En annonçant, lors de la dernière édition du Forum de coopération sino-africaine (Focac), qui vient de se tenir dans la station balnéaire égyptienne de Charm El Cheikh, d'octroyer dix milliards de dollars (6,66 milliards d'euros) de prêts pour l'Afrique, la Chine veut vraisemblablement conquérir le continent noir. Et parallèlement, le pétrole du Nigeria, de l'Algérie, de la Libye ou de l'Angola, le fer et le cuivre de l'Afrique du Sud, le bois du Gabon ou encore le chrome du Zimbabwe, sont des ressources indispensables pour réaliser les objectifs de croissance économique que s'est fixés Pékin. Aujourd'hui, deuxième consommateur de pétrole au monde, la Chine importe de plus en plus massivement son énergie, notamment d'Angola, son principal fournisseur en Afrique. Les experts et spécialistes en géopolitique soutiennent que, pourtant, les raisons qui poussent Pékin à investir de plus en plus en Afrique, sont à chercher au-delà des simples intérêts commerciaux. Il s'agit, surtout, d'y limiter l'influence des Etats-Unis et de certains pays européens considérés comme des rivaux dans la course aux hydrocarbures africains. Pour ce faire, toutes les acrobaties sont permises. En effet, les multinationales chinoises ne cessent d'«envahir» le continent africain. Ces dernières investissent dans plusieurs secteurs d'activité. Elles sont dans la construction d'infrastructures, tandis qu'elles y exportent toutes sortes de produits à bas coût : textiles mais aussi des matériels de télécommunication, des produits d'équipements industriels et ménagers, des véhicules de transport. Les spécialistes en la matière indiquent que ces dernières années, les investissements directs chinois en Afrique sont passés de 327 millions d'euros en 2003 à 5,2 milliards en 2008, illustrant la montée en puissance de la «Chinafrique». Les entreprises de l'Empire du Milieu se sont durablement implantées dans nombre de pays du continent noir, taillant des croupières à ses concurrents occidentaux. En témoignent ses investissements dans le pétrole au Soudan, dans les infrastructures routières et la construction dans notre pays, l'industrie minière en République démocratique du Congo et en Zambie. Symbole de cette relation, le pétrole africain représentait 30% des importations chinoises en 2006. Et ce chiffre a été multiplié par 5 en moins de 10 ans. Pour la Chine autrefois autosuffisante en énergie, c'est une question cruciale pour son développement. Près de 5 milliards de dollars d'échanges commerciaux entre l'Algérie et la Chine Si la distance qui la sépare de notre pays est très longue, la Chine figure déjà dans le top dix des fournisseurs et des clients de l'Algérie. Les échanges commerciaux entre les deux pays ne cessent d'enregistrer une courbe ascendante. Ils passent de 0,29 milliard en 2001 à 4,54 milliards de dollars en 2008. De janvier à septembre de l'année en cours, le volume des échanges commerciaux entre les deux pays a atteint 3,77 milliards de dollars malgré les effets de la crise financière mondiale, en hausse de 7,4% par rapport à la même période de l'année précédente. Par ailleurs, le volume des investissements chinois en Algérie a atteint 0,86 milliards de dollars. Et si le géant asiatique s'était engagé à apporter 5 milliards de dollars d'assistance financière à l'Afrique lors de la précédente édition du sommet sino-africain, tenu en 2006 à Pékin, en concluant également des accords de réduction ou d'annulation de dettes avec 31 pays du continent noir, la relation avec l'Algérie est plutôt bâtie sur le principe «gagnant-gagnant». Ce pays qui commence à faire de l'ombre aux traditionnelles puissances mondiales (Etats-Unis, France, Allemagne), a décroché plusieurs contrats de partenariat dans divers secteurs d'activité. Du traditionnel secteur de l'énergie aux travaux publics, notamment l'autoroute Est-Ouest, les Chinois ne veulent visiblement laisser aucun secteur d'activité. Autres domaines qui suscitent l'intérêt des Chinois : l'informatique et les télécoms et, surtout, la production automobile. Ces derniers temps, on vient d'annoncer que l'entreprise publique la Grande Muraille vient de signer un contrat avec une entreprise privée algérienne pour le montage de micro-ordinateurs en Algérie. L'usine sera bientôt opérationnelle. L'équipementier Huawei, installé en Algérie depuis dix ans, envisage d'ouvrir à Alger deux centres, l'un destiné à la formation, l'autre à la recherche. Au sommet de l'Etat algérien, la volonté d'octroyer des marchés aux investisseurs étrangers, en partenariat avec leurs homologues algériens, et ce, pour produire et créer des postes d'emploi est affichée à plusieurs reprises. Lors des travaux de la 4e conférence ministérielle du forum sino-africain de coopération, le président Bouteflika a appelé au développement et à l'approfondissement des échanges culturels et humains entre les peuples d'Afrique et de Chine afin de «créer les passerelles supplémentaires pour consolider la compréhension et le respect mutuels». Concernant l'Algérie, le premier magistrat du pays a qualifié d'«exemplaires» les relations de coopération entre l'Algérie et la Chine, en rappelant, au passage, le soutien apporté par ce pays à la «juste cause» durant la guerre de libération nationale. Côté coopération commerciale, la même source a fait savoir que la Chine participe aujourd'hui en Algérie à la réalisation de projets de développement «de grande envergure». Il a, notamment, cité dans ce contexte la participation chinoise à la construction du réseau autoroutier. Pour M. Bouteflika, c'est ce type de coopération et de partenariat «à fort potentiel intégrateur que nous souhaitons privilégier avec la Chine». «Nous encourageons les entreprises chinoises à venir s'installer ici car le pays applique des mesures pour encourager les investisseurs et améliorer l'attractivité des investissements étrangers directs», a assuré récemment le président de la Chambre algérienne du commerce et d'industrie (CACI). Pour M. Bendjaber, l'investissement chinois en Algérie à travers la création de filiales de production est bénéficiaire aux deux parties. Il permet à la Chine de trouver d'autres débouchés et à l'Algérie de démarrer sa machine industrielle, de créer de l'emploi local et de générer des ressources en impôts. S. B.