Le Sénat américain a adopté jeudi par un vote de 60 voix contre 39 une réforme financière historique, ouvrant une nouvelle page dans l'histoire de la législation financière américaine pour la première fois depuis la Grande Dépression dans les années 1930. Le président Barack Obama devrait signer ce projet de loi la semaine prochaine, marquant son entrée en vigueur. Lourde de 2 300 pages, cette loi constitue le remaniement le plus ambitieux de la législation financière depuis plusieurs décennies, et vise à mettre un frein aux pratiques à haut risque de Wall Street tenues responsables de la crise économique mondiale de 2008, ainsi qu'à résoudre le risque systémique représenté par les compagnies financières "trop grandes pour faire faillite", et à constituer une agence de protection des consommateurs pour mieux défendre les intérêts des Américains. L'administration Obama avait proposé cette législation en juin 2009 dans un effort pour éviter que ne se reproduise une crise financière comme celle des deux dernières années. Baptisée d'après le président du comité bancaire du Sénat, Christopher Dodd, et d'après le président du comité des services financiers de la Chambre des représentants Barney Frank, cette loi devrait marquer une nouvelle victoire politique de l'administration Obama après la réforme de la santé qui a reçu la signature présidentielle plus tôt cette année. Avec la réforme de la santé, elle aussi âprement disputée, les démocrates peuvent maintenant faire valoir qu'ils ont mené à bien deux réformes de grande ampleur qui devraient modifier le visage de la société américaine pour plusieurs générations. La nouvelle réglementation financière, à laquelle s'est opposé le secteur bancaire, prévoit notamment une protection accrue du consommateur, donne aux autorités de régulation plus de latitude pour décider du sort des sociétés en difficulté et pose des limites à toute une série d'activités de trading jugées risquées, ce qui devrait peser sur les bénéfices des banques. Les marchés financiers qui escomptaient le vote du texte n'ont pratiquement pas réagi. Le vote du Sénat met fin à plus d'une année d'efforts législatifs après le lancement du projet de réforme par Barack Obama en juin 2009. La Chambre des représentants a voté le texte le mois dernier. Barack Obama avait souhaité à l'origine un soutien bipartisan à ce texte. Mais seuls trois sénateurs républicains l'ont finalement voté, avec 55 démocrates et deux indépendants. Alors que les républicains sont partis pour gagner du terrain lors des élections de mi-mandat au Congrès au mois de novembre, les démocrates ont voulu montrer à leurs électeurs qu'ils avaient mis au pas un secteur qui a plongé le pays dans sa récession la plus grave depuis 70 ans. "Je regrette de ne pas pouvoir vous rendre votre travail ni votre maison qui a été saisie (...) Mais, ce que je peux faire, c'est de faire en sorte que la nation ne traverse plus jamais les épreuves qu'elle vient de subir", a déclaré le sénateur démocrate Christopher Dodd, l'un des principaux rédacteurs du texte. Il n'est toutefois pas certain que les Américains reconnaîtront le travail accompli par les démocrates. Le texte définitif, de plus de 2.300 pages, de la loi "Dodd-Frank" a été conçu pour tenter d'empêcher une nouvelle crise telle que celle qui avait culminé à l'automne 2008, précipitant l'économie des Etats-Unis dans l'abîme.