, qui refuse une solution politique pacifique et démocratique ; accompagner le peuple dans son refus des mesures du pouvoir en demeurant à ses côtés notamment dans sa désaffection de ces législatives». L'effet boomerang du boycott est résumé par le document dans le «risque d'absence d'impact sur la société ; exclusion des médias pour mener la campagne, ne pas bénéficier du statut de député pour faire passer nos messages aux délégations étrangères». En guise de conclusion, le parti de M. Aït Ahmed estime qu'il a acquis assez d'expérience dans la pratique politique. Et c'est «cette expérience qui doit en permanence éclairer les discussions (…). Aussi doit-on considérer chacune des propositions avec sérieux. Chacun de nous doit être en mesure, à la fin de la Convention, de défendre avec conviction l'option qui sera arrêtée en définitive».