Dans une analyse fort intéressante sur l'évolution du pétrole, «Les Affaire.com», un organe spécialisé, met en exergue une somme de visions aussi diverses qu'expertes. Il écrit ainsi que, si les experts s'entendent pour prévoir un «retour de balancier», les marchés à la «fin de 2008 pointent vers le bas à une vitesse vertigineuse». Pour l'immédiat, tout se passe comme si la demande actuelle demeurait le seul et unique facteur de prix. Et, la liste sans fin d'indicateurs économiques moribonds s'invite sur les marchés, refroidissant les élans de reprise. Et même l'OPEP n'y peut rien. Réputée pour l'indiscipline de ses membres, les annonces de baisses de production passent comme si de rien n'était. Ou plutôt, sont interprétées comme des signes de faiblesse massive de la demande, qui induisent des chutes de prix encore plus brutales. Pourtant, certains commencent à se dire que les investisseurs ont tort d'ignorer les annonces de l'OPEP. Ce qui n'est pas faux, dans la mesure où les cours peinent à reprendre. L'Agence internationale de l'énergie estime que 60 à 70% des baisses annoncées se transformeront en baisses effectives de production. «L'OPEP est parvenue à ramener la production vers le bas dans le passé. Cependant, historiquement, cela lui prend environ un an pour mettre à exécution ses annonces de baisse», souligne Andrew Potter d'UBS. De plus, avec ou sans annonces de l'organisation pétrolière, les experts s'accordent à dire qu'à la fin de 2008, le pétrole était une marchandise «survendue». Son prix ne correspondait pas à l'équilibre naturel du marché. Aux prix actuels, les finances publiques des pays producteurs sont dans le rouge, les projets d'exploration et de développement sont gelés, y est-il souligné. «Le secteur de l'énergie s'est littéralement mis en grève», souligne Paul Horsnell de Barclays Capital, cité dans «Affaires.com». Ce qui pourrait conduire à une insuffisance de l'offre en 2010, voire dès la fin de 2009, pense-t-il. Boom ou reprise modeste ? Si la demande mondiale de pétrole a reculé en 2008, une première en 25 ans, elle devrait reprendre le chemin de la croissance dès 2009, prévoit l'Agence internationale de l'énergie. Et quand l'économie demandera celui-ci pour alimenter cette reprise, le pétrole viendra à manquer. A la CIBC, Jeff Rubin, connu pour être le plus agressif des économistes canadiens en matière de pétrole, estime que, rien que dans les sables bitumineux canadiens, les gels de projets conduiront à priver le marché de 800 000 barils par jour, soit de près de la moitié de la croissance initialement prévue pour les cinq prochaines années. Et les mêmes scénarios se produisent au Brésil, en Afrique de l'Ouest ou au Moyen-Orient. Si la remontée du prix semble évidente au vu de la contraction excessive de l'offre, le moment de cette reprise fait débat. «Les restrictions du moment sur l'offre sont une recette miracle pour créer un nouveau boom pétrolier dans les prochaines années», souligne Jeff Rubin, qui anticipe un retour à 100 dollars le baril dès la fin de 2009. Plus prudent, l'économiste principal de la Banque nationale, Yanick Desnoyers, pense que le pétrole remontera, certes, mais que la hausse se fera attendre. «Les matières premières sont des actifs dits de fin de cycle. Ils ne remontent qu'après une reprise de l'activité économique», explique-t-il. Les experts tablent donc pour une remontée des prix à la fin de 2009… voire au début de 2010.