Les relations diplomatiques entre l'Algérie et la France connaissent en ce moment une intense activité. En effet, les responsables français multiplient, ces derniers jours, les visites de travail en Algérie. Après Michèle Alliot-Marie, la ministre de l'Intérieur, qui vient de boucler une visite de deux jours à l'invitation de son homologue algérien, Noureddine Zerhouni, c'est au tour de Bernard Kouchner, le ministre des Affaires étrangères, d'entamer aujourd'hui un séjour similaire. Des sources diplomatiques annoncent, dans la foulée, une visite du chef du gouvernement, François Fillon, pour les prochains jours. Porteur d'un message du président Nicolas Sarkozy à son homologue Abdelaziz Bouteflika, Kouchner s'entretiendra avec ses vis-à-vis algériens sur de nombreuses questions d'intérêt commun. L'union pour la Méditerranée et les relations bilatérales seront naturellement au menu de ces discussions qui préludent à un réchauffement des relations entre les deux pays. Paris ne cesse, en effet, d'émettre des signaux de «bonne volonté» pour hisser la coopération entre les deux Etats à un niveau supérieur. «Je souhaite que nous puissions développer au mieux la coopération algéro-française dans nombre de secteurs», a déclaré Alliot-Marie au terme de son déplacement à Alger. La diplomatie française commence même à rectifier ses positions sur le contentieux historique qui envenime les rapports entre Alger et Paris. Les récentes déclarations de l'ambassadeur, Bernard Bajolet, sur les méfaits incommensurables de la colonisation, qu'une bonne partie de l'opinion publique française avait d'ailleurs reprises à son propre compte, sont à inscrire dans ce registre. Bajolet avait, pour rappel, clairement reconnu la responsabilité des autorités françaises de l'époque dans les atrocités commises lors des massacres du 8 mai 1945, avant d'annoncer que son pays n'entend plus occulter son passé. «Le temps de la dénégation est terminé», a-t-il tranché. La sortie médiatique de Son Excellence a été également bien accueillie en Algérie. La Fondation du 8 Mai 1945 et le président de la République y ont vu un pas qualitatif vers la réconciliation des deux peuples. Bouteflika s'est dit à l'occasion «extrêmement attentif à toutes les voix qui s'élèvent en France pour rompre avec le déni de l'histoire». Mais il reste cependant à traduire ces discours, noir sur blanc, dans les conventions et les traités qui lient les deux pays. Tâche à laquelle on semble s'atteler désormais. Le projet sarkozien de l'union pour la Méditerranée constitue l'autre point d'actualité. L'Algérie, même si elle y adhère pour le principe, veut connaître le contenu de cet ambitieux projet avant de se déterminer définitivement. La visite de Kouchner servira probablement à expliciter cette initiative à ses interlocuteurs, et à lever les équivoques qu'elle suscite çà et là. De par son poids diplomatique sur les scènes africaine et arabe, l'importance de son marché interne et son rôle déterminant dans la sécurisation énergétique de l'Europe, l'Algérie se place logiquement en partenaire incontournable, voire indispensable, dans la construction de cet espace méditerranéen. La diplomatie française semble, en tout cas, prendre conscience du rôle prépondérant de l'Algérie à ce sujet, et compte visiblement s'investir davantage pour aplanir durablement les rapports entre les deux pays. L'Algérie fait également part de sa disponibilité à œuvrer dans ce sens à condition que ses partenaires honorent tous leurs engagements, anciens et présents. Est-ce une nouvelle page qui s'ouvre pour ce fameux «partenariat d'exception, mutuellement profitable» que les deux pays peinent à instaurer depuis des années déjà ? L'avenir proche nous le dira. K. A.