L'Algérie a enregistré 44 000 nouveaux cas de cancer (dernières statistiques), dont 20 000 malades privés de traitement de radiothérapie. La faute est à la Caisse nationale de la sécurité sociale (Cnas) qui refuse de rembourser les médicaments anticancéreux et les traitements médicaux, dont la simple chirurgie qui, pourtant, peut guérir 60% des cas. Invité, hier matin, du forum du quotidien DK News, le professeur Kamel Bouzid, chef du service oncologie du Centre anticancer Pierre et Marie Curie (Cpmc) du CHU Mustapha, n'a pas mâché ses mots pour fustiger la Caisse et le ministère du Travail. Des médicaments prescrits pour hypertendus sont remboursés par la Cnas alors que les anticancéreux ne le sont pas. D'autant que des formes de cancer sont guérissables presque à 100%, contrairement à l'hypertension artérielle. Un paradoxe, selon le professeur. Le chef du service oncologie du Cpmc cite le cas des dix-sept enfants atteints par le cancer de la rétine, auxquels un œil a déjà été enlevé. En raison du refus par la Cnas de rembourser les médicaments importés de l'étranger, ces pauvres enfants pourraient perdre leur second œil, regrette le Pr Bouzid. Au manque de prise en charge se greffe l'espacement, trop éloigné, des séances de radiothérapie. «Le plus proche rendez-vous est avril 2014 au CPMC Mustapha et en juin 2014 à Oran», affirme le professeur, qui accuse la Cnas de vouloir freiner la mise en œuvre du Plan national de lutte contre le cancer adopté lors du dernier Conseil des ministres, sous la présidence du président de la République. M. Abdelaziz Bouteflika qui a instruit le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, de prendre en charge la catégorie des malades atteints de cancer, notamment le volet du remboursement du médicament par la Sécurité sociale. Notant avec satisfaction une disponibilité des médicaments durant l'année 2012, le professeur estime, néanmoins, que les coûts demeurent exorbitants. Ainsi, un cancer à un stade avancé (3e et 4e stades) coûte 5 millions de dinars (500 millions de centimes) par patient. Les 3/5 des malades décèdent dans les 5 ans qui suivent le diagnostic, faute de soins adéquats. Le spécialiste préconise de transférer une partie des malades vers des hôpitaux étrangers, au Maroc, en Tunisie ou encore en Turquie. Il omet volontairement de citer la France et la Suisse, car ces deux pays ont signifié leur refus catégorique pour une prise en charge des malades algériens en raison des dettes cumulées par la Sécurité sociale algérienne auprès de leurs hôpitaux respectifs. «Il y a un an, j'avais proposé de faire transférer une partie des malades à l'étranger. En plus du refus de la Cnas, j'avais été surpris par l'opposition de certains de mes collègues. Pourtant, l'Algérie a bien été capable de transporter plus de 30 000 hadji aux Lieux Saints cette année, et au Soudan en 2010 pour ce qui est des supporters de l'EN de football, alors pourquoi pas 20 000 malades cancéreux ?» A ce propos, l'invité de DK News préconise que la Cnas procède par des appels d'offres en vue de choisir les établissements vers lesquels pourraient être transférés les malades. Y. D.