Comme on l'avait prédit il y'a quelques jours sur ces mêmes colonnes, les déclarations virulentes du PDG du groupe égyptien Orascom Télécom Holding, Naguib Sawiris, ne sont pas tombées dans l'oreille d'un sourd, du côté d'Alger. Le patron d'OTH, qui pensait rameuter l'opinion internationale, ou du moins arabe, en ruant dans les brancards contre la prétendue «hogra», dont il serait victime en Algérie, ne savait certainement pas qu'en agissant de la sorte, il était en train d'aggraver son cas dans un pays qui lui avait pourtant offert toutes les conditions, pour réussir et faire de sa filiale Djezzy une véritable poule aux œufs d'or. Mais, sa mémoire courte aidant, Sawiris tente de se placer en victime d'une haine qu'il n'arrive pas, dit-il, à s'expliquer. Fort de ses «relations» dans le monde des affaires, Sawiris a multiplié ces dernières semaines ses déclarations peu amènes à l'égard de l'Algérie, pensant peut-être que cela allait lui assurer une protection dans son bras de fer contre le gouvernement algérien. «Il y a un vrai changement de climat en Algérie où les investissements étrangers ne sont plus les bienvenus», osait-il lâcher dans les colonnes du très sérieux quotidien économique français la Tribune. De l'audace. Mais, le retour du bâton risque d'être pas facile à supporter comme le démontre la nouvelle d'un nouveau redressement fiscal que vient de recevoir le groupe égyptien, comme une tuile sur la tête. Ayant certainement pris conscience après coup que cette fois-ci, il était allé très loin dans ce qu'il semble considérer comme une guerre médiatique, le groupe égyptien tente la diversion. Il essaye de refaire le coup de MTN, l'opérateur de téléphonie mobile Sud-Africain avec lequel Orascom avait engagé des négociations pour la vente de Djezzy, passant outre la mise en garde des autorités algériennes qui n'avaient pas cessé de brandir le droit de préemption sur toute opération de vente, de rachat ou de reprise des sociétés. Cette fois-ci, les responsables d'OTH affirment être en discussion sur un probable rachat de certaines filiales du groupe (ou peut-être tout le groupe) par l'opérateur de téléphonie mobile russe Vimpelcom (voir notre édition d'hier). Les deux parties sont en négociations pour racheter la participation de Naguib Sawiris dans la Holding italienne Weather Investments qui détient 51% de l'opérateur Orascom Télécom, maison mère d'OTA. La transaction est estimée à 6,5 milliards de dollars. Les deux parties semblent miser sur la prochaine visite à Alger du président russe Dimitri Medvedev, pour faire passer l'accord, oubliant par là l'intransigeance des autorités algériennes sur le dossier. L'insolence du dirigeant égyptien le pousse jusqu'à ignorer que le processus de reprise de Djezzy par l'Algérie est engagé, comme l'avait rappelé le ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la Communication, Moussa Benhamadi. La réponse de Sawiris aux membres du gouvernement est empreinte d'insolence et de mépris. «Djezzy n'est pas à vendre», a-t-il déclaré dans l'entretien paru jeudi dans le quotidien français la Tribune. Et la réponse du gouvernement algérien à l'entêtement du patron égyptien n'a pas tardé à venir. Un nouveau redressement fiscal portant sur les exercices 2008-2009 d'un montant de 17 milliards de DA, soit environ 230 millions de dollars, adressé par l'administration des impôts à Djezzy. Une tuile qui s'ajoute à la plainte déposée par la Banque d'Algérie contre le groupe Orascom soupçonné, cette fois-ci, d'avoir porté atteinte à la législation sur le change et le transfert des capitaux. Evidemment, la réaction d'Orascom ne s'est pas faite attendre puisqu'elle a rapidement rendu public un communiqué dans lequel elle conteste les calculs des services des impôts qui ont abouti à la bagatelle de 17 milliards de DA d'arriérés d'impôts. Le patron d'Orascom n'est pas sans savoir que le processus de reprise de Djezzy par l'Etat est inéluctable. «C'est une question de temps. La décision politique a été prise pour l'acquisition de Djezzy. Nous essayons d'aller vite. Le processus est engagé, le dossier est ouvert. Ce n'est pas une affaire facile. Il faut laisser le dossier se développer naturellement», avait expliqué récemment Moussa Benhamadi. Les observateurs ne manqueront donc pas de s'interroger sur cette agitation orchestrée par le patron du groupe égyptien dans les médias étrangers. Est-ce là la rançon de l'ingratitude ?