En cette période d'aggravation de la crise financière mondiale, le débat sur la création des fonds souverains est relancé. Entre défenseurs de l'option et réticents, les avis sont partagés. D'un côté, le président français, Nicolas Sarkozy, président en exercice de l'Union européenne, s'est déclaré pour cette option afin de développer l'industrie. D'un autre côté, il y a les opposants qui ont fortement critiqué la proposition du chef d'Etat français. Lequel a, faut-il le rappeler, rendu publique sa suggestion mardi dernier avant d'annoncer deux jours plus tard la création d'un fonds souverain avant la fin de l'année en cours, sans toutefois en annoncer le montant. Selon Sarkozy, cette solution est une réponse à la crise économique. Elle permettra d'investir dans les entreprises stratégiques. «Ce que les producteurs de pétrole font, ce que les Chinois font, ce que les Russes font, il n'y a pas de raison que la France ne le fasse pas au service d'une politique industrielle digne de ce nom», a déclaré à ce sujet le président français lors d'un discours devant des chefs d'entreprise. Et d'expliquer que ce fonds, qui sera géré par la Caisse des dépôts, devra «stabiliser le capital des entreprises qui ont un avenir, qui disposent de savoir-faire et de technologies clés et qui pourraient être des proies tentantes pour des prédateurs». Le président français a, par ailleurs, affirmé que le fonds français emprunterait sur les marchés pour prendre des participations dans les entreprises. «Cela n'aura pas d'impact sur les déficits», a dit Nicolas Sarkozy, puisque les participations dans le capital des sociétés serviront de contrepartie à ces emprunts, a-t-il encore expliqué. Pour défendre sa proposition, qui intervient au moment où l'on plaide pour une solution mondiale coordonnée, le président français a estimé que la crise financière avait changé la donne dans l'économie mondiale, et que l'action des Etats était désormais indispensable. Et dire qu'au début de la crise, il avait défendu l'option d'une solution globale avant de se rétracter et d'opter pour des mesures strictement françaises. Ce qui a d'ailleurs soulevé le courroux de ses voisins européens, comme c'est le cas de la chancelière allemande qui y voit une forme de protectionnisme. A titre indicatif, des fonds souverains ont été créés ces dernières années par des Etats qui disposent d'une épargne publique abondante, en raison de ressources en pétrole, à l'image de la Russie, du Brésil et de la Norvège. Les Etats à fortes réserves de changes ont également eu recours à cette forme d'investissement, comme la Chine. L'Algérie, dont les réserves sont également importantes, a écarté cette option. Un débat a été lancé l'été dernier. Il y a ceux qui ont défendu cette option en posant certaines conditions et ceux qui, en parallèle, ont prôné la prudence. Finalement, le président de la République a fini par clore le débat en affichant un niet catégorique à la création de fonds souverains. Le chef de l'Etat a jugé qu'il est question pour l'heure d'utiliser les ressources financières dans l'investissement local en raison de l'importance des besoins exprimés. Ainsi, la création des fonds souverains est loin d'être envisagée chez nous. Les experts ont jugé cette réaction judicieuse, particulièrement après l'avènement de la crise puisque beaucoup de risques sont à apprendre dans ce cas de figure. A l'échelle internationale, les actifs des fonds souverains ont été évalués, faut-il le rappeler, au début de 2008, à 3 000 milliards de dollars et pourraient atteindre 12 000 milliards à l'horizon 2015, soit plus de 10% de l'argent en circulation dans le monde, selon les chiffres du Fonds monétaire international (FMI). Ces fonds s'orientent généralement vers des investissements financiers, notamment la participation au capital d'entreprises occidentales, voire leur prise de contrôle. Les fonds singapourien et chinois ont dans ce cadre volé au secours des banques européennes et américaines après l'avènement de la crise des supprimes. Est-ce le bon choix après ce qui se vient de se produire à l'échelle financière avec la faillite des grandes banques internationales ? S. I.