2.300 pages pour prévenir les risques en matière de finances et la débâcle des Banques et autres institutions. C'est tout le texte visant la réforme du système financier aux Etats-Unis qui a été adopté jeudi par le Sénat. Il s'agit de la version finale de la plus vaste réforme de la régulation financière depuis les années 30. Barack Obama est d'ores et déjà aux anges. Il promulguera dans les très prochains jours la nouvelle Loi. 64 voix se sont prononcées pour et 39 n'ont pas été d'accord. Des chiffres très significatifs pour les démocrates qui reprennent du poil de la bête. La Chambre des représentants avait déjà adopté le 30 juin ce texte, commun aux deux chambres. Les 2.300 pages qui constituent la Loi «Dodd-Frank» - du nom de ses principaux auteurs, intervient pour tenter d'empêcher une nouvelle crise, telle que celle qui avait culminé à l'automne 2008, précipitant l'économie des Etats-Unis dans l'abîme. Le président Obama personnellement impliqué dans le débat sur cette réforme, entamé depuis près d'un an, avait une nouvelle fois encouragé le Sénat mardi à agir «rapidement» afin qu'il puisse promulguer la Loi la semaine prochaine. Le texte, qui vise à étendre le contrôle des régulateurs sur des pans entiers de la finance qui lui échappaient, prévoit la création d'un organisme de protection des consommateurs de produits financiers au sein de la Banque centrale (Fed) et il empêche le sauvetage de grandes institutions financières aux frais des contribuables. La Loi met l'accent sur plusieurs mesures qui s'imposent comme étant essentielles pour sortir les Etats-Unis de la récession qui a jeté de nombreux américains sur le trottoir et qui se sont donc retrouvés sans maison, sans travail. Mais plutôt sur le carreau. En premier lieu, il faut citer la protection des consommateurs qui sera dorénavant confiée à un organisme nouvellement créé, le Bureau de protection financière des consommateurs, hébergé au sein de la Banque centrale (Fed), mais avec un directeur indépendant nommé par le président et confirmé par le Sénat. Le Bureau est chargé de définir les règles s'appliquant à la plupart des produits financiers de consommation courante (prêts immobiliers, cartes de crédit, prêts étudiants...). De nouvelles institutions On parle également de la création du Conseil de surveillance de la stabilité financière réunissant des représentants du Gouvernement et des principaux régulateurs. Cette nouvelle instance sera chargée de prévoir en amont les risques qui pourront se poser à l'ensemble du système et de coordonner les actions à prendre pour les éviter. Le Conseil pourra casser (en dernier ressort), les sociétés financières géantes s'il juge qu'elles font courir des risques à l'ensemble du système. Ainsi, les sociétés financières (Banques, Assurances...) dont l'actif dépasse 50 milliards de dollars à un régulateur unique lui seront soumises. La Loi affirme que les contribuables ne pourront plus être sollicités pour sauver des entreprises financières en difficulté ou payer le coût de leur démantèlement tout comme elle confie à la Compagnie fédérale d'assurance des dépôts bancaires (FDIC), la tâche de se saisir de toute entreprise financière dite systémique qui menacerait de s'écrouler, afin d'organiser son démantèlement dans le calme. Elle oblige les plus grands groupes financiers à présenter régulièrement aux régulateurs un «testament» prévoyant la façon dont elles devraient être liquidées en cas d'urgence. Les grandes Banques ne pourront ainsi plus échanger des produits dérivés que pour se prémunir contre certains risques ou s'il s'agit de contrats de couverture contre le risque de taux d'intérêt ou de taux de change. Les Banques devront scinder sous deux ans leurs activités de salle de marché relatives aux autres types de dérivés, comme les contrats contre le risque de défaut de pays ou d'entreprises. Enfin, la Loi impose qu'ils soient désormais soumis à un régulateur, la SEC, s'ils gèrent des fonds supérieurs à 150 millions de dollars. Dans un souci de transparence, la Loi oblige les émetteurs à fournir davantage de renseignements sur leurs produits tout comme elle leur fait obligation –surtout ceux qui pratiquent la titrisation de prêts (transformation de prêts en titres financiers) de retenir une partie du risque attaché à ces prêts (au moins 5%). Le président de la Banque centrale des Etats-Unis (Fed) Ben Bernanke a qualifié cette nouvelle percée d'«avancée importante» qui donne d'importants pouvoirs de surveillance à son institution. «Avant même l'adoption de la réforme, la Réserve Fédérale a revu sa supervision et son mode de régulation des établissements bancaires et a travaillé pour renforcer les infrastructures et pratiques des marchés financiers», a rappelé M. Bernanke. «Nous assumerons avec application et méticulosité nos responsabilités dans le cadre de la nouvelle Loi», a-t-il promis. La présidente de la FDIC, une autre autorité de régulation bancaire a également salué dans un communiqué «une étape marquante dans l'histoire de la régulation financière aux Etats-Unis». «La responsabilité est maintenant transférée aux régulateurs pour mettre en oeuvre cette Loi d'une manière qui soit conforme à ses principes (...). Comme je l'ai souvent noté, aucune législation, aussi éclairée qu'elle soit, ne peut prévenir à elle seule l'apparition d'une nouvelle crise financière», a-t-elle expliqué.