L'union fait la force. Cet adage s'appliquerait parfaitement si le rapprochement entre les pays membres de l'OPEP et la Russie était couronné par une adhésion de la République fédérale à l'organisation. L'objectif, le seul : faire baisser le volume de production, en d'autres termes pomper moins, pour faire face aux prix qui connaissent des chutes libres. En effet, l'organisation que préside actuellement le ministre algérien de l'Energie et des Mines, se trouve, actuellement, face à une majeure problématique qui est la descente aux abysses des prix de l'or noir. Celle-ci, qui compte pas moins de 10 pays, n'arrive pas à influencer réellement sur la chute des prix, et ce, en dépit des tentatives prises, en catastrophe, lors des réunions qui se sont succédé ces derniers temps. Que faire face à une crise financière ravageuse, dont la conséquence directe est la baisse très significative des prix de l'or noir, mais surtout avec tous ses dommages collatéraux ? A présent, la réponse, la seule peut-être, est de faire appel à des pays producteurs hors OPEP, dont la capacité de production n'est pas à sous-estimer, pour juguler, ensemble, les prix, et ce, au moyen d'une baisse collective du volume de production. En clair, l'OPEP, qui pompe près de 40% de l'offre mondiale, craint notamment de perdre des parts de marché par rapport aux pays hors OPEP si elle est seule à pomper moins. Elle n'a cessé d'appeler les pays exportateurs de pétrole n'appartenant pas à son organisation, en particulier la Russie, le Mexique et la Norvège, à contribuer à son effort de réduction de l'offre mondiale, voire à entrer dans ses rangs. Le feu est en la demeure, étant donné que l'économie des pays producteurs de tout bord souffre de l'effondrement des cours du baril, qui ont chuté de 100 dollars depuis leurs sommets de la mi-juillet, à 147,50 dollars. L'apport de la Russie, un acteur très important dans le secteur de l'énergie en particulier, mais pas seulement, grâce à l'abondance de ses réserves de charbon et de gaz, ne peut être que capital en ces moments d'incertitude. Deuxième producteur de pétrole dans le monde après l'Arabie saoudite et premier producteur mondial de gaz (environ 600 milliards de m3), la Russie ne peut rester insensible aux différentes conditions, souvent tendues que traverse le marché pétrolier. Même en dehors de l'Organisation, celle-ci joue, depuis longtemps, un rôle prépondérant dans une équation à géométrie variable, même celui qui va à contre-courant des décisions des membres de l'OPEP. Alors que depuis des années, la Russie, il faut le dire, d'ordinaire jalouse de son indépendance énergétique et peu encline à réduire volontairement sa production, assiste uniquement en observateur aux différentes réunions de l'OPEP. Elle n'a jamais transigé sur un principe, voire violé la sacro-sainte loi : rester maître de sa production. Mais, le fait qu'elle opère un virage à 180 degrés est un signe de la gravité de la situation, compte tenu du fait que le marché pétrolier représente plus de la moitié des recettes fiscales du budget fédéral de cette République. Les exemples, très marqués politiquement, de Yukos et de Gazprom, illustrent la vision qu'a le gouvernement de son rôle dans le secteur. «La situation autour des prix du pétrole inquiète la Russie. A chaque fois, nous voulons savoir si les cours actuels du pétrole sont justes ou s'expliquent par des facteurs conjoncturels», avait souligné le président Medvedev. «Je veux dire que nous sommes prêts [adhésion à l'OPEP], nous devons nous défendre, c'est notre base de revenus, que ce soit le pétrole ou le gaz. Or, de telles mesures de protection peuvent être liées tant à la diminution des volumes de production de pétrole qu'à la participation à des organisations de producteurs, déjà existantes, si nous arrivons évidemment à nous entendre», a indiqué le chef de l'Etat russe, jeudi dernier lors d'une réunion consacrée au développement économique et social de la région fédérale de l'Oural, cité par des agences. Pour le successeur de Poutine, l'éventuelle adhésion de la Russie à l'OPEP répond à un certain nombre de paramètres, notamment la stabilisation du marché pétrolier durement affecté par la crise économique mondiale et la baisse de la consommation de pétrole aux Etats-Unis, mais surtout le souci de «protéger» l'économie russe, qui est, pour rappel, dépendante en partie des recettes pétrolières et gazières. «A mon avis, nous ne devons exclure aucune variante. Je le répète, il s'agit de la base des revenus de notre pays, de son développement, et nous ne devons nous guider sur aucun critère abstrait ni sur les recommandations d'autres organisations internationales. Il est question de nos intérêts nationaux. Et nous agirons comme nous le jugerons utile», a ajouté Medvedev. Même son de cloche chez le vice-président de Loukoil, Leonid Fedoun, qui a fait savoir que la coopération, affichée ces derniers temps entre la Russie et l'OPEP telle que souhaitée par l'Organisation, est un «signal fort» de la Russie en attendant son adhésion. «La Russie et l'OPEP ont commencé à coopérer. Cette coopération pourrait déboucher sur l'adhésion russe à l'OPEP», a précisé la même source. Par ailleurs, si le rapprochement de la République de Russie à l'OPEP, à la lumière des déclarations des responsables russes, était effectif, dans un futur proche, en attendant la Norvège et le Mexique, il n'en demeure pas moins que ladite organisation consolidera davantage son contrôle sur le marché et, par ricochet, maintenir son influence sur le marché. Justifiée par un contexte économique morose qui les rapproche chaque jour un peu plus, cette future adhésion entre ces deux pays est d'ores et déjà perçue par les observateurs de la scène énergétique comme une lune de miel. Pour le pire, en attendant… le meilleur. De ce fait, l'OPEP, qui étoffera son effectif, pourrait exercer un véritable contrôle du marché et maintenir son influence, face aux producteurs non OPEP comme la Norvège et le Mexique, mais surtout, obliger l'Arabie saoudite de devenir un bon élève au sein de l'organisation. S. B.