«Je garde un mauvais souvenir de ma défaite face à l'ES Sétif» * C'est l'Algérie qui sera finalement l'adversaire de la Côte d'Ivoire en quarts de finale. C'était quand même attendu… Oui, c'était attendu, surtout après la configuration de la poule A. Ce qui est certain, c'est que ce sera une grande affiche, l'une des plus belles de cette Coupe d'Afrique des nations, surtout qu'elle opposera deux sélections qualifiées à la Coupe du monde. * La Côte d'Ivoire a déjà affronté une autre sélection qualifiée pour le Mondial, le Ghana, avec un succès au bout. Serait-ce un avantage pour elle ? Cela démontre que nous n'avons pas été gâtés par le sort dans cette CAN. Après avoir éprouvé des difficultés durant notre premier match face au Burkina-Faso, nous avons eu au menu le Ghana, un Mondialiste, puis maintenant l'Algérie, un autre Mondialiste. Je ne sais pas si cela peut constituer un avantage pour nous, mais il est clair que notre parcours est jalonné d'adversaires d'envergure. * Comment jugez-vous la sélection algérienne d'un point de vue technique ? C'est une équipe d'un niveau appréciable, constituée de joueurs expérimentés dont la force réside dans le jeu collectif. Elle possède de nombreuses individualités qui peuvent faire la différence. * Quelles sont ces individualités ? Il y a le gardien de but (Faouzi Chaouchi, ndlr), qui a un excellent niveau, ainsi que le milieu de terrain petit de taille (Karim Ziani, ndlr) qui est très dynamique et abat un énorme travail. Même l'attaquant de pointe (Abdelkader Ghezzal, ndlr) bouge beaucoup et joue très bien avec ou sans ballon. Cependant, j'estime que la grande force de l'équipe d'Algérie réside dans son milieu de terrain. * Pouvez-vous être plus clair ? Sur ce que j'ai vu de l'équipe algérienne dans ses trois matchs du premier tour, elle possède un milieu de terrain capable de créer des problèmes à n'importe quelle équipe. Nous attendons qu'il en soit de même contre nous dimanche prochain et c'est pour quoi je pense que notre tâche ne sera pas du tout facile. * Mis à part le milieu de terrain, quels sont, selon vous, les points forts et les points faibles de l'Algérie ? C'est une équipe qui ne marque pas beaucoup de buts et c'est très révélateur qu'elle se soit qualifiée en inscrivant un seul but dans ses trois matches. Dans le même temps, elle possède une défense solide qui lui a permis de résister à deux équipes, le Mali et l'Angola, qui possèdent des attaquants prolifiques. La sélection algérienne tire donc sa force dans la solidité de sa défense alliée à l'abattage de son milieu de terrain. * Il s'agit aussi d'une sélection qualifiée pour la Coupe du monde… Oui, et de quelle manière ! L'Algérie n'a pas eu le parcours le plus facile puisqu'il y avait, dans sa poule, l'Egypte, championne d'Afrique en titre. On ne peut pas écarter de la course au Mondial le vainqueur des deux dernières éditions de la CAN, si on n'est pas très fort. En l'occurrence, la sélection algérienne a été très forte. * C'est pour cela que vous vous en méfiez ? C'est naturel que je m'en méfie. Le tombeur de tenant du titre ne doit pas être pris à la légère. Nous n'avons aucunement l'intention de négliger cette équipe. Le scénario vécu face au Burkina-Faso lors du premier match constitue une bonne leçon à méditer afin de ne pas tomber dans ses travers face à l'Algérie, à plus forte raison lorsqu'on sait que le niveau de la sélection algérienne est bien supérieur à celui du Burkina-Faso. * Vous attendez-vous à ce que l'Algérien verrouille le jeu ? Je ne le pense pas. J'ai regardé les trois matches que l'Algérie a disputés dans cette CAN et j'ai vu que les Algériens n'ont fermé le jeu à aucun moment. Même contre le Mali, ils ne se sont pas cantonnés en défense en deuxième mi-temps, alors qu'ils menaient au score depuis la fin de la première mi-temps. Il en a été de même lors de leur match face à l'Angola où on a bien vu que les meilleures occasions de scorer ont été à leur actif. Contre nous, je m'attends à ce que l'équipe algérienne renforce son milieu de terrain et procède par des contre-attaques. Il y a aussi un autre point qui caractérise les Algériens. * Lequel ? L'Algérie exploite très bien les balles arrêtées en situation offensive et il faudra s'en méfier, tout comme il faudra aussi se méfier des centres venus des côtés, autre point fort des Algériens. Il faut dire qu'ils sont tout aussi solides sur les balles aériennes qu'en situation défensive, vu que l'axe de la défense est constitué de joueurs grands de taille qui ne laissent pas passer les balles aériennes. C'est pour quoi je préconise un jeu rapide à une touche de balle. * On suppose que vous ambitionnez d'aller loin dans cette CAN… Assurément. Nous sommes venus en Angola pour repartir avec le trophée, surtout que la Côte d'Ivoire a raté de peu le sacre lors des deux précédentes éditions. Je pense que le temps du sacre est venu et c'est pour ça que nous sommes déterminés à écarter l'Algérie. * La Côte d'Ivoire a joué deux matches au premier tour alors que l'Algérie en a joué trois. Est-ce un avantage ou un inconvénient ? Je ne sais pas. Je ne veux pas trop philosopher avant le match. Cela pourrait être un avantage pour nous, mais cela pourrait également être négatif. A la fin du match, je vous donnerai une réponse (sourire). * Vous avez quand même demandé à jouer un match amical au cours de cette semaine… Effectivement, j'aurai aimé que mon équipe joue un troisième match, mais il y a eu le retrait du Togo. J'avais espéré une rencontre amicale, mais le comité d'organisation a catégoriquement refusé notre demande, arguant que c'est contre à la réglementation. * Pourquoi teniez-vous à un match amical ? On ne peut pas se permettre un repos de 9 jours entre notre dernier match face au Ghana et celui contre l'Algérie. Il fallait meubler cette semaine. Cela dit, même si la CAF avait accepté notre requête, nous n'avons pas trouvé de sparring-partner. * Comment avez-vous géré cette période d'inactivité ? Comme vous avez pu le constater ce soir (entretien réalisé après l'entraînement, ndlr), nous axons nos exercices sur les oppositions et le jeu afin que les joueurs restent au top de leur forme. * Pensez-vous pouvoir tirer profit du terrain de stade de Cabinda où vous avez déjà joué deux matches ? C'est vrai que nous aurons plus de repères que les Algériens sur la pelouse, mais il parait que le terrain du stade de Cabinda ressemble à celui du stade de Luanda. Je ne pense pas, dès lors, qu'il y aura un grand avantage pour nous. * Pourtant, des joueurs ivoiriens se sont plaints du terrain qui, selon eux, gênera l'évolution des joueurs techniques… Le terrain est mauvais et handicape l'évolution des joueurs, mais je ne crois pas qu'il influera beaucoup dans le jeu. Ce dont je suis convaincu, c'est qu'il y aura un grand match, comme cela avait été le cas entre la Côte d'Ivoire et le Ghana. Notre équipe autant que celle de l'Algérie jouer pour gagner sans faire de calcul tactique qui pourraient tuer le jeu. * Vous avez entraîné Lille et le Paris Saint-Germain en France. Vous connaissez donc quelques joueurs algériens… Lorsque j'entraînais le PSG, il n'y avait pas beaucoup d'Algériens en Ligue 1, contrairement à aujourd'hui où il y en a qui jouent non seulement dans le championnat de France, mais aussi dans les autres grands championnats européens. Le seul joueur algérien dont je me souviens est Saïfi. Cela dit, le style de jeu de l'Algérie est similaire à celui des autres pays nord-africains, avec beaucoup de hargne et de fougue. * Vous avez, au cours de votre carrière, affronté un club algérien en étant entraîneur d'Al Ittihad Djeddah. Vous en rappelez-vous ? Je ne peux pas oublier ce match, quoi que mon passage à Ittihad Djeddah a été court. C'était une rencontre face à l'ES Sétif et c'est un très mauvais souvenir pour moi. * Vous souvenez-vous toujours de ce match ? Comment l'oublierais-je ? C'est l'un de mes plus mauvais souvenirs. Nous avions joué dans des conditions difficiles, sur une pelouse synthétique. Mes joueurs n'avaient pas pu s'adapter au terrain et au froid glacial qui régnait ce jour-là. * Vous rappelez-vous du résultat du match ? Oui. 4-1 pour l'ESS. Je vous l'ai dit, nous avions joué dans des conditions difficiles. Je n'oublierai pas ce match qui avait été mon dernier avec Ittihad Djeddah. * Savez-vous que l'auteur du quatrième but de l'ESS ce jour-là, Abdelmalik Ziaya, fait partie de la sélection algérienne dans cette CAN ? Oui, je le sais. C'est un attaquant. Lorsque j'ai étudié l'effectif de l'Algérie, j'ai remarqué que les titulaires jouent tous en Europe, à l'exception de deux ou trois joueurs locaux qui évoluent à l'ESS. * Vous rappelez-vous toujours du numéro 10 de l'ESS, Hadj Aïssa, dont vous aviez fait l'éloge lors de la conférence d'après-match ? Vous parlez du joueur aux longs cheveux ? * Oui. Bien sûr ! Il avait une manière de jouer particulière, faite de dribbles et de passes courtes. Il a été très décisif. C'est vraiment un petit Maradona. * Comment appréhendez-vous votre nouveau rendez-vous avec le football algérien ? Les choses ont évolué en trois ans. C'est une nouvelle compétition et de nouvelles ambitions. * Cherchez-vous à prendre votre revanche ? Non, je ne raisonne pas ainsi. Le seul objectif est de se qualifier pour les demi-finales et de permettre à la Côte d'Ivoire d'accomplir sa mission, abstraction faite du nom de l'adversaire. Entretien réalisé par Samir Bechir