Les prix de la pomme de terre ont flambé ces derniers jours dans les principaux marchés de la capitale ainsi que d'autres places du pays, en raison des fortes intempéries du mois de février derniers qui ont retardé la récolte de ce produit dans les champs. Une tournée effectuée aux marchés de fruits et légumes de Bir Mourad Rais, El Madania et de cité El Afia (Kouba) a permis à l'APS de voir que les prix de ce produit de large consommation s'affichaient allégrement dans une fourchette de 85 à 100 DA, contre 40 à 50 DA il y a trois semaines. Selon le président du Conseil interprofessionnel de la filière pomme de terre, M. Séraoui, la hausse des prix est due aux intempéries de février qui ont retardé les récoltes. «La récolte de la pomme de terre prévue pour le mois de février a été décalée d'un mois en raison du gel qui a frappé les zones productrices suite aux récentes intempéries», a expliqué à l'APS M. Séraoui. Il a cité Mostaganem, une grande wilaya productrice, où 2.500 hectares (ha) seulement ont pu être récoltés sur les 7.000 ha prévus. La production de «la primeur» qui devait entrer sur le marché fin février sera récoltée d'ici fin mars à début avril. «Nous devons attendre jusqu'au début du mois prochain (avril) pour voir la hausse des prix s'estomper», a indiqué M. Séraoui, soulignant que le Système de régulation des produits agricoles de large consommation (Syrpalac) qui a mis sur le marché des quantités, bien que limitées, a empêché le prix de ce tubercule d'atteindre les 200 DA/kg. Il a précisé, néanmoins que le Syrpalac n'avait pas prévu ce décalage dans la récolte étant donné que les quantités stockées suffisaient jusqu'à fin février, date de l'entrée de la nouvelle production sur le marché. M. Séraoui a indiqué à cet égard que cette situation allait servir d'expérience pour améliorer le système de régulation des produits agricoles. Abondant dans le même sens, M. Radjem Khoudja Youcef, Directeur de la régulation et du développement de la production agricole au niveau du ministère de l'Agriculture et du développement rural, a expliqué cette envolée des prix par les dernières conditions météorologiques. «Les conditions climatiques ont été pour beaucoup dans la hausse des prix, le ressuyage qui demande 3 à 5 jours (opération par laquelle on enlève la terre des légumes après leur arrachage, temps de séchage des légumes que l'on ressuie) doit se faire 4 à 5 jours après les chutes de pluies, car les champs sont gorgés d'eau et de ce fait inaccessibles», a-t-il expliqué. L'autre problème qui a contribué à cette hausse réside dans la difficulté rencontrée dans le transport des produits agricoles lors des intempéries qui ont coupé plusieurs axes routiers, a expliqué encore M. Redjam, qui s'attend toutefois à une bonne production suite à ces pluies. Le responsable a précisé que d'ici une dizaine de jours au plus tard les prix se stabiliseront autour de 50 DA le kilo, «des prix qui restent relativement accessibles», en raison de l'augmentation des prix des intrants, du manque de main d'oeuvre agricole, dira-t-il. Rencontrés au marché d'El Madania, des citoyens venus faire leurs courses avaient du mal à cacher leur étonnement, voire leur mécontentement en constatant la flambée des prix de la pomme de terre qui a plus que doublé. Du jamais vu «C'est du jamais vu!» s'exclame une vielle femme lorsque un vendeur ambulant lui a répondu que le prix du kilo de la pomme de terre était de 100 DA. Ce dernier ne s'est pas empêché de rectifier en lui rappelant que les prix de la pomme de terre avaient déjà connu, par le passé, une flambée plus conséquente que celle-ci. Les étals des détaillants ne sont plus remplis, comme de coutume, par ce «produit prisé» par le consommateur. Chez certains commerçants, seulement quelques kilos sont étalés, alors que d'habitude des quintaux de ce produit sont exposés et souvent écoulés en un temps record. «D'habitude j'achète 6 à 8 quintaux de pomme de terre pour les revendre. Mais avec la flambée des prix de gros au marché de Bougara (Blida) je n'achète que 1 à 2 quintaux. Ce n'est plus vraiment rentable pour moi», déplore Abdelkader, un détaillant du marché d'El Madania. De plus, les gens n'achètent plus la même quantité avec cette flambée des prix. A peine s'ils achètent 2 à 3 kilo, a-t-il ajouté. La criée de vendeurs ambulants a disparu, a confié un habitant de ce quartier. Selon lui, il serait indécent de «crier à tue tête» pour proposer un kilo de pomme de terre à 100 DA. Pour Rachid K, détaillant au marché d'El Afia, un réseau de spéculateurs qui guettent les fluctuations du marché y est pour beaucoup dans cette flambée des prix de la pomme de terre. Ces spéculateurs ont acheté, dès qu'ils ont senti une pénurie de la pomme de terre sur le marché du fait des intempéries, de grosses quantités pour les stocker et ensuite les revendre aux détaillants à des prix exorbitants, au grand dam du consommateur, a expliqué ce commerçant. Les consommateurs restent, quant à eux, partagés sur cette flambée «inattendue» qui vient une fois de plus grever leur budget. Pour certains d'entre eux, la pomme de terre est à «bannir» de leurs achats jusqu'à «nouvel ordre», soulignant leur incompréhension devant cette «soudaine» flambée des prix. «Il n'est pas question que j'achète de la pomme de terre à 100 DA (...) Je ne suis pas une bourgeoise pour que je me permette ce luxe», s'est indignée Fatima, rencontrée chez un marché d'El Madania. Mais pour d'autres, amoureux de ce «tubercule», il leur est impossible de ne pas se procurer ce produit tant «prisé» dans les foyers. «Mes enfants et ma femme sont +accros+ à la pomme de terre. Ils en consomment chaque jour sous forme de frite ou de purée. Même si les prix ont doublé ces derniers jours j'achète la même quantité qu'avant. Je n'y peux rien», a avoué, fataliste, Belkacem, chauffeur dans une entreprise publique. Adda A.