Le chef du gouvernement, M. Abdelaziz Belkhadem, premier invité du Forum de l'ENTV, diffusé samedi par la télévision nationale, s'est exercé durant deux heures au jeu des questions-réponses avec des journalistes présents sur le plateau. En préambule, il a tenu à démontrer, chiffres à l'appui, la bonne santé économique du pays. Il dira dans ce contexte que l'Algérie a enregistré un taux de croissance de 5 % et un taux d'inflation de moins de 2 %, et que la dette extérieure est tombée, quant à elle, à 5 milliards de dollars alors qu'elle avoisinait les 33 milliards de dollars à la fin des années 90. Il fera remarquer que si ces résultats positifs ont été engrangés grâce à la hausse du prix du pétrole, ce facteur n'est pas le seul à être à l'origine des ces performances mais c'est aussi grâce à la politique économique et financière initiée par le président de la République depuis 1999. Il imputera également la concrétisation des investissements généraux à la mise en application du programme de soutien à la relance économique (PSRE) 2001/2004 doté d'une enveloppe financière de 500 milliards de dinars et également au programme quinquennal 2005/2009 qui s'est vu mobiliser un montant de 8 500 milliards de dinars, soit une enveloppe globale pour les deux programmes de 110 milliards de dollars. Programmes de soutien à la croissance : 153 milliards de dollars mobilisés Il évoquera également l'association à ces deux programmes, le développement des régions du Sud et des Hauts-Plateaux, le tout représentant un investissement une mobilisation financière de 153 milliards de dollars touchant l'ensemble du territoire national de la période allant de 2001 à 2006. C'est un effort immense, sans précédent dans l'histoire du pays depuis qu'il a recouvré son indépendance, dira-t-il. Il abordera également les réformes entreprises depuis quelques années. Il dira dans ce contexte que les pouvoirs publics sont en train de “faire une évaluation des réformes économiques entreprises par le pays depuis 1988 ; lorsque cette étude sera achevée, les conclusions seront soumises au chef de l'Etat”. Il dira également que le programme du président de la République s'exécute normalement et sans entrave ni retard. Au sujet du développement rural, l'invité du forum a déclaré qu'un plan d'action a été établi en collaboration avec le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales et celui de l'Agriculture et du Développement rural pour assurer le développement des 950 communes rurales pauvres. Toujours dans le même contexte et dans ses réponses concernant une éventuelle catastrophe alimentaire au regard des prémices d'une sécheresse annoncée, M. Belkhadem tranquillisera l'opinion nationale et pour cause dit-il “les réserves de l'Algérie en céréales permettent de couvrir une saison agricole complète. Au cours de la période juin/octobre, nous avons anticipés sur les événements par l'achat de très grande quantités de céréales à des prix raisonnables, avant que les prix du blé n'atteignent les 200 dollars la tonne”. Il parlera également du problème de la hausse des prix de la pomme de terre pour imputer cela aux spéculateurs qui se sont appropriés le marché de ce produit durant ces dernières semaines, annonçant que dans les prochains jours le marché de la pomme de terre se stabilisera avec l'arrivée de la nouvelle production. Il précisera qu'il n'est pas question d'importer ce produit étant donné que l'actuelle production nationale est à même de couvrir la consommation nationale.
La lutte contre la corruption : une priorité Expliquant la décision du gouvernement d'élaborer la loi de finances sur la base d'un baril de pétrole à 19 dollars, alors que le prix a dépassé les 60 dollars, le chef de l'exécutif dira que l'objectif est d'assurer l'avenir des nouvelles générations. M. Belkhadem a indiqué, à ce propos, que le Fonds de régulation des recettes a atteint actuellement 3 100 milliards de dinars. La lutte contre la corruption sera menée avec tous les moyens légaux mais aussi avec l'implication de toute la société, a affirmé le chef du gouvernement. “La lutte contre la corruption n'est pas seulement du ressort des pouvoirs publics, mais elle concerne également toute la société”, a déclaré M. Belkhadem, précisant que la corruption n'est pas un phénomène nouveau propre à la société algérienne. Le chef du gouvernement précisera que “ce qui est nouveau, c'est le fait de la dénoncer, parce qu'il s'agit-là de biens publics et les citoyens sont dans leur droit de savoir comment l'argent public est géré”.
Réconciliation nationale : le bilan Abordant le volet de la réconciliation nationale, le chef du gouvernement dira que “l'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale est en mesure de contribuer largement à l'assainissement du climat politique dans le pays. Sans la paix, sans la stabilité, il ne peut y avoir de développement”, explique-t-il. Le chef du gouvernement, évoquant le bilan de la Charte, dira que “la réconciliation nationale c'est avant tout une morale et un comportement, cela ne peut se cantonner à une période, de même que la politique de réconciliation nationale ne peut se faire valoir à travers des chiffres”. Argumentant ses propos M. Belkhadem rappelle que les blessures cicatrisées, l'arrêt de l'effusion de sang, l'arrêt des tueries, l'enterrement des rancœurs, ne peuvent se résumer à un chiffre, quel que soit son importance pour les uns ou les autres. Sur ce chapitre, il révélera que 10 346 enquêtes sociales concernant les familles de terroristes nécessiteuses ont été effectuées et que 6 052 dossiers ont été étudiés, dont 3 769 ont été acceptés, indiquant que “le reste des dossiers attend des compléments d'informations”. Concernant la réintégration des personnes ayant fait l'objet de licenciement durant la décennie du terrorisme, M. Belkhadem a fait savoir que “13 320 personnes concernées se sont présentées aux commissions de wilaya et que le nombre des demandes de réintégration s'élève à 4 690 et celui des indemnisations à 3 100”, précisant, à ce sujet, que “5 300 dossiers ont été traités”. Evoquant le dossier des disparus, le chef de l'exécutif a expliqué que leur nombre s'élève à 6 601 cas, ajoutant que “3 610 personnes de leur famille ont reçu des décisions de justice à la fin du mois d'août dernier”. A une question sur les problèmes qui ont entravé l'application des dispositions de la Charte sur le terrain, le chef de l'exécutif a estimé qu'”il s'agit plutôt de ralentissement que d'entraves dans l'application de ces dispositions”, d'autant, a-t-il expliqué, que certaines enquêtes ont nécessité “plus de temps”. Par ailleurs, il a indiqué que “16 930 terroristes ont été tué depuis le début du terrorisme en Algérie 4 800 actes de décès ont été délivrés par les services de la Gendarmerie nationale et 4 460 autres par les service de police”. Interrogé sur le sort des Patriotes, le chef du gouvernement a estimé que “l'Algérie n'abandonnera pas ses enfants, notamment ceux ayant fait face au terrorisme”. Quant à la possibilité du retour de certains responsables du parti dissous sur la scène politique, M. Belkhadem a souligné que “le texte de la Charte est claire sur cette question”. “La Charte interdit toute activité politique à toute personne à l'origine de la tragédie nationale”.
Révision de la Constitution : 3 moutures sur le bureau du Président Sur la question de la révision de la Constitution, laquelle, il faut le dire, soulève moult interrogations, M. Belkhadem est catégorique : “il y aura référendum sur la révision de la Constitution , il y a report parce qu'il y a d'abord des priorités. Le président de la République a eu à étudier l'évaluation pour chaque secteur, pour chaque département ministériel au cours du mois de Ramadan, et actuellement le président de la République a deux ou trois moutures de révision constitutionnelle, qu'il est en train d'affiner et d'analyser pour porter son choix sur l'une d'elle. Et le jour où il décidera d'une mouture donnée, là il convoquera le corps électoral”. Donc, pour le chef du gouvernement, il ne s'agit nullement d'annuler la révision de la loi fondamentale du pays mais seulement un léger report.
Relations algéro-françaises : Paris doit reconnaître ses crimes Le chef du gouvernement a également saisi l'occasion de son passage à l'ENTV pour évoquer les relations algéro-françaises qu'il qualifiera d'”amicales” tout en insistant sur le fait que la France doit reconnaître les crimes commis durant la période coloniale. Le chef du gouvernement a rappelé, à cet effet, la déclaration du président français, Jacques Chirac, lors d'une visite en Turquie, au sujet des Arméniens, et selon laquelle “un Etat se grandit en reconnaissant ses erreurs envers les peuples”. “L'Algérien peut pardonner mais n'oubliera jamais les crimes commis par la France durant la période coloniale”, a-t-il dit. Quant aux relations algéro-marocaines, le chef du gouvernement a souligné que “le Maroc est un pays frère et nous sommes prêts à travailler avec lui sur ce qui est bénéfique pour les deux peuples”. “Le seul désaccord avec nos frères marocains réside dans le dossier du Sahara Occidental qui reste un problème de décolonisation”, a-t-il tenu à expliquer, précisant que l'Algérie demeure attachée à l'Union maghrébine.