La culture africaine a toujours été victime des ambitions destructrices et aliénantes du colonialisme. Les repères identitaires des Africains, quand ils n'ont pas été murés dans le silence, se sont longtemps confinés dans de banales images exotiques pleines de stéréotypes et de superficialité. Des images négatives qui, d'année en année, sont allées en s'accentuant et que les Occidentaux se sont souvent plu à reproduire. Et pourtant, la culture africaine a beaucoup à donner au monde… si seulement celui-ci pouvait porter sur elle un regard plus ouvert. C'est justement ce qu'attend le président algérien. Que le monde change sa vision de l'Afrique. Et pour ce faire, il a appelé les pays africains à produire les efforts nécessaires pour faire en sorte que «le monde change sa perception de la culture africaine». Il a mis l'accent sur la nécessité pour l'Afrique de «libérer» son image des «stéréotypes dont elle souffre», et de «reconsidérer sa vision de la culture moderne et sa future contribution à la civilisation universelle». C'est ce qu'il a déclaré dans un message lu par Abdelaziz Belkhadem, ministre d'Etat, représentant personnel du président de la République, qu'il a adressé hier matin à tous les pays d'Afrique, à l'exception du Maroc et de la Mauritanie qui ne sont pas membres de l'Union africaine (UA) et qui n'ont, pour cette raison, pas pris part aux travaux qui ont rassemblé une trentaine de ministres africains de la Culture et 40 délégations pour la seconde réunion des ministres africains de la Culture ouverte hier à Alger. En exhortant les pays africains à faire accéder le monde à la compréhension de la culture africaine, le chef de l'Etat a affirmé que «la culture africaine, depuis Hérodote, reste fortement conditionnée par le regard ethnocentrique des Occidentaux. Quand elle est reconnue, la culture africaine est perçue, au mieux, au travers de gentils poncifs, comme l'expression d'une certaine harmonie avec la nature, merveilleuse mais insane», a-t-il précisé. En se référant à Franz Fanon et Aimé Césaire, «deux authentiques patriotes», il a relevé que l'Afrique «est bien consciente aujourd'hui que la culture, les productions de l'esprit, les arts, les savoirs sont déjà les véritables enjeux du genre humain». Rappelant qu'au cours des années écoulées, l'Union africaine a déployé des «efforts louables» pour renforcer les échanges de vues et les expériences, le président Bouteflika a fait remarquer que l'objectif de ces concertations est de parvenir à «redynamiser les valeurs culturelles, afin qu'à leur tour elles servent plus largement la renaissance de l'Afrique», notamment dans le développement social et économique qui doit, pour atteindre ses objectifs de lutte contre la pauvreté matérielle et humaine, «obligatoirement intégrer les espaces pour les différentes catégories de créateurs culturels». Il a également plaidé pour la promotion d'un «cercle plus vertueux» qui «serait basé, d'une part, sur la création de véritables marchés pour les produits culturels africains et, d'autre part, sur une coopération culturelle avec les marchés des pays riches». Il a, à cette occasion, salué la décision prise par l'UA de confier à l'Algérie l'organisation du 2ème Festival culturel panafricain après celui de 1969, soulignant que cette décision «s'inscrit pleinement dans la démarche de faire découvrir au monde entier l'immensité et la diversité de la richesse culturelle du continent». Mme Khalida Toumi a, pour sa part, précisé que la réunion des ministres africains de la Culture comporte de nombreux sujets «importants» et «stratégiques» qui exigent un traitement «profond». Tout en mettant l'accent sur les défis imposés à l'Afrique par la mondialisation, la ministre a souligné «l'importance» du partenariat euro-africain, notamment dans sa partie relative à la protection du patrimoine culturel qui, a-t-elle dit, «gagnerait à être étudié dans le sillage d'un nouvel ordre international susceptible de garantir l'égalité et la justice entre le Nord et le Sud». Aux termes des travaux de la seconde réunion des ministres africains de la Culture, les participants devront adopter les conclusions et les recommandations de la session ministérielle qui seront dévoilées demain.