Les 4,9 millions de migrants présents en France, et ceux qui vont s'y installer, sont au cœur de deux enjeux concomitants. Le premier est de mieux les intégrer économiquement. Aux yeux d'un grand groupe bancaire et financier, témoin privilégié des conditions de vie souvent dures des migrants en France, cet objectif est rendu plus compliqué à atteindre, vu le rythme actuel du flux d'immigration. Aucun critère économique, comme le PIB, le nombre de logements construits, notre capacité à créer des emplois, n'est en cohérence avec une telle augmentation. Le second s'inscrit dans un contexte mondial où le nombre de migrants ne cesse d'augmenter et où le vivier semble inépuisable. En effet, pour des raisons diverses, à savoir la vision idyllique qu'a la jeunesse de ces pays du monde occidental, véhiculée notamment par les progrès technologiques des moyens de communication, la pression migratoire à nos frontières ne semble pas devoir cesser dans les années à venir. L'enjeu est donc le développement des pays d'origine des migrants pour prévenir l'émigration de nouvelles populations. Malgré le caractère incomplet des données statistiques disponibles, les banques peuvent apporter aux pouvoirs publics un éclairage particulièrement utile sur les migrants. Le secteur bancaire est en effet un témoin privilégié de leur comportement économique, dans la mesure où les opérateurs financiers comptent parmi les premiers interlocuteurs des étrangers présents en France. Les banques interviennent dans l'ensemble des opérations touchant les revenus des migrants, leurs habitudes de consommation, leurs comportements d'investissement et les liens financiers qu'ils entretiennent avec leur pays d'origine. Les éléments, dont dispose le secteur bancaire, semblent d'autant plus pertinents que le taux de bancarisation des migrants est élevé : il ressort des enquêtes de l'INSEE et de l'étude réalisée pour la Cnce (Caisse Nationale des Caisses d'Epargne) que 96% d'entre eux possèdent un compte-chèques. Ce taux est très proche de la moyenne nationale (98%). Ainsi, sur 4,9 millions d'immigrés présents en France, 200.000 seulement demeurent à l'écart du système bancaire, cette situation étant imputable à la précarité des revenus ou à l'arrivée récente des personnes concernées. De toutes les informations disponibles, il ressort que les migrants connaissent de réelles difficultés d'intégration sur le plan matériel. Ces difficultés se manifestant tant en matière financière que sur le plan économique. Les relations entre les migrants et leurs banques sont largement déterminées par ces contraintes financières. Près de 14% des migrants partagent l'opinion selon laquelle l'accès au crédit et aux services bancaires serait relativement fermé aux personnes les plus récemment installées sur le territoire national. Il importe, toutefois, de noter que ce phénomène concerne pour l'essentiel les catégories les plus fragiles sur le plan économique (revenus mensuels inférieurs à 1.000 euros). La persistance de telles difficultés explique pourquoi le taux de détention de produits bancaires demeure faible parmi la population des migrants. Alors que la moyenne nationale est de 84%, seulement 62% des migrants détiennent des produits de ce type (en particulier livret A et CODEVI). Par ailleurs, 24% des migrants recourent aux dispositifs d'épargne logement (PEL, CEL). Enfin, le taux de détention de produits financiers, tels que l'assurance-vie, au sein de cette population demeure faible (16% contre une moyenne de 40%). Les envois d'argent des migrants sont estimés en 2007 par la Banque mondiale à 318 milliards de dollars, dont 240 milliards vers les pays en voie de développement. Les transferts effectués via des circuits informels semblent presque aussi importants. Enfin à noter que les transferts de fonds des travailleurs immigrés en France sont évalués annuellement à près de 9 milliards d'euros, soit l'équivalent du montant de l'aide publique française au développement qui est de 9,2 milliards d'euros en 2007.