«Algérie-Egypte ne doit pas être une guerre» «Si nous battons l'Algérie, nous n'aurons peur ni de l'Italie ni du Brésil» Après que la sélection d'Egypte eut remporté deux sacres africains de suite sous son règne, le président de la Fédération égyptienne de football, Samir Zaher, ambitionne d'aller encore plus loin : une qualification à la Coupe du monde de football. Il en a fait un objectif personnel avant que ce soit l'objectif de tout un peuple. Il se confie à notre correspondant au Caire, Mohsen Lamlom. * Comment voyez-vous le match Algérie-Egypte à Blida ? Ce sera un match tendu où on ne verra pas beaucoup de prouesses car l'histoire a démontré que les confrontations entre l'Egypte et l'Algérie n'atteignent jamais les sommets au plan technique à cause du caractère derby de ces matches. Cela dure depuis longtemps déjà et nous y sommes habitués. Donc, à Blida, l'enjeu principal sera le gain des trois points et la manière importera peu. * Faites-vous allusion à la nature du public algérien, connu pour son enthousiasme débordant ? C'est évidemment l'une des raisons de cet état de fait, mais la principale raison est la position de chaque équipe dans le groupe : l'Egypte doit rattraper les deux points perdus à domicile face à la Zambie alors que l'Algérie n'acceptera pas de perdre un match chez elle. Voilà où réside la difficulté. * Comment imaginez-vous le scénario du match ? La partie ne sera facile ni pour l'Egypte ni pour l'Algérie. J'espère seulement qu'elle se déroulera dans de très bonnes conditions et dans un esprit digne du nom et de l'histoire des deux pays que j'ai toujours qualifiée de révolutionnaire. Le match mérite d'être grand car il va opposer deux grands. * Pensez-vous que l'hommage rendu à Mohamed Abou Trika par El Heddaf et Le Buteur et le dénouement de l'affaire Belloumi contribueront à calmer les esprits entre les deux publics ? Effectivement, cela contribuera beaucoup à ce que le match se déroule dans un cadre civilisé, loin de tout ce qui pourrait altérer l'esprit de concorde entre l'Egypte et l'Algérie. Nul n'ignore que les relations sportives entre les deux pays sont privilégiées, surtout depuis que Mohamed Raouraoua a été élu à la présidence de la Fédération algérienne de football. J'ai toujours eu de très bons rapports avec lui. * D'aucuns affirment que la crise née de l'affaire Ibrahim Hassan planera sur le match et pourrait entraîner des effets négatifs… Je peux vous affirmer que cette crise est bel et bien finie. Et puis, ce n'est pas une crise pareille qui remettra en cause les relations fortes qui unissent les deux pays. Pour preuve, l'hommage de votre journal à Abou Trika et le règlement de l'affaire Belloumi sont intervenus après l'affaire Ibrahim Hassan. Cela démontre le rapprochement des points de vue sur la question. * Les médias des deux pays déchaînent les passions au tour du match. Pensez-vous que cela aura des retombées négatives le jour du match ? Il est malheureux de voir que certains médias ont utilisé l'émotivité des supporters. Chaque équipe voudra remporter les trois points, mais il ne s'agit que d'un match de football. Ce n'est pas une guerre et ce ne sera pas la dernière rencontre entre les deux sélections. Il y a toujours un vainqueur et un vaincu et c'est ce que les supporters doivent comprendre, loin de tout chauvinisme médiatique. * Le match aura lieu au stade de Blida dont la contenance est limitée. Serait-ce un avantage pour la sélection égyptienne ? Ce serait une erreur de raisonner ainsi car affronter une équipe ne diffèrera pas suivant le stade qui abritera la rencontre, surtout lorsque l'adversaire a pour nom l'Algérie. Que le match se déroule à Blida ou ailleurs, rien ne changera puisque ce sera toujours en terre algérienne. De plus, une fois le stade désigné, une délégation de notre fédération s'est déplacée à Blida pour une inspection et nous a assurés que c'est un bon stade. Donc, nous n'avons aucun problème de ce côté. * Le public égyptien s'inquiète du recul du niveau d'Al Ahly et du Zamalek ces derniers temps. Un commentaire ? Nul doute que ce recul que connaissent ces deux grands clubs influe négativement sur le niveau de la sélection, mais à bien analyser les choses, lorsqu'il s'agit d'un match décisif pour la qualification à la Coupe du monde, cela n'a aucune influence, surtout si l'on tient compte du cachet derby entre l'Egypte et l'Algérie. * Des problèmes ont surgi dernièrement dans le programme de préparation de la sélection égyptienne et il a même été question d'annuler le stage d'Oman. Qu'en est-il au juste ? Disons-le en toute franchise : l'élimination inattendue du Ahly en 16es de finale de la Ligue des champions africaine face à un novice, Kanu Pillars, a changé la donne puisque cela a induit que le Ahly dispute un tour supplémentaire en Coupe de la CAF. Personne ne s'attendait à ce scénario. Il fallait s'y adapter en tenant compte de l'intérêt de la sélection avant tout, puis de l'intérêt des clubs. * Le stage d'Oman est-il maintenu ? Il se tiendra à la date indiquée. La sélection partira le 25 mai et affrontera la sélection d'Oman le 31 au lieu du 30 mai. Puis, elle reviendra le soir même et entrera dans un stage bloqué de deux jours au Caire, avant de prendre le départ pour l'Algérie le 5 juin. Le match aura lieu le 7 juin et nous rentrerons en Egypte le 8 juin, inch'Allah. * Qu'en est-il des problèmes d'effectif avec la suspension de Essam Al Hadhary, la blessure de Emad Moteab et la dispute entre Mido et Amr Zaki ? En vérité, ce sont des choses auxquelles nous sommes habitués. Concernant Essam Al Hadhary, il n'a aucun problème et il sera présent face à l'Algérie. Pour l'instant, nous n'avons reçu aucune notification officielle de sa suspension, que ce soit de la FIFA ou d'Al Ahly. Pour ce qui est de Amr Zaki et Mido, je les ai rencontrés durant mon dernier séjour à Londres et je peux vous assurer qu'il n'y a aucun problème entre eux. La seule absence à déplorer sera cette de Emad Moteab, à cause d'une blessure, et c'est indépendant de notre volonté. * Que pensez-vous des déclarations d'Hervé Renard, le sélectionneur de la Zambie, qui persiste à dire que c'est l'Egypte qui est le favori pour aller à la Coupe du monde ? Ce sont des déclarations qui nous flattent, mais je prends les choses avec réalisme. Qu'on nous donne comme favori ou non, cela ne changera rien à la situation : notre objectif est d'aller en Coupe du monde. Quand notre sélection aborde un match, c'est comme elle entre dans une bataille et elle est tenue de gagner. * Selon vous, pourquoi parle-t-il ainsi alors qu'il vous a imposé le nul au Caire lors de la première journée ? Je n'ai aucun commentaire à faire sur ce que déclare cet entraîneur ou toute autre personne car cela ne changera rien pour moi. Concernant le nul face à la Zambie, je trouve que c'est bien que ça arrive au début du parcours car il est encore temps pour en tirer les leçons et nous racheter, alors que si cela était arrivé en fin parcours, cela pourrait nous coûter cher. * Le rachat se fera-t-il face à l'Algérie ? Il est clair que j'espère que nous battrons l'Algérie, mais j'entendais par rachat de rattraper les points perdus au cours de tous nos matches à venir. * Une rumeur circule quant à un éventuel report de la Coupe des Confédérations à cause de l'épidémie de la grippe porcine. Est-ce vrai ? C'est totalement faux. Nous n'avons rien reçu à ce sujet. Jusqu'à preuve du contraire, la compétition se déroulera aux dates prévues et elle est incluse dans le programme de notre sélection. D'ailleurs, la Fédération sud-africaine de football nous a envoyé une correspondance pour nous rappeler de la nécessité de mettre les vaccins à tous les membres de la délégation. * Que pensez-vous des chances de la sélection égyptienne dans cette compétition, avec la présence de l'Italie, du Brésil et des Etats-Unis dans son groupe ? Le niveau de l'Egypte et son rendement dans la Coupe des Confédérations dépendra en grande partie du résultat de son match face à l'Algérie. En plus clair, si elle gagne à Blida, elle ira en Afrique du Sud avec un moral gonflé à bloc, ce qui pourrait lui donner la confiance nécessaire pour réaliser de bons résultats et elle n'aura pas peur de l'Italie et du Brésil. Dans le cas contraire, cela se répercutera sur son rendement. Même l'adhésion et le soutien du public dépendra du résultat face à l'Algérie. * Si l'on comprend bien, l'Egypte pourra battre l'Italie et le Brésil si elle bat l'Algérie ? Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je parlais de l'état psychologique des joueurs. S'ils gagnent contre l'Algérie, ils joueront libérés en Coupe des Confédérations, nonobstant les résultats, et s'ils perdent, il y aura l'effet inverse. Le joueur égyptien est caractériel. Il fonctionne de manière émotive. * Comment entrevoyez-vous l'avenir de la sélection égyptienne dans les qualifications pour le Mondial ? A mon avis, la qualification se jouera lors de la dernière journée, surtout que l'objectif et la motivation sont les mêmes chez les quatre sélections de la poule. L'Egypte, l'Algérie, la Zambie et même le Rwanda ambitionnent de décrocher le ticket qualificatif pour la Coupe du monde, tout en n'oubliant pas l'autre objectif, à savoir la qualification à la CAN-2010 en Angola. * Au regard de la prestation de l'Algérie lors de la première journée face au Rwanda, quelle appréciation avez-vous de cette équipe ? Franchement, l'Algérie n'est pas parue au niveau auquel je m'attendais. Même si beaucoup d'Algériens ont salué ce nul, il m'a, personnellement, déçu car l'Algérie a une histoire et un nom sur la scène continentale. Quels que soient les problèmes que vit son football, on ne doit pas en arriver jusqu'à se réjouir après un nul face au Rwanda car c'est indigne de la renommée et de l'histoire de l'Algérie, bourreau de l'Allemagne en 1982. Du Caire, correspondance particulière : Mohsen Lamlom