Au moment où les nouvelles mesures économiques contenues dans la Loi de finances complémentaire pour l'année 2009 (LFC 2009) continuent à susciter la controverse, ici et là-bas, Zaïm Bensaci, Président du Conseil National Consultatif pour la promotion de la PME n'en démord pas et continue, lui, de soutenir, mordicus, la position du gouvernement. Le Financier : Vous êtes parmi les rares patrons d'entreprises à s'être félicité des dispositions contenues dans la LFC. Pouvez-vous nous expliquer, en quelques mots, votre enthousiasme ? Zaïm Bensaci : Cette révision de la législation économique a été rendue nécessaire, faut-il le souligner, par l'emballement sans précédent des importations de produits de consommation qui ont atteint, veuillez-le noter, des niveaux inquiétants pour notre balance des paiements et en érodant les parts de marché des entreprises nationales. Globalement, l'ouverture de notre économie a largement joué en défaveur de notre appareil productif national et a eu, pour effet, une brutale mortalité des entreprises et une désindustrialisation dans le pays. Certaines PME se sont retrouvées confrontées, du jour au lendemain, à une ouverture « tous azimuts » du marché national. Fragilisées, les entreprises algériennes perçoivent, aujourd'hui, comme un challenge difficile à tenir, la concurrence inhérente à la création de la zone de libre-échange avec l'Union européenne ainsi que celle induite par l'adhésion récente à la zone arabe de libre-échange. Et puis nous avons, nous-mêmes, toujours plaidé au niveau de notre conseil pour une «préférence nationale» qui n'exclut pas pour autant la concurrence… Les observateurs étrangers parlent souvent de «révolution tranquille» s'agissant des réformes économiques en Algérie. Certains parlent, aujourd'hui, sans ambages, d'un véritable retour en arrière. Qu'en- pensez-vous ? Il est vrai que le processus de mutation de notre économie traîne en longueur et apparaît, à bien des égards, laborieux, voire même erratique aux yeux de certains de nos partenaires. Mais une chose est sûre pour nous, la libéralisation du commerce extérieur ne peut se résumer à une «liberté d'importer» sans restriction aucune. Si encore cette liberté trouvait son pendant dans la capacité de nos entreprises à exporter, soyez assurés, que dans ces conditions, on ne trouvera rien à redire. Bien au contraire. Le pouvoir de négociation de notre pays s'étant nettement renforcé grâce à nos potentialités énergétiques, il est permis d'envisager, à présent, de mieux valoriser, auprès des leaders mondiaux, notre expérience industrielle, la technicité de notre main-d'œuvre et dans le cas d'espèce le dynamisme de notre marché intérieur. Ne pensez-vous pas, tout simplement, que l'économie rentière inhibe en Algérie toute velléité industrielle et compromet toute croissance hors hydrocarbures ? Justement ! Au lieu d'être l'occasion d'une multiplication d'opportunités d'affaires pour nos entreprises, c'est cette prospérité pétrolière récente qui a été la cause de l'irruption anarchique et massive de produits qui ont mis en péril nombre d'entreprises jusqu'à faire cesser leurs activités pour certaines d'entre elles. Mais ceci n'est pas une fatalité ni une malédiction comme on a coutume de dire. L'expérience a, au contraire, montré que l'industrie pétrolière est un puissant facteur de développement dés lors qu'elle se fixe comme priorité stratégique de créer dans son sillage un puissant tissu de sous-traitance nationale. À l'instar du secteur de l'énergie, d'autres secteurs peuvent également jouer un rôle déterminant dans la promotion de la sous-traitance nationale (industries mécanique, pharmaceutique, agroalimentaire, …) qui est, permettez-moi, de le souligner un élément incontournable de toute politique de soutien à la PME. Le conseil que vous présidez n'a cessé de revendiquer l'amendement du Code des marchés publics. Maintenant que c'est chose faite, quel est votre sentiment ? Nous éprouvons un grand sentiment de satisfaction car, jusque-là, la PME algérienne était souvent exclue de la commande publique au motif qu'elle n'avait pas les moyens nécessaires ou alors qu'elle ne soutenait pas assez la concurrence. La nouveauté, aujourd'hui, réside dans le fait que cette révision oblige l'administration à envisager ses achats sous l'angle de l'intérêt des PME. Cela se traduit par une simplification des procédures et une redéfinition des critères de choix fondée non plus sur le critère du «moins disant» mais sur «le meilleur achat». Pensez-vous que cette révision va insuffler une nouvelle dynamique pour les PME algériennes ? Absolument ! Nous considérons même que c'est une véritable opportunité économique pour la PME algérienne. Les modifications apportées facilitent aux PME non seulement l'accès des PME aux marchés publics mais leur assurent également un cadre juridique et économique plus protecteur. Désormais, les capacités d'innovation des PME ou leur souplesse d'adaptation trouveront à s'exprimer à chaque fois que la personne publique fera appel à elles. Quelle sera, selon vous, la portée de ces amendements ? Il faut savoir, par exemple, que le code des marchés publics est l'un des instruments juridiques le plus important dans le champ économique national. La dépense publique représente, d'après la Loi de finances pour 2009, quelque 2.700 milliards de dinars, soit plus de 30 milliards d'euros. L'Etat reste, ainsi, le plus gros ordonnateur et acheteur dans le pays. En tant que tel, il se devait d'être le garant de l'égal accès aux marchés publics. Les contraintes imposées par l'ancien texte se sont fait jour, notamment à la lumière des différents plans de développement initiés par le président Abdelaziz Bouteflika. Le rythme de croissance des investissements a très vite mis en évidence de nombreuses lacunes. Dés lors, ces amendements sont devenus incontournables.