Les frères Dardenne signent "Le silence de Lorna", un drame de l'immigration pas toujours crédible mais aussi un touchant portrait de femme, récompensé par le Prix du scénario au Festival de Cannes, et mercredi sur les écrans. Lorna, une Albanaise (Arta Dobroshi), a émigré en Belgique grâce à un mariage blanc avec Claudy, un jeune drogué qui tente désespérément de se sevrer (Jérémie Renier, lancé à 14 ans par "La promesse" des Dardenne).A Liège, Lorna mène une vie morne auprès de Claudy et rêve d'un divorce express qui lui permettrait de toucher le pactole en contractant un nouveau mariage blanc avec un immigrant russe. Mais la jeune femme est sous la coupe de son passeur Fabio (Fabrizio Rongione) qui veut faire disparaître Claudy en simulant une surdose : une fois veuve, Lorna ne pourra perdre sa nationalité belge. Se taira-t-elle ? Lorsqu'elle se croit enceinte après une nuit avec Claudy, tout vacille. Cinéastes du réel, émus par la misère et l'injustice sociale, les Dardenne mettent à nouveau l'immigration au coeur d'une fiction inspirée par un fait divers, douze ans après "La promesse", où un marchand de sommeil exploitait des travailleurs sans-papiers. Filmé de manière plus classique que "Rosetta" -- Palme d'or à Cannes il y a neuf ans -- où la caméra virevoltait autour de l'héroïne, captant sa révolte dans des cadres serrés, "Le silence de Lorna" part d'une démarche différente, ont expliqué à Cannes Jean-Pierre et Luc Dardenne. "Nous voulions regarder cette femme, il ne s'agissait donc pas de bouger avec elle, d'être dans son énergie. Nous voulions enregistrer plus qu'écrire avec notre caméra", avaient affirmé les cinéastes belges. Vraie révélation du film, la jeune Arta Dobroshi faisait partie des favorites pour le prix d'interprétation à Cannes. "Notre assistant est parti en Albanie et a filmé cent jeunes comédiennes parmi lesquelles il y avait Arta, que nous avions vue dans deux films tournés là-bas. Elle nous plaisait, elle parlait albanais, bosniaque et anglais... mais pas français, qu'elle a appris pour le film", avait expliqué Luc Dardenne. Bien que primé par le jury cannois présidé par Sean Penn, le scénario pâtit de retournements de situations parfois peu crédibles à l'écran, voués à dramatiser artificiellement un film qui curieusement, n'émeut pas vraiment. En particulier, après une première moitié de film assez réussie, "Le silence de Lorna" perd de son intensité, et le basculement psychologique de Lorna à la fin peut sembler assez gratuit. Les frères Dardenne ont remporté deux Palmes d'or à Cannes, l'une avec "Rosetta" en 1999 et l'autre six ans plus tard, avec "L'enfant.